Une lutte à mort contre le capitalisme s'empare de la capitale du Doubs et influence la pensée révolutionnaire lors de la révolution industrielle. La série Besançon la Romanesque se concentre sur les figures de cette révolte, Fourier, Considerant, et Proudhon.
Les polémiques qui auront entouré les commémorations du cent cinquantième anniversaire de la Commune de Paris révèlent à qui en douterait que la mémoire de cette aventure révolutionnaire en plein XIXᵉ siècle demeure problématique pour une partie de l'opinion française.
En tout cas, l'échec de cette expérience met un terme à près d'un siècle de bouleversements sociaux et politiques initiés en 1789. Mais si les révolutionnaires de toutes obédiences expriment alors leur déception, certains refusent de s'avouer vaincus : Paris a cédé, et si la Province relevait le drapeau rouge ?
C'est dans cet état d'esprit que les agents de la sédition, pour la plupart réfugiés en Suisse, s'activent. Après Lyon, Grenoble ou Bordeaux, les théoriciens du grand soir ont une cible dans leur viseur, une ville dont la sociologie alors en pleine mutation semble offrir de parfaits supplétifs à la Révolution en marche : et cette ville, c'est Besançon.
Ainsi, pour le grand théoricien anarchiste Bakounine, l'été 1871 sera décisif : si Besançon se soulève, son petit peuple d'horlogers donnera l'exemple aux masses laborieuses de toute l'Europe, et alors, peut-être, la réaction en chaîne se révélera inéluctable. Las, l'ordre s'impose rapidement aux rêveurs des lendemains qui chantent, et le projet est abandonné alors que Paris est violemment mise au pas par les troupes régulières aux ordres d'Adolphe Thiers.
Besançon la rouge ? Un projet pas si absurde au regard d'une longue histoire dont le maître mot aura toujours été, au cours des millénaires, un combat sans relâche pour la liberté et l'égalité. La capitale du Doubs se distingue par son identité à la fois farouche et généreuse. Elle le prouve par ses luttes médiévales pour la garantie des droits de la Ville libre d'Empire, l'engagement de toute une génération pour la survie des usines LIP, des diatribes de Charles Fourier à l'expérimentation du Minimum Social Garanti, le futur R.S.A., dès 1973.
Et si on doit à Proudhon, figure tutélaire des luttes bisontines pour un monde meilleur, d'insupportables pages grevées d'antisémitisme et de misogynie, l'espoir d'une société progressiste ne semble pas avoir totalement déserté les travées des assemblées de Besançon. Parmi une partie de ses élites politiques et académiques, et même à l'échelle de certains de ses quartiers, perdure le souvenir vivace d'un socialisme révolutionnaire qui refuse d'abdiquer devant le libéralisme triomphant.
Un échec d'autant moins acceptable à certains qu'il double l'exploitation de l'homme par l'homme d'un effrayant processus de destruction des ressources naturelles. Et c'est peut-être cela, l'héritage de la belle et rebelle cité comtoise telle qu'elle apparaît au sein de Besançon la Romanesque.Son refus de baisser les bras et l'urgence d'inventer demain à l'heure où la cause de l'environnement et celle de l'humain n'ont jamais été aussi tragiquement liés.
Pour aller plus loin
► Le projet de Commune de Besançon.
► Le Minimum Social Garanti, ancêtre du R.S.A : quand Robert Schwint, maire socialiste de l'époque, se défend du reproche déjà évoqué d'encouragement de l'assistanat.
Texte d’Alexandre Perret-Gentil (Dans la Boucle productions)
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