"Elle était lourde, bleue" : un père de famille accusé d'avoir mortellement secoué son bébé aux assises de Besançon

Un jeune père de famille comparaît devant la cour d'assises de Besançon. Il est accusé de violence ayant entrainé la mort sans intention de la donner. Le procès doit durer jusqu'au 29 mai.

Le 8 juin 2018, Ania* avait six semaines. Ce soir-là, elle était seule avec son père, Kevin*. C'est lui, qui a appelé les urgences, avant son hospitalisation. Quelques jours plus tard, le 20 juin, la petite fille est décédée. Les médecins qui l'ont soignée ont détecté des lésions correspondantes au syndrome du bébé secoué. 

Six ans plus tard, Kevin* comparaît ce lundi 27 mai devant la Cour d'assises de Besançon, pour violence ayant entraîné la mort sans intention de la donner sur un mineur de moins de 15 ans. Il avait 20 ans au moment des faits.

Au tribunal, il nie les faits de violence envers Ania. Dans le récit qu’il a donné aux enquêteurs, retracé par les témoins, il indique lui avoir donné le bain, fait faire son rot, puis "l’avoir vu partir", avoir vu ses lèvres devenir bleues. Il lui aurait fait un massage cardiaque jusqu’à l’arrivée des pompiers. 

"Il m'a dit qu'Ania était lourde, bleue"

Devant la cour, Céline, la mère d'Ania, prend également la parole. En décembre 2019, dix-huit mois après les faits, une autre petite fille est née de cette relation. Si une obligation d’éloignement avait été ordonnée par le tribunal, celle-ci n’a pas été respectée par les deux conjoints.

Lors de son témoignage, celle qui est désormais sa femme indique que tous deux se sont "pris le chou" le matin du décès de leur fille. En reprenant ses déclarations, l’avocate générale décrit que son conjoint lui aurait "tiré les cheveux" et lui aurait pris sa carte SIM de téléphone. Le soir, ils "discutent", selon les mots de Céline, avant que celle-ci ne parte chez sa mère. Elle reçoit un appel de la part de son compagnon. "Il m’a dit qu'Ania était lourde, bleue, grise, qu’elle était froide", décrit l’intéressée. Elle explique être revenue et avoir accompagné son enfant à l’hôpital. 

Père à 19 ans

Le tribunal se penchait pour ce premier jour sur le parcours et la psychologie de Kevin. Le président du tribunal indique que celui-ci a déjà connu cinq condamnations, pour des faits liés à la conduite sans permis ou à la détention de stupéfiants, mais pas à de la violence. Kevin se décrit à plusieurs reprises comme quelqu’un dans la "normalité" : "je suis quelqu’un d’assez simple, assez énergique, j’aime bien bouger. Je suis quelqu’un d’assez calme, je peux être énervé pour certaines choses, mais j’ai peu d’accès de colère".

Kevin est devenu père à l’âge de 19 ans. Il a arrêté le lycée en classe de première pour intégrer le monde professionnel. Il indique aujourd'hui travailler et vivre avec sa femme et sa fille. "Je suis heureux, mais avec la perte de ma fille, c’est compliqué d’être épanoui complètement", décrit-il devant le président de la cour d’assises. 

Une ancienne compagne de l’accusé témoigne également durant l’audience. Ils ont été en couple lorsqu’il avait 14 ans, elle en avait 13. Elle explique n’avoir "jamais eu de problème" avec ce dernier. Elle a indiqué durant son audition par les enquêteurs au moins une scène de violence où il lui aurait "tiré les cheveux".  

Kevin reconnaît avoir consommé du cannabis, de ses 14 à ses 22 ans. Il a également été jugé pour acquisition non autorisée d’une arme. Il reconnaît ces derniers faits. Au cours de l’enquête, le président du tribunal souligne qu’il a indiqué s’en être débarrassé à la vue des fonctionnaires, et l’avoir acheté  "peu de temps avant dans le but de mettre fin à ses jours". 

"On ne comprend pas ce qu'il s'est passé"

"Il est dans une grande tristesse, et moi aussi, de vivre sans Ania. On ne comprend pas ce qu’il s’est passé, affirme la mère de Kevin devant le tribunal. Ce n’est pas parce qu’il a fait des bêtises qu’il a tué sa fille par énervement ou quoi". Le tribunal lui demande si les expertises médicales pourraient faire évoluer son point de vue. "La science, c’est bien, les avis, c’est bien, mais des fois, il peut y avoir des erreurs".

Céline défend également l’innocence de son époux : "J’ai vu un papa qui avait peur de perdre son enfant. J’ai déjà été avec quelqu’un qui avait été violent avec son enfant, et je n’ai pas ressenti ça", réagit-elle. "Je suis reconnaissante qu’il ait pu faire un massage cardiaque". Elle éclate en sanglot à l’évocation de sa situation actuelle : mère d’un garçon d’une précédente union, Céline ne vit pas avec son fils. 

Si ce mardi doit être consacré aux expertises médicales, le dernier jour sera quant à lui dédié aux plaidoiries. La peine maximale encourue est de 30 ans de réclusion criminelle. 

 

∗Tous les prénoms ont été modifiés

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