Alors que la poursuite de leurs études en dépend, le délai se rétrécit dangereusement. En ce début juillet 2024, de plus en plus d’étudiants en recherche d’alternance sont dans le désarroi. Les candidatures qu’ils envoient aux entreprises restent, pour la plupart, sans réponse.
“J’ai commencé à postuler en février et depuis, soit je n’ai aucune réponse, soit j’ai des réponses négatives”, témoigne Emma à propos de sa recherche d’alternance. L’étudiante de 18 ans en deuxième année de licence cherche désespérément une entreprise dans le secteur de la communication et du marketing. La jeune femme a envoyé une cinquantaine de candidatures.
L’alternance est un système de formation fondé sur une phase théorique en centre de formation d’apprentis (CFA) et une phase pratique (chez un employeur avec lequel l’apprenti a conclu un contrat). Ces deux périodes s'alternent, un temps pour apprendre à l'école, un temps pour apprendre dans une vraie entreprise.
“J’ai eu un entretien avec l’école la semaine dernière. Ils commencent à nous mettre la pression sauf qu’on ne trouve rien du tout”, confie cette habitante d'Hérimoncourt (Doubs). D’après elle, beaucoup de ses camarades sont dans la même situation. “L’école propose qu’on leur envoie nos CV, mais ils ne nous aident pas plus que ça”, se désole-t-elle avant de poursuivre : “Il y a des offres sur le portail alternance de l’école sauf que la plupart des offres sont pour les masters”.
L’alternance, un atout cher payé
Emma savait que la recherche d’alternance pouvait s’avérer compliquée, mais elle ne s’imaginait pas à ce point. Dans cette épreuve, elle a même mis ses proches à contribution : “J’ai ma famille qui a mis des annonces sur Facebook et LinkedIn, après, on n’a pas forcément de retours”.
Le secteur de la communication est bouché, mais j’ai d’autres amis qui recherchent en ressources humaines et en vente et n’arrivent pas à trouver.
Emma, étudiante en 2ème année de licence info com et marketing
Pour ne rien faciliter, l’entreprise qu'elle cherche doit se situer aux alentours de Montbéliard (Doubs) ou Belfort (Territoire de Belfort) parce que le rythme d’alternance ne permet pas de candidater dans un plus large périmètre géographique. “Lundi mardi, c'est école et le mercredi, jeudi, entreprise donc faire des allers-retours, c'est un peu compliqué”, note-t-elle.
Pour beaucoup, l’alternance représente un véritable atout. Si Emma s’est orientée vers ce cursus, c'était “pour se professionnaliser et avoir un pied dans l’entreprise. C’est un plus sur le CV et il y a aussi le salaire”, souligne l'étudiante. Mais s’engager dans ce type de formation peut s’avérer périlleux, car pour Emma, l’alternance n’est pas une option dans son école : “Si je n’ai pas d’alternance, je me fais virer de l’école”.
Une réponse positive pour 80 demandes
Lisa, 20 ans, est toujours, elle aussi, en recherche d’alternance. Pourtant, l’étudiante en architecture d’intérieur a de la bouteille. Elle a déjà fait deux alternances. “J’ai cherché une alternance pour ma première année et j’ai trouvé au bout de 60, 70 demandes avec une réponse favorable”, raconte-t-elle. Pire encore, pour sa deuxième alternance, elle a reçu une réponse positive sur 80 demandes.
L’habitante de Saint-Maurice-Colombier (Doubs) recherche actuellement une alternance depuis la fin mai. “J’ai fait une bonne quarantaine de demandes. Un quart m’a répondu et je n'ai eu que des non”, précise-t-elle. Pour elle, la recherche d’alternance est un moment assez stressant. “Si je n’ai pas d’alternance, ce sera compliqué pour l’année prochaine, car je suis dans une école privée et si je n’ai pas d’alternance, je dois financer mes propres études, et il y a aussi les coûts de la vie”.
Autre écueil à franchir, les entreprises ne se calent pas toujours sur le rythme des écoles. “Parfois, il y a des offres en cours d’année, mais c’est mieux d’avoir dès septembre”, observe-t-elle. Et son rythme d’école limite le choix des entreprises. Tout comme Emma, le rythme d’alternance de son école se répartit dans la semaine, “c’est moitié-moitié par semaine”.
Malgré tout, son école de design essaye d’aider les étudiants dans la recherche d’une alternance. “L'école organise un job-dating tous les ans, mais l’année dernière ça n’avait pas vraiment de rapport avec l’architecture, donc cette année, je ne me suis pas inscrite”, avoue Lisa.
Les entreprises peuvent également être frileuses dans le recrutement de leurs alternants pour plusieurs raisons : “La première année est galère, car ils doivent tout nous apprendre et après ce qui peut bloquer les employeurs, c’est le salaire. Il doit augmenter en troisième année”.
L'alternant est considéré comme un salarié, il touche entre 27% et 67% du smic selon son âge et son niveau d'études.
2 % de contrats d’apprentissage de plus en 2023 par rapport à 2022
En 2023, 1 020 000 contrats d’apprentissage étaient en cours, selon un rapport de la Dares (Direction de l’Animation de la recherche, des Études et des Statistiques). Mais l’importance de ce chiffre est à relativiser. Si le cap du million d’apprentis a été franchi, seulement 852 000 contrats d’apprentissage ont été signés en 2023. Cela représentait l'an passé une progression de 2 % sur an, contre 14 % en 2022 et 38 % en 2021.
Le développement de l’alternance au cours de ces dernières années s’explique par plusieurs politiques lancées par le président de la République Emmanuel Macron. En novembre 2023, le gouvernement a notamment mis en place la prolongation de l’aide uniquement à l’embauche d’apprentis. Il s’agit d’une aide unique de 6 000 euros versée à tous les employeurs pour leurs recrutements d’un alternant, qui soit mineur ou majeur, qu’il ait moins de 30 ans, et pour sa première année de contrat. Cette aide a pris fin, le 1er mai 2024 pour les contrats de professionnalisation, un des formats de l'alternance.