Disparition de Narumi Kurosaki à Besançon : la longue liste des éléments accablants à l'encontre de Nicolas Zepeda

Le Procureur de la République tenait une conférence de presse ce jeudi à Besançon. "La dernière" avant le procès. Le parquet a demandé cette semaine au Chili d'extrader Nicolas Zepeda Contreras suspecté d'avoir tué l'étudiante japonaise en décembre 2016. Les éléments sont accablants. Détails.

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Le procureur de la République Etienne Manteaux s'est exprimé ce jeudi 10 octobre depuis Besançon sur cette affaire qui demeure floue. "C'est la dernière fois que je m’exprime avant une audience pénale" a débuté le procureur.

Durant plus d'une heure, Etienne Manteaux a tenu à détailler de manière extrêmement précise toutes les informations dévoilées par l'enquête qui ont permis de formaliser une demande d'extradition. "J'ai synthétisé les éléments factuels objectifs tirés de cette instruction dans un document d'extradition de 27 pages, avec, joint à cette demande, toutes les pièces du dossier d’instruction" a-t-il expliqué.
 

 

Une série d'éléments accablants


Trois ans après la disparition de l'étudiante japonaise, c'est un nouvel acte judiciaire fort qui est en cours. Il était très attendu par les parents de Narumi Kurozaki. "La demande d'extradition a été transmise au parquet général de Besançon", a expliqué à la presse le procureur de la République de Besançon, ce jeudi 10 octobre. 

Pourquoi cela a été si long ? "Nous avons pris notre temps parce que pendant très longtemps nous avons eu espoir que quelqu’un retrouve les restes humains de Narumi Kurosaki et que nous puissions mener des investigations sur le corps de cette jeune femme" s'est d'abord justifié le procureur.

Pourtant, les éléments dévoilés en détails ce jeudi sont accablants. Longuement, Etienne Manteaux a énuméré la longue liste des soupçons et des preuves impliquant Nicolas Zepeda. Cinq séries d'éléments objectifs de l’enquête ont poussé la justice française à déposer cette demande d’extradition : 
 

La relation amoureuse 


Née le 23 juillet 1995 à Tokyo, Narumi Kurosaki était une étudiante brillante. Elle et Nicolas Zepeda se sont rencontrés en octobre 2014, au Japon, alors que Nicolas Zepeda effectuait des études là-bas. Ils ne se fréquentent qu’en 2015.

"J’étais en couple avec Narumi pendant 19 mois et 16 jours, du samedi 21 février 2015 au 6 octobre" annonce très précisément Nicolas Zepeda aux policiers chiliens, lors d'une présentation spontanée à son retour au pays, le 30 décembre 2016. "Cette relation était bien au delà d’une relation entre deux jeunes étudiants. Il va l’inviter au Chili, il la présentera à sa famille. Il la présente comme quelqu’un avec laquelle il souhaite faire sa vie" précise Etienne Manteaux.
 


Narumi quitte le Japon le 25 août 2016 pour la France, sans avoir mis un terme à sa relation avec Nicolas Zepeda, pour étudier. Très vite elle rencontre des étudiants à Besançon notamment un jeune homme prénommé Arthur, qui a étudié un an au Japon, également à l’université de Tsukuba, sans pour autant rencontrer Narumi. 

Les messages échangés entre  Narumi Kurosaki et Nicolas Zepeda, ont été longuement analysés. 980 messages ont été échangés entre les deux protagonistes, du 28 août 2016 au 8 octobre. Le premier message de Narumi K. intervient deux jours après son arrivée en France. Elle reproche à Nicolas de lui pourrir ses études à l’étranger.

"C’est très triste de voir tout ce qu’on a construit détruit par des mensonges. Je veux voir ton engagement d’effacer trois mecs de Line et de Facebook" répond alors Nicolas Zepeda.

L'un d'eux, troublant, envoyé par Narumi Kurosaki à Nicolas Zepeda, aborde la question d'une grossesse : "Je n’oublierai jamais que tu m’as mise enceinte". Pourtant, aucun témoignage ni aucune preuve n'atteste de cette thèse. Dans un message envoyé le 5 septembre à Nicolas Zepeda, Narumi Kurosaki annonce : "Je ne supprimerai jamais Arthur."

"Je voulais te marier, je voulais avoir une maison, une famille"
répond Nicolas Zepeda, dont les messages démontrent peu à peu une envie de vengeance. "Elle doit payer un petit coup pour ce qu’elle a fait. Assumer cela" dit-t-il dans une vidéo en date du 7 septembre 2016.
 

 

Les circonstances de la disparition de la jeune femme


Les circonstances de la disparition de la jeune femme ont été longuement étudiées. La jeune japonaise a été vue pour la dernière fois le 4 décembre 2016. Le fameux Arthur, dont parlent les sms entre les deux ex, est alors son petit ami depuis octobre 2016. Cela exaspère terriblement Nicolas Zepeda.

Le jeune homme se rend alors en France, et selon plusieurs témoins, se dissimule plusieurs jours à Besançon avant d'entrer en contact avec Narumi Kurosaki. "Elle voit Nicolas Zepeda vers 16h et est vue à 16h25 à proximité de la résidence puis à Ornans, au restaurant entre 19h et 22h, pour un repas normal sans tension apparente. On sait que la voiture de location de Nicolas Z. est flashée dans la descente de la côte de Larnod après le restaurant" détaille Etienne Manteaux. À 3h20 du matin, des cris sont entendus provenant de l'étage aulequel habite la jeune victime.

