Sans assistance, avec pour seul compère son vélo, le Doubiste Bertrand Baverel a bouclé les 1 000 kilomètres du BikingMan X dans les montagnes marocaines en 89 heures et 28 minutes. Le cycliste de l'extrême a atteint son objectif en finissant la course ce jeudi 2 novembre au soir.
Il y est arrivé. De ses propres mots, "dans un sale état". Mais il y est arrivé. À 51 ans, Bertrand Baverel, originaire de Pirey (Doubs), a terminé ce jeudi 2 novembre 2023 le BikingMan X, cette course à vélo en totale autonomie dans les montagnes de l'Atlas, au Maroc.
Pendant 89 heures, Bertrand Baverel a enchaîné les secteurs de bitumes et de sentiers, à l'est de Marrakech. Trois journées et demie à rouler sur un vélo bien chargé, lourd de 15 kilos de vêtements, de nourriture, de matériel pour dormir ou encore de recharges de téléphone et d'éclairage. "Ce vélo, c'est un gravel (à mi-chemin entre le vélo de route et le VTT, NDLR) qu'on m'a prêté ! Celui que j'ai commandé n'est pas arrivé à temps", sourit le Franc-Comtois.
Pas de quoi inquiéter ce père de famille. Encore moins le fait de ne connaître qu'au dernier moment la route exacte à prendre. "Le parcours a été révélé la veille du départ. C'était assez technique et surtout très éprouvant sur la fin. Les douleurs sont arrivées au fur et à mesure que la course avançait."
Voir cette publication sur Instagram
Avec comme point d'orgue de la souffrance lors de la dernière journée. Un départ dès 5h30 du matin pour une arrivée à 23h30. De quoi accomplir l'objectif que Bertrand Baverel s'était fixé, mais au prix d'une tendinite au talon d'Achille droit. "À force d'être assis tout le temps, j'avais aussi mal aux fesses. Donc, je me mettais en danseuse très souvent. Mais ça me tirait sur mon talon d'Achille aussi. Il n'y avait aucune position où je ne souffrais pas. J'ai fait 240 bornes comme ça. Dès qu'il y avait une bosse, je moulinais pour ne pas tirer sur le tendon."
Pour tenir et ne pas abdiquer, il a fallu serrer les dents et se répéter cette phrase en boucle : "La souffrance est temporaire, l'abandon définitif." Notre champion n'a jamais envisagé de ne pas finir la course. Oui, le corps a souffert, mais le Franc-Comtois a eu la chance de ne pas connaître de pépin mécanique, chose qu'il craignait avant de prendre le départ. Le champion Laurent Jalabert, qui participait lui aussi à la course, n'a pas connu le même sort.
Bertrand Baverel a fait le choix de beaucoup rouler et de peu dormir. Des nuits de trois à quatre heures, tout au plus. "Je me donnais comme objectif d'atteindre un checkpoint par jour", explique l'ultracycliste. De quoi profiter au maximum des paysages du désert marocain et des montagnes de l'Atlas. Car il ne faut pas oublier que la course présente plus de 16.000 mètres de dénivelé positif.
"On est allé dans des zones vraiment reculées, dont certaines qui ont été touchées par le séisme de septembre. J'ai vu des maisons en mauvais état, des roches sur la route, des tentes bleues installées pour porter secours aux populations", se souvient le sportif, marqué par ce qu'il a pu voir.
"J'étais halluciné par les conditions dans lesquelles les gens vivent. C'était assez spartiate. Pas d'aménagement, pas de fenêtres, des herses tirées par des ânes dans les champs... L'organisateur m'a dit qu'on roulerait dans des endroits où même pas 1% des Marocains étaient allés tellement ils étaient éloignés."
Le fait d'être à vélo change l'approche de la population. Le contact aurait été très différent si nous étions à moto ou en voiture.
Bertrand Baverel
Voir du monde traverser les villages n'est donc pas dans l'habitude des habitants de l'Atlas. Encore moins quand il s'agit d'une centaine de vélos. "Les enfants couraient derrière nous, c'était adorable. Le fait d'être à vélo change l'approche de la population. Le contact aurait été très différent si nous étions à moto ou en voiture", souligne Bertrand Baverel.
Ce dernier se dit "très content" de son chrono, lui qui a bouclé la course en 89 heures et 28 minutes. "Je finis dans le premier tiers, ça me correspond bien. Mais j'ai vraiment dû pousser mes limites. Ça me permet de me dire qu'il ne faut pas se limiter dans les aventures qu'on veut vivre. Elles sont toujours exceptionnelles et enrichissantes. J'ai pu aussi me rendre compte que j'avais de la chance de vivre dans les conditions dans lesquelles je vis en voyant les habitations ici. Ça va me marquer."
Une aventure sportive et humanitaire
Après une soirée avec le reste des coureurs, Bertrand Baverel va retourner à la vie normale en France, lui qui se reconvertit en conférencier autour du sujet du dépassement de soi et de l'engagement. "Je vois tellement de gens avoir envie de faire des choses et se limiter. J'ai envie de les aider à débloquer ce verrou. L'expérience que je viens de vivre va aider à illustrer ça."
Une expérience qu'il a vécue en lien avec l'association Azimuths, qui porte des projets humanitaires dans l'Atlas. "Je ne voulais pas rouler que pour moi. Quand je vois les villages où je suis allé, j'ai vu à quel point il était important que les enfants aillent à l'école. Ça a pris tout son sens." L'association a d'ailleurs lancé un nouvel appel aux dons après le séisme de septembre 2023.