Comme tous les quatre ans, leur anniversaire tombera le bon jour. Elles ou ils sont nés un 29 février et doivent attendre une année bissextile pour souffler leurs bougies. Une date de naissance qu'il n'est pas toujours facile d'expliquer et d'assumer.
"Ras-le-bol ! lâche Maïté Elien. C'est pas toujours sympa d'être née un 29 février, surtout quand un de vos frères est né le 28 et un autre le 1er mars." Assistante maternelle à Dole (Jura), elle fête ses 40 ans cette année mais ce sera seulement son dixième anniversaire. "L'année dernière, sur le gâteau, il y avait le chiffre 9 et trois bougies pour faire 9 années trois quarts", confie-t-elle à France 3 Franche-Comté.
Mes filles se demandaient pourquoi maman n'avait pas de date de naissance, c'est compliqué d'expliquer aux enfants et même aux adultes. Les gens zappent toujours votre anniversaire et vous le souhaitent deux jours plus tard. Au début, les ordinateurs n'acceptaient pas non plus la date du 29 février.
Maïté Elien, née le 29 fevrier 1984.
Club très privé
Selon les données de l'INSEE et sans que ce soit vraiment une surprise, la date d’anniversaire la plus rare en France est bel et bien le 29 février. On a recensé seulement 27 832 naissances depuis 1968. Mais la moyenne est presque "normale" avec 2 107 naissances par jour.
Cela reste tout même un club assez privé auquel appartiennent même quelques célébrités : Pedro Sanchez, le chef du gouvernement espagnol, Michèle Morgan ou Gérard Darmon, les stars du cinéma français, le chanteur algérien Khaled, le peintre français Balthus, ou encore Gioacchino Rossini, le compositeur italien, connu notamment pour son célèbre opéra Le Barbier de Séville.
Une date de naissance assez exceptionnelle qui peut permettre de se distinguer des autres. "Moi, j'adore !", s'exclame Bérangère Courgey, bientôt 24 ans. Barmaid pour la saison à Courchevel, elle est originaire de Surmont (Doubs) et elle ne regrette pas du tout sa date de naissance.
Ce qui est drôle, c'est que je reste dans la tête des gens. Tout le monde se souvient de ma date d'anniversaire. Plein de gens me plaignent mais en fait, je trouve ça plutôt pas mal et en plus, on me souhaite mon anniversaire deux jours de suite, le 28 février et le 1er mars.
Bérangère Courgey, née le 29 février 2000.
Elle connaît aussi par cœur l'explication de ce jour mystérieux. "C'est le premier truc que j'ai appris dans ma vie, reconnaît Bérangère. Ma tante aussi est née un 29 février". Presque une histoire de famille, en fait.
"L'impression d'être unique"
"J’adore ma date de naissance, je trouve cela hyper original, confirme Elise Maréchal. Il y a 20 ans, elle a été le seul bébé à naître ce jour-là à la maternité du CHU de Besançon. Sa mère y exerce d'ailleurs en tant que sage-femme. "Mon papa lui a dit : 'attention; il y a un 29 février cette année, essaie d'éviter ce jour', sourit Elise. Donc elle était un peu stressée." L'étudiante en deuxième année de médecine, qui révise en ce moment pour ses partiels, attend donc son anniversaire avec impatience.
Je n’ai jamais eu de problème à cause de ma date de naissance. Les gens sont très souvent surpris et ils disent : punaise, je connais enfin quelqu'un né le 29 février ! Ils me demandent toujours quel âge ça me fait ? J’ai l’impression d’être "unique".
Elise Maréchal, née le 29 février 2004.
La situation peut parfois prêter à de savoureuses anecdotes. Jean est né un 29 février il y a 72 ans déjà. Lui qui aime la discrétion n'en a jamais fait un titre de gloire. Le retraité qui vit aujourd'hui à Echavanne (Haute-Saône) se souvient néanmoins avec amusement de son service militaire en Guyane.
Le jour de mon incorporation à l'armée, il y avait ce vieil adjudant-chef en fin de carrière qui m'a demandé mon matricule et ma date de naissance. Je lui ai donnée et il m'a répondu : "je crois que tu te fous de ma g...!'" Ca commençait mal !
Jean G., né le 29 février 1952.
À peine ose-t-il en plaisanter avec son petit-fils qui, comme lui, aura droit à 18 bougies sur son gâteau d'anniversaire cette année. Pour Anita Poncato, cette mère de famille de Champagney (Haute-Saône), il n'y a vraiment pas de quoi en faire tout un roman. "Ma poisse a commencé dès ma naissance", ironise-t-elle, tout en reconnaissant dans la foulée que cela n'a rien changé pour elle. Sauf peut-être "un plus gros cadeau" tous les 4 ans.
Un quart de jour en plus
D'où vient ce jour pas comme les autres ? L'explication est d'abord scientifique. Notre année calendaire est basée sur la rotation de la Terre autour du Soleil. Or, notre planète met exactement 365,242 jours pour faire le tour de son étoile, soit 365 jours, 5 heures et 48 minutes environ. Comme cette révolution ne correspond pas à un nombre exact de jours dans notre calendrier, elle est arrondie à 365 jours. Mais, chaque année, il y a par conséquent un quart de jour en plus. Pour rattraper ce décalage, une journée est ajoutée au calendrier tous les quatre ans (à quelques rares exceptions près) : le fameux 29 février.
Sans ce rééquilibrage, en effet, les saisons finiraient par se décaler lentement mais sûrement. Et dans quelques centaines années, le mois de juillet (qui pour nous est un mois d’été) se retrouverait en plein hiver, comme l’explique la Nasa.
Ce sont les Romains qui ont inventé cette année bissextile pour mettre fin au glissement des jours qui avait atteint un record de 90 jours en -46 avant J-C ! Il faut dire qu'à l'époque, l'année romaine ne comportait que 355 jours. Sous Jules César, il a donc été décidé de créer un deuxième 23 février (qui tombait à la fin de l'année pour eux) : en latin, on disait ante diem bis sextum Kalendas Martias, c'est-à-dire "sixième jour bis avant les calendes de mars". On a fini par dire "sixième jour bis" (en latin bis sextus). Ce n'est qu'en 1582, à l'initiative du Pape Grégoire XIII, que l'année est passée à 365 jours et que le jour supplémentaire des années bissextiles a été déplacé du 23 au 29 février. C'est le calendrier grégorien que nous connaissons aujourd'hui.