"On dirait que quelqu’un est en train de se faire assassiner" envoie une étudiante anglaise qui réside au même étage que Narumi, via un sms transmis à un ami à 3h21 précises. Plusieurs jeunes sortent sur le palier et disent avoir entendu des bruits "étouffés". Malheureusement, personne ne préviendra la police. 
 

Les constatations effectuées dans l’appartement de Narumi Kurosaki


Le 15 décembre, les enquêteurs rentrent dans l’appartement de Narumi. Tout y est bien rangé. "Cela apparaît comme quelque chose d'étrange car Narumi Kurosaki est décrite par ses proches comme un peu désordonnée" précise Etienne Manteaux, procureur de la République de Besançon.

Les enquêteurs retrouvent sur une tasse à café les empreintes digitales de Nicolas Zepeda. Aucune trace de sang, malgré l'utilisation d'un produit réactif qui permet même en cas de lavage de révéler une trace de sang, ne sera dévoilée.
 


La reconstitution de l’emploi du temps de Zepeda


L'emploi du temps de Nicolas Zepeda a pu être décortiqué et reconstitué avec une certaine précision par les enquêteurs. En cause, le GPS présent dans le véhicule de location, loué le 17 novembre depuis le Chili bien avant son arrivée et plusieurs jours avant de revoir Narumi Kurosaki, les transactions effectuées avec sa carte bancaire, les relevés de son téléphone portable mais aussi l'achat de différents billets de transports en commun. 

Le véhicule de location a été rendu très sale, avec "l’impression qu’il a été utilisé pour aller dans les bois" selon Etienne Manteaux. De plus, Nicolas Zepeda a été en contact avec plusieurs individus dont son cousin, résidant à Barcelone, chez qui il a résidé plusieurs jours du 7 au 12 décembre 2016.
 


Ce cousin recevra un premier appel de Nicolas Zepeda le 6 décembre 2016. Il demande alors au suspect des nouvelles de Narumi Kurosaki. Ce à quoi Zepeda répond qu'il n'a pas vu la jeune femme et qu'il est désormais très amoureux d'une autre, une Allemande. Le Chilien demande également à son cousin de taire sa venue en Europe, prétextant des problèmes familiaux, notamment avec son père. "La famille doit s’entraider en ces moments compliqués" va jusqu'à dire Nicolas Zepeda à son cousin, qui y voit là une forme de menace s'il ose coopérer avec les enquêteurs. 

"Elle aimait beaucoup la mer" lâche également Nicolas Zepeda, comme le rapporte son cousin, qui a remarqué le temps employé pour cette formule : l'imparfait.
 

La simulation du maintien en vie de Narumi Kurosaki entre le 5 et le 12 décembre 2016


Le téléphone de Narumi est resté quelques jours actif, tout comme ses profils sur les réseaux sociaux, bien que personne n'atteste l'avoir vue et qu'elle ne se soit pas rendue en cours après sa disparition. Le téléphone de la jeune fille a reçu un sms inquiet d'Arthur, son petit ami, le 5 décembre, lendemain de sa disparition. "Tu me mets trop la pression" reçoit en réponse Arthur, qui ne comprend pas ce revirement de situation. 

La famille de Narumi reçoit également un sms, dans un japonais parfait. Là encore, l'enquête répond par une explication et un fait précis. "Une étudiante japonaise, entendue par la police judiciaire japonaise, qui connaissait Nicolas Zepeda mais qui ne connaissait pas Narumi Kurosaki, a expliqué avoir reçu un message de Nicolas lui demandant de traduire deux phrases en japonais : « J’ai un nouveau petit ami » et « Je pars toute seule »." Le 15 décembre, Nicolas Zepeda demandera avec beaucoup d'insistance à cette jeune japonaise de supprimer les échanges concernant cette demande de traduction.

Les éléments exposés ce jour montrent à quel point Nicolas Zepeda, principal suspect de l'assassinat de Narumi Kurosaki, s'est empêtré dans une série de mensonges, de maladresses au vu de la grosseur du dossier de preuves collectées par l'enquête. Il a laissé, tout au long de son parcours, une série d'éléments accablants.
 

Un procès en 2020, sans certitude


La demande d'extradition du jeune homme doit mettre plusieurs mois à aboutir. Nul ne sait encore si le procès dans le cadre de l'assassinat de Narumi Kurosaki aura lieu ou non en présence du Chilien, qui s'est reclu dans son pays d'origine. 

"Une parenthèse se forme. Je dois attendre la réponse des autorités chiliennes concernant l'extradition. Cela devrait prendre quelques mois. Nous pourrions donc avoir un procès en 2020 mais cela n'est pas certain" a tenu à préciser Etienne Manteaux.


Que peut-il se passer après la demande d'extradition ?


Première option, le Chili y répond favorablement et extrade Nicolas Zepeda Contreras vers la France où il est jugé. Deuxième scénario, le Chili refuse. Ce qui parait probable notamment en raison de l'absence du corps de Narumi Kurosaki et du manque d'accords judiciaires entre la France et le Chili.
 


La demande d'extradition sera examinée par la Cour Suprême du Chili dans un délai de plusieurs mois. En cas de refus, Nicolas Zepeda Contreras, pourrait être jugé en France devant une cour d'assises, peut-être dès 2020, mais par contumace, avec un suspect absent du banc des accusés. Un suspect qui laisserait alors la famille de la jeune étudiante japonaise sans réponses, face à un deuil terrible, sans corps pour se recueillir et avoir une réponse à leurs questions.
 

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