VIDEO. "Même les escaliers ne me font plus peur", une neuroprothèse pour restaurer la marche chez les personnes atteintes de la maladie de Parkinson mise au point à Lausanne

Des neuroscientifiques et neurochirurgiens de Lausanne en Suisse, de l'Inserm/CNRS et de l’Université de Bordeaux en France, ont conçu et testé une neuroprothèse destinée à corriger les troubles de la marche associés à la maladie de Parkinson. Elle a permis de traiter un premier patient qui peut de nouveau marcher normalement.

Sur la vidéo, on le voit déambuler à l'intérieur et autour du Château de Chillon, ce fleuron du patrimoine suisse, situé à Veytaux, près de Montreux, sur les rives du Léman. Presque un miracle pour Marc Gauthier qui vit avec la maladie de Parkinson depuis 28 ans.

Grâce à la dopamine puis à la stimulation cérébrale profonde dont il a bénéficié en 2004, on a en effet pu traiter ses tremblements et sa rigidité. Mais récemment, ce Bordelais de 62 ans avait développé de graves troubles de la marche, qui résistaient à tous les traitements actuels.

Je n’arrivais pratiquement plus à marcher sans des chutes fréquentes, plusieurs fois par jour. Dans certaines situations, comme entrer dans un ascenseur, je piétinais sur place, je faisais du freezing, comme on dit.

Marc Gauthier, 62 ans, atteint de la maladie de Parkinson.

Il est le premier à avoir bénéficié de la neuroprothèse mise au point par des neuroscientifiques et neurochirurgiens de l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) et de l'Université de Lausanne (UNIL). En collaboration avec des chercheurs français de l'Inserm et de l’Université de Bordeaux, ils ont conçu et testé ce système qui stimule électriquement la moelle épinière et qui a permis à Marc de retrouver une marche fluide, sans chute.

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Des neuroscientifiques et neurochirurgiens de Lausanne, de l'Inserm et de l’Université de Bordeaux en France, ont conçu une neuroprothèse destinée à corriger les troubles de la marche associés à la maladie de Parkinson. ©EPFL/CHUV/UNIL

Plusieurs années de recherche

"Il est impressionnant de constater qu’en stimulant électriquement de façon ciblée la moelle épinière, de la même façon que nous l’avons fait chez les patients paraplégiques, on arrive à corriger les troubles de la marche dus à la maladie de Parkinson", souligne dans un communiqué la neurochirurgienne Jocelyne Bloch, professeure au CHUV, à l'UNIL et à l'EPFL.

Ces troubles de la marche invalidants surviennent chez environ neuf personnes sur dix qui présentent un stade avancé de la maladie. Et rien n'y faisait jusque-là. Contrairement aux traitements conventionnels qui ciblent les régions du cerveau directement affectées par la perte des neurones producteurs de dopamine, cette neuroprothèse vise la zone de la moelle épinière responsable de l'activation des muscles des jambes pendant la marche. Une zone qui n’est a priori pas directement affectée par la maladie de Parkinson.

"L’idée de développer une neuroprothèse stimulant électriquement la moelle épinière pour harmoniser la démarche et corriger les troubles locomoteurs de patients parkinsoniens est le fruit de plusieurs années de recherche sur le traitement de la paralysie due aux lésions médullaires", explique Grégoire Courtine, Professeur en Neurosciences à l'EPFL, au CHUV, et à l'UNIL, et codirecteur avec Jocelyne Bloch du centre .NeuroRestore.

Coopération franco-suisse

Dans une étude publiée dans la revue Nature Medicine, les scientifiques détaillent tout le processus et racontent cette incroyable aventure menée en coopération avec le Français Erwan Bezard, neuroscientifique de l'Inserm, affilié au CNRS et à l'Université de Bordeaux, qui a consacré toute sa carrière à la compréhension des maladies neurodégénératives.

Il y a deux ans, l’équipe composée de scientifiques et de médecins a ainsi pu opérer Marc Gauthier à l'hôpital de Lausanne. Après une intervention neurochirurgicale de précision, il a été équipé de la neuroprothèse constituée d’un champ d’électrodes placé contre la région de sa moelle épinière qui contrôle la marche, et d’un générateur d’impulsions électriques implanté sous la peau de son abdomen.

Grâce à une programmation des stimulations qui s’adaptent en temps réel à ses mouvements, Marc a rapidement vu ses troubles s’estomper, indiquent les scientifiques. Après une rééducation de quelques semaines, il a retrouvé une marche presque normale. Aujourd’hui, il utilise sa neuroprothèse environ huit heures par jour. Il ne l’éteint que lorsqu’il est assis pour une longue période ou lorsqu’il dort.

J’allume la stimulation le matin et je l’éteins le soir. Ça me permet de mieux marcher, de me stabiliser. Même les escaliers ne me font plus peur à présent. Tous les dimanches je vais au bord du lac, et je marche environ 6 kilomètres. C’est génial.

Marc Gauthier, 62 ans, atteint de la maladie de Parkinson.

Michael J. Fox à la rescousse

Pour l'instant, ce nouveau concept thérapeutique a démontré son efficacité chez un seul et unique patient mais la neuroprothèse doit être encore optimisée avant de pouvoir envisager un déploiement à grande échelle. Grégoire Courtine et Jocelyne Bloch travaillent désormais à la mise au point d'une version commerciale avec la société helvète ONWARD Medical. "Notre ambition est de généraliser l'accès à cette technologie innovante afin d'améliorer significativement la qualité de vie des patients atteints de la maladie de Parkinson, partout dans le monde", assurent-ils.

Par ailleurs, grâce à un don d'un million de dollars de la Michael J. Fox Foundation for Parkinson’s research, le centre .NeuroRestore va pouvoir lancer des essais cliniques sur six nouveaux patients dès l'année prochaine. Ces essais viseront à valider la technologie développée mais aussi à identifier les profils de patients les plus susceptibles de bénéficier de ces implants.

Créée par l'acteur Michael J. Fox, le héros de la trilogie "Retour vers le futur" au cinéma, qui souffre lui-même de la maladie de Parkinson, cette fondation est le principal donateur privé dans le domaine de la recherche sur cette maladie.

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