“On est hameçonné dès le début” : Fario, premier long-métrage de la Jurassienne Lucie Prost a trouvé son public

Une bande-son inspirante, un montage au cordeau, des personnages touchants... Avant sa sortie nationale au cinéma le 23 octobre 2024, Fario, le premier long métrage de la Jurassienne Lucie Prost, fait mouche auprès des spectateurs venus aux projections en Bourgogne-Franche-Comté.

Fario, juste cinq lettres qui claquent. En Franche-Comté, les habitants de la vallée de la Loue et les amis des rivières savent que ce petit mot raconte une grande histoire. Il suffit de le prononcer pour voir les yeux des pêcheurs à la mouche briller. Fario, c’est le nom d’une truite sauvage.

Les truites, un personnage à part entière

Fierté des rivières comtoises, elle se meurt dans des cours d’eau devenus trop chauds et trop pollués. Les truites et leur rivière fétiche, la Loue, sont présentes tout au long du film de Lucie Prost. Elles incarnent ce “merveilleux” qui nous permet de nous relever de nos traumas.  

On est un peu comme cette truite Fario, on est pris, on est hameçonné dès le début, la musique nous prend et on la suit. La réalisatrice tient la ligne tout au long du film, elle nous prend dans les méandres de la rivière. La nature est magnifiée avec ces paysages moussus qu’on adore au bord de la rivière. Bravo !

Gérard Marion, directeur du festival Lumières d’Afrique

Les truites sont “un personnage à part entière” du film, développe la scénariste et réalisatrice Lucie Prost lors de l’une des avant-premières organisées en Bourgogne-Franche-Comté entre le 17 septembre et le 11 octobre. On les voit peu, elles ont un côté mystérieux et même “merveilleux”.  

C’est plus de l’ordre du merveilleux que du fantastique ; C’est comme le prolongement d’une réalité, d’un fantasme. Je ne voulais pas faire un film de genre, un film fantastique. Cela ne m’intéressait pas de tirer ce fil-là, je voulais que cela reste de l’ordre d’une réalité un peu biaisée, un peu transformée.

Lucie Prost, réalisatrice et scénariste de Fario

Entre deux projections, Lucie Prost a fait découvrir à Claire Blin, la distributrice du film, les bords de Loue de son enfance. Pour humer cette ambiance si particulière, nous les avons accompagnées à Cléron (Doubs). Là même où Léo, le héros du film Fario, se baigne dans la rivière.  

La grand-mère de Lucie Prost est originaire d’un village près de la rivière le Lison. “Elle avait une vraie forme de liberté et un rapport aux choses très entier et franc. J’associais ce personnage de la vallée de la Loue à ma grand-mère et à sa personnalité”. Même si aujourd'hui Lucie Prost s'est éloignée du Doubs, elle conserve des attaches fortes avec sa région d'origine.

Je pense que les paysages que l’on arpente et que l’on traverse forgent notre identité. Revenir dans les paysages de l'enfance qu'on arpente et qui nous ont formé, Cela participe à nous reconstruire dans les moments difficiles. Moi, c'est comme ça que je le sens.

Lucie Prost, scénariste et réalisatrice de Fario

Ce jour-là, la Loue était rieuse et fraîche. Une ambiance propice pour évoquer ce qui a inspiré la réalisatrice et scénariste.  

Cela a marqué mon imaginaire d’enfant, je trouvais vraiment magnifique cette vallée de la Loue, cette rivière. Il y a quelque chose pour moi comme un conte, d’un peu mythologique. Dans mon travail, je pars d’un lieu pour trouver après des personnages et ensuite une intrigue. Là, c'est parti de cette vallée de la Loue.

Lucie Prost, scénariste et réalisatrice de Fario

La nature et le deuil, trames du film Fario

L'histoire de Fario, celle qui nous tient de bout en bout, c’est celle de Léo, un jeune ingénieur parti de la vallée de la Loue, près de Besançon, pour vivre et travailler à Berlin en Allemagne. Interprété par Finnegan Oldfield, il revient sur les terres de son enfance pour les vendre. Il les a héritées de son père et veut les céder à une entreprise de métaux rares. Il retrouve sa famille, ses amis et les truites Fario de sa jeunesse. Leur comportement étrange le pousse dans une “enquête hallucinée”.  

