Le salon de l'Agriculture s'est ouvert samedi dans un climat d'extrême tension : François Hollande a été hué et insulté par des éleveurs, des heurts ont eu lieu autour du stand du gouvernement qui a été démonté par des manifestants et des éleveurs qui crient leur détresse.
Une heure à peine après son arrivée, François Hollande a été accueilli par des sifflets accompagnés d'insultes et d'appels à la démission, lancés par une haie d'éleveurs en colère en t-shirts noirs. "Il s'en fout complètement de nous", "Bon à rien", "On n'est pas des migrants", "Connard", "Fumier", ces éleveurs n'ont pas mâché leurs mots, exprimant le désespoir d'une profession au bord du gouffre.Cinq manifestants ont été appréhendés
Puis, vers 9h30, des dizaines de manifestants de la FNSEA ont démonté le stand du ministère de l'Agriculture et protesté à grands coups de sifflet, poussant les CRS à intervenir pour les mettre à l'écart. Des participants ont été blessés, l'un d'eux se retrouvant le nez en sang, a constaté une journaliste de l'AFP. Le président n'était pas présent lors de cet incident. Cinq manifestants ont été appréhendés, selon Damien Greffin, président de la FDSEA Ile-de-France, qui a indiqué avoir eu l'assurance qu'ils seraient "libérés sans poursuites".D'après plusieurs participants, les manifestants voulaient entourer de cellophane le stand pour protester contre les normes qui étouffent leur activité et déployer une banderole marquée "Hollande Le film, fossoyeur de l'agriculture". C'est alors que les CRS sont intervenus et que la situation a dégénéré, ont-ils dit. "On peut entendre la colère. La violence, les dégradations matérielles, non", a réagi l'entourage du président, après ces heurts.
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"En défendant l'agriculture je défends toute la nation"
"Les cris de détresse, je les entends", et "si je suis venu au salon ce n'est (...) pas simplement pour faire un tour, (...) c'est pour entendre y compris des cris de douleur, des cris de souffrance", avait déclaré le président après les premiers sifflets et les insultes qui ont ponctué sa visite. "Si je suis là aujourd'hui c'est pour montrer qu il y a une solidarité nationale", et "on va tout faire" pour aider l'agriculture, car "en défendant l'agriculture je défends toute la nation", a-t-il encore déclaré."L'incident est clos", a déclaré de son côté le président de la FNSEA, Xavier Beulin, à propos du démontage du stand. Le chef de l'Etat a par ailleurs mis la pression sur la grande distribution, accusée d'accentuer la crise des éleveurs en extorquant des baisses de tarifs à ses fournisseurs, en affirmant qu'il fallait revoir la Loi de modernisation de l'économie, adoptée en 2008 et accusée de ne pas protéger les producteurs.
Avec l'effondrement généralisé des cours agricoles qui frappe en particulier les éleveurs, plus de 40.000 exploitations sont en situation d'extrême urgence, selon le ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll, qui accompagne le président durant sa visite. M. Le Foll, accablé par des sondages défavorables, et le Premier ministre Manuel Valls n'ont rien ménagé ces derniers jours pour calmer les esprits à l'approche de ce rendez-vous annuel, vitrine d'excellence de la France des terroirs.
Ce n'est pas la première fois que le salon donne lieu à des débordements
En 2001, Lionel Jospin, alors Premier ministre, et son ministre Jean Glavany, avaient été sifflés par des centaines d'éleveurs, inquiets de la crise bovine. Des oeufs avaient été jetés dans leur direction, sans les atteindre.Un autre incident notable avait émaillé l'édition 2008, lors du désormais célèbre épisode du "Casse-toi pauvre con" lancé par le président Nicolas Sarkozy à un visiteur récalcitrant qui refusait de lui serrer la main.
Le contexte sécuritaire et l'état d'urgence ont réduit les festivités cette année, contribuant à l'ambiance de crise: outre les contrôles renforcés aux entrées, les nocturnes et la soirée des professionnels, le jeudi, ont été annulés.
Malgré tout, à l'approche du compte-à-rebours électoral de 2017 et en vue des primaires à droite, plus que jamais le rendez-vous du Salon sera aussi celui des politiques - surtout de l'opposition - qui vont fouler en rangs serrés les allées parmi les près de 700.000 visiteurs attendus jusqu'au 6 mars.