La mobylette n'est pas qu'un moyen de transport : elle ravive les souvenirs de jeunesse et de liberté de tous ceux qui ont eu leur première mob à l'adolescence. Entre nostalgie et nouveaux adeptes, elle fait son grand retour avec des modèles vintages mais aussi électriques.
La mobylette évoque des souvenirs et des sensations de liberté à ceux qui la connaissent. Mais comment est-elle devenue aussi emblématique en France ? Réponse dans le documentaire "Ça roule pour la mob" de Nicolas Bideau.
La mobylette dans le rétroviseur
À la fin des années 40, la France est en pleine reconstruction et l’économie doit être relancée en urgence. Pour remettre la population au travail, il faut permettre aux français de se déplacer. Plus facile à dire qu'à faire, car les matériaux manquent pour construire des véhicules. C'est alors qu'une alternative se présente : le cyclomoteur. Avec son prix abordable, il amène un progrès social qui révolutionne la liberté de mouvement au travers de Peugeot, MBK (précédemment Motobécane-Motoconfort) et Solex.
À chaque période son modèle phare. C’est Motobécane qui va propulser le cyclomoteur au firmament de la culture tricolore en 1949 avec sa mobylette, contraction des mots "mobilité" et "bicyclette". Le succès est au rendez-vous et le nom du modèle devient usuel pour désigner les deux roues motorisés. La V88, la mob bleue pour les intimes, est le modèle emblématique et le plus vendu au monde de Motobécane. Grace a elle l’objectif initial est atteint, les français ont retrouvé du travail et une liberté de mouvements.
On ne cherche pas à aller vite, on ne cherche pas à aller forcément loin. C’est quelque chose qui est pour une mobilité locale, mais qui va apporter beaucoup de choses dans la vie de tous les jours.
Hervé CharpentierConservateur du musée de l’aventure Peugeot
La mob, un symbole français
L’ouvrier l'utilise pour aller à l’usine, le curé s'en sert pour prêcher la bonne parole, c'est l'outil de travail du facteur pour livrer le courrier et le policier la pilote pour patrouiller. La mobylette est utilisée autant par les travailleurs que les étudiants : c'est le symbole de la liberté à la française. Avoir une mob, c'est le rêve de chaque jeune, car on va plus loin et plus vite qu'à vélo. Solex produit de 1946 à 1974 et la Peugeot 103 devient le cyclo emblématique des années 80. On part en bande pour faire des petits voyages, voir ce qu'il se passe dans les villages voisins tout en essayant d'impressionner les filles. La jeunesse découvre de nouveaux cafés où jouer au babyfoot, au flipper, et écouter de la musique à l'abri du regard des parents.
Les Français et la mobylette, je t'aime moi non plus
Après le babyfoot et les diabolos vient le temps des discothèques. Et pour impressionner, une voiture aide plus qu'une mob. Une fois le permis en poche, les mobylettes sont stockées au fond du garage. Les fabricants arrêtent d’en construire et le scooter lui ravi la préférence des foules. Le constat est sans appel : la mob devient alors ringarde et peuple les déchèteries et les trottoirs. Il semble que le règne de la mobylette touche à sa fin, et l'engouement populaire s'essouffle.
Un éternel recommencement
Aujourd'hui, les souvenirs de cette belle époque ne suffisent plus aux nostalgiques. Les mobylettes ressortent des garages et des granges grâce à un engouement pour le vintage. Ce retour ne concerne pas que les quinquas en recherche d’une madeleine de Proust : la passion s’étend à de nouveaux utilisateurs.
Si on prend un vieux véhicule qui a pas tourné depuis 20, 30 ans, qui a une histoire aussi, c’est passionnant de les remettre en route, c’est génial.
Arnaud DavierFondateur du Brélon de Lyon
Arnaud Davier recycle des engins au travers de sa société, en restaurant également à neuf les mobylettes et les solex qui passent sa porte. C'est la loi de l'offre et de la demande : avec ce regain d'intérêt pour la mob, les prix s'envolent. Il faut compter entre 300 et 600 euros pour un modèle d'occasion. Et sur des modèles précis à restaurer, l'addition peut se montrer encore plus salée et monter jusqu'à 1000 euros.
Une passion qui rassemble
L'intérêt pour la mob est revenu, et les motivations sont multiples. Autour des nostalgiques, on retrouve la jeunesse des années 2000 qui bricole et répare entre amis ce véhicule d'une époque dont ils n'ont aucun souvenir. Ils n'étaient pas nés à l'apogée de la mob, et alors ? L'envie de mettre les mains dans le cambouis s'érige en opposition à l'obsolescence programmée et au tout jetable de la société de consommation. La passion se partage et permet de se rencontrer, lors de rassemblements. Dans le Morvan près de 25 000 festivaliers se retrouvent au Rockabylette à Luzy dans la Nièvre.
Dès que quelqu’un monte sur une mobylette, on voit tout de suite que les lumières s’allument et on voit une part d’adolescence qui revient dans la personne.
Julien MilleretCréateur du Rockabylette festival
L'âme de ce festival, c'est le rock'n'roll. Pour une édition réussie, on mélange courses de brouettes, lancés de pantoufles, concerts, spectacles, blind-tests, cours de danse swing et bien d'autres activités. Le clou du spectacle, c'est la balade en mob dans une atmosphère bon enfant. Si une pièce lâche, on s'arrête, on la répare et on repart. Les festivaliers profitent le temps d'une parenthèse de l’insouciance et de la joie de vivre, comme on connaissait dans le temps, pour avoir 14 ans à nouveau. Et si la mobylette invitait à préserver son âme d'enfant ?
Ça roule pour la mob, un film de Nicolas Bideau, sur une idée de Renaud Laveissière.
Une coproduction France Télévisions et Nomade Productions.
Diffusion jeudi 6 juin à 23h05 et lundi 10 juin à 9h00 sur France 3 Bourgogne-Franche-Comté.
⇒ Disponible dès à présent sur France.tv.