Cela m’a surtout parlé du deuil, tout le film est sur le deuil, de son rapport à son père. Cela m’a parlé de la transformation de la perception de tout ce qui l’entoure parce qu’il a un chemin de deuil qu’il n’a pas effectué. Un chemin qui prend du temps et s'énonce par son corps et le rapport à la nature.

Jonas Marmy, comédien

À l’issue de la projection de Fario au cinéma Victor Hugo de Besançon le 18 septembre dernier, la salle a été réellement conquise. Un public certes acquis d’avance. De nombreux figurants, des acteurs choisis dans la région ont découvert le film auquel ils avaient participé. D’autres spectateurs, investis dans le milieu du cinéma, ont salué ce premier film tourné sur pellicule argentique, à l’ancienne. Un choix technique qui renforce la poésie du film. 

À la base, j’ai fait des études de théâtre. Comme on avait peu de pellicule, on faisait peu de prises et moi, j'avais bien l’idée du ici et maintenant. On se concentre tous et on se lance sur deux prises voire trois.

Lucie Prost, scénariste et réalisatrice de Fario

 Le montage et la musique originale signée Pierre Desprats donnent un rythme contemporain à cette fable écologique, cette traversée de vies. 

J’ai l’impression que ce film aborde plein de choses, sur la défense de la nature, sur notre rapport au vivant, sur le deuil, sur la condition des paysans. Il y a tout cela qui est mêlé et il y a de la magie. C'était très agréable à regarder.

Anne-Catherine Cypriani, spectatrice

Des truites lumineuses

Il y a quelque chose de joyeux dans ce film, on en sort léger.  

Les truites ne sont pas malades, elles sont lumineuses, mystérieuses. Elles transmettent cette fémininité, cette lumière dans le sombre.

Lucie Prost, scénariste et réalisatrice de Fario

La pollution des rivières comtoises est en arrière-plan, comme les difficultés du monde agricole. En avant, il y a le son de la vie, de la jeunesse et la force des personnages féminins incarnés par Megan Northam, Florence Loiret Caille. Même Andranic Manet joue un rôle porté par cette lumière féminine.

J’ai conçu les personnages féminins un peu comme ces truites, qui tourneraient autour de lui, qui représenteraient quelque chose d’un peu joyeux et libre. (...) C’est cela qui a guidé l’écriture.

Lucie Prost, scénariste et réalisatrice de Fario

“Bloqué dans son deuil”, Léo s’en sortira. La vallée de son enfance, ses habitants et ses truites l’ont remis en mouvement. On ne vous en dit pas plus !  

FARIO EN CHIFFRES

# 21 jours de tournage dans la région Bourgogne-Franche-Comté

# 10 avant-premières : 

• mardi 17 septembre - Montbéliard / Le Colisée
• mercredi 18 septembre - Besançon / Victor Hugo
• jeudi 19 septembre - Ornans / Eldorado
• vendredi 20 septembre - Lons-le-Saunier / Les 4C
• samedi 21 septembre - Saint-Claude / Maison du peuple
• mardi 24 septembre - Giromagny / Espace La Savoureuse
• Samedi 5 octobre - Semur-en-Auxois / Etoile
• Dimanche 6 octobre - Autun / Arletty
• Jeudi 10 octobre - Sens / Confluences
• Vendredi 11 octobre - Dijon / Eldorado

#23 octobre, sortie nationale en salles

# Un budget de 2.1 millions d'euros avec le soutien de la Région BFC (255 000 euros) et du Bureau d'accueil des tournages en BFC

# Fario, Produit par Folle Allure , société de production implantée à Aluze (71) régulièrement soutenue par la Région pour la production de courts métrages, et coproduit par Yukunkun Productions, société de production implantée en Normandie.