Professeur accusé d'avoir frappé un élève : tensions autour de la garde à vue de l'enseignant

Après une opération "collège mort", les professeurs du collège Jouffroy d'Abbans, à Sochaux, se mobilisent de nouveau ce 18 décembre devant l'établissement pour soutenir l'enseignant accusé d'avoir frappé un élève. Face à eux, des parents d’élèves dénoncent des réactions disproportionnées.

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Après une opération “collège mort” le 12 décembre, les enseignants du collège Jouffroy d'Abbans de Sochaux se réuniront ce 18 décembre devant l’établissement.

Cette seconde manifestation est toujours pour soutenir leur collègue qui est en arrêt de travail depuis sa sortie de garde à vue, mais aussi pour dénoncer les conditions dans lesquelles la garde à vue s’est passée. 

Pour rappel, un professeur d’EPS est accusé d’avoir asséné plusieurs coups au visage d’un élève. Ce dernier, accompagné de sa mère, est allé déposer plainte contre l’enseignant. Après un échange avec son chef d’établissement, le professeur se rend au commissariat de Montbéliard pour livrer sa version des faits. Celui qui pensait faire une simple déposition, ne se doutait pas qu’il allait alors passer 24 heures en garde à vue. Une situation “sans précédent”, “du jamais vu”, confie Boris Benabid, représentant syndical SNEP-FSU, avant de témoigner son indignation.

Je n'ai pas connaissance d'un professeur mis en garde à vue 24h après les faits supposés, sans qu’une enquête interne n’ait été faite au préalable, ni même avoir recueilli des témoignages qui seraient probants.

Boris Benabid, représentant syndical SNEP-FSU

Mise en place d'un protocole interne

Il dénonce le “manque de clairvoyance” et la “précipitation” du procureur de la République, qui se défend en expliquant que la garde à vue est une procédure habituelle. “On parle d'une accusation de violence avec des coups de poing avec un certificat médical à l'appui. L'objectif était de ne pas laisser les choses traîner et avoir rapidement la version de l'enseignant", justifiait-il la semaine dernière.

Joint en fin d'après-midi, le procureur de la République insiste sur le "besoin de sérénité pour l'action de la justice et de la police" et assure "être attentif aux conséquences de cette affaire". La procédure de garde à vue peut être aussi une "manière de protéger l'enseignant" et que c'est une règle "qui s'applique à tout le monde".

Pourtant, Boris Benabid maintient que “si on avait pris le temps d'entendre les uns et les autres, la plainte aurait pu être retirée. Ils ont bien vu que l'élève n'était pas marqué au visage. Pourtant, un adulte qui frappe six fois un enfant au visage, il est marqué.”

Boris Benabid confie que pour son collègue "le mal est fait" et que la situation est "très difficile à vivre" et ne sait pas quand il pourra reprendre ses fonctions. Les enseignants se disent surtout que cela aurait pu être eux et aujourd'hui, ils ne se sentent pas assez protégés. 

On est parfois face à des élèves compliqués, avec des classes surchargées.

Boris Benabid, représentant syndical SNEP-FSU

"Quand on a des élèves qui dysfonctionnent et viennent amplifier les faits, on met le prof en garde à vue et on met 8 heures à recueillir son témoignage ?" Pour éviter que ce genre de situation ne se reproduise, le syndicat enseignant souhaite une collaboration entre l’éducation nationale et la justice, avec la mise en place d’un protocole en interne, avant une externalisation, si cela s’avère nécessaire.

Pour être davantage entendu sur ce point, les professeurs se mobiliseront également devant le rectorat de Besançon ce jeudi 19 décembre, à 17 heures. 

Réactions disproportionnées

Cependant, face aux actions des enseignants, la FCPE 25, Fédération des conseils de parents d’élèves du Doubs est vent debout. D’abord, les parents d’élèves se montrent “choqués” par l’opération “collège mort”. “C’est une certaine forme de prise d’otage des enfants, pour défendre l’intérêt d’un enseignant, contre l’intérêt d’un enfant, victime présumé”, déclare Jean-François Hennard, membre de la fédération. Il dénonce la “disproportion vengeresse de l’institution qui est scandaleuse” et juge “l’exagération du corps enseignant irresponsable”. Même s’il comprend le soutien apporté au professeur en question.

Mais les parents d’élèves dénoncent, eux, la décision de l’institution de traduire l’élève en conseil de discipline. 

Ce conseil, de notre point de vue, est une mesure disciplinaire qui n'a pas lieu de se tenir, tant que l'affaire en cours.

Jean-François Hennard, Fcpe 25

Depuis les faits, le jeune est mis à l’écart et ainsi n’est plus scolarisé. “Lorsque l’on éloigne un enfant, c’est qu’il représente un danger pour la communauté scolaire. J’aimerais que l’on m’explique en quoi il représente un danger, car je n’en vois pas la nature, il n’a commis aucun geste d’agression”, maintient-il avant de poursuivre : “c'est abracadabrantesque, aberrant, que la réaction de l'institution soit d'exclure l'enfant sous motif d'atteinte à l'intégrité d'un enseignant alors que c’est lui qui est accusé d'avoir atteint l’intégrité du jeune”. 

Selon Jean-François Hennard, l’action “collège mort” et la mise à l’écart de l’élève peuvent être assimilées à une forme de pression exercée sur la victime. “Et tant que la victime est présumée, elle a des droits”.

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