Mis en vente en mai 2021, l’atelier de Gustave Courbet a été acheté par Viviane Bettileni à Ornans (Doubs). C’est sous les toits de cette maison que le peintre réaliste aurait peint "Un enterrement à Ornans" entre 1849 et 1850. La nouvelle propriétaire nous ouvre les portes.
L’annonce était sur Leboncoin : « Immeuble entretenu de 400m² Place Courbet », une grande maison de dix pièces proposée à 320 000 euros à Ornans, dans le Doubs. Au gré des recherches, Viviane Bettileni tombe un peu par hasard sur le site internet. « Je voulais une maison à Ornans pour me rapprocher de ma famille à Pontarlier », lance-t-elle. Un pied-à-terre pour ses vieux jours, une fois partie à la retraite.
Sur les photographies, le logement semble correspondre à ses critères. Elle prend donc un rendez-vous pour le visiter... sans savoir que la bâtisse abrite le premier atelier de Gustave Courbet (1819-1877). Celui dans lequel le peintre comtois aurait fignolé l’une de ses toiles les plus célèbres, Un Enterrement à Ornans (1849-1850).
Un grenier "coup de foudre"
« Je ne suis pas vraiment une fan de Courbet à l’origine », justifie Viviane. Une fois sur la Place Courbet à Ornans, le coup de cœur n’y est pas. « La maison était à côté de la route, et non sur la place. Je m’étais dit 'non' ». Au dernier étage, sous les toits, les murs sont quelque peu décrépis. Un chevalet traîne dans un coin du grenier. Mais la foudre frappe bien vite, au premier regard même, dans cet atelier… « Cela m’a touchée, donc là je me suis dit je vais réfléchir et très vite, j’ai craqué », raconte cette professeure des écoles, un brin émue.
Des hirondelles comme empreintes du peintre
Ce dimanche 17 juillet à Ornans, c’est jour de brocante. Les rues s’emplissent de piétons, des habitués comtois ou des touristes parcourant la vallée de la Loue. Viviane Bettileni saisit cette occasion pour accueillir les premiers visiteurs dans l'atelier, et placarde des affiches à la mairie et dans la ville.
Je me suis dit assez rapidement que je n’allais pas garder ça pour moi toute seule. Ça n’avait pas d’intérêt, il fallait que les gens le voient […]. Pour les gens d’Ornans, c’est encore plus émouvant, parce qu’ils savent que peut-être leur arrière-arrière-arrière-grands parents sont venus là.
Viviane BettiliniPropriétaire de la maison
L’atelier est inscrit au monument historique. Sur les murs, et sur le plafond, on peut voir ici et là des hirondelles, peintes par l’artiste. Un couple observe le grenier attentivement. Le nez en l’air, Philippe commence : « On s’est dit : est-ce que c’est lui ou est-ce que ce n’est pas quelqu’un qui s’est amusé après ? Et bien non ! C’est encore ce qui reste de Courbet. Ça fait plaisir. »
Sur les pas des modèles de Courbet
Parmi les premiers visiteurs, il y a aussi Loïc Laporte. L’administrateur de l’Institut Courbet n’avait jamais visité cet atelier sous les toits, dont il a pourtant entendu parler « dans beaucoup de livres, d’articles ». Gagné par une certaine agitation, il explique : « Ce qui est encore plus émouvant, c’est quand on sait que Courbet a peint ‘Un Enterrement à Ornans’ en enroulant sa toile au fur et à mesure, que chacun venait se faire tirer le portrait ici dans cette salle… Ça fait quelque chose de savoir que tout le monde a monté ses escaliers, comme nous venons de le faire, pour se faire portraitiser par Courbet. » 36 habitants d’Ornans ont ainsi pris la pose devant le chevalet de l'artiste. La toile peut aujourd'hui s'observer au Musée d’Orsay.