Le tribunal administration de Besançon (Doubs) a condamné l'État français à verser 10 000 euros à une association de défense de l'environnement pour ne pas avoir appliqué un jugement. Il y a deux ans, le tribunal avait demandé au préfet de faire mettre en place des mesures de réparations de la biodiversité à un agriculteur qui avait détruit des prairies où vivaient des oiseaux protégés.
C'est un dossier porté par une association de défense de l'environnement connue pour sa ténacité juridique : on a appris cette semaine que le tribunal administratif de Besançon avait, le 16 juillet dernier, condamné l'État français à verser 10 000 euros à cette association. En effet, la préfecture de Haute-Saône est accusée de ne pas avoir utilisé les moyens à sa disposition pour contraindre un agriculteur à réparer les dégâts qu'il a infligés à la biodiversité, comme le tribunal lui avait demandé en 2022.
Des prairies permanentes détruites
L'affaire remonte à 2012, lorsqu'un jeune agriculteur installé au Nord-est de la Haute-Saône transforme des terrains en champs de céréales. Problème : jusqu'à présent, ces parcelles étaient des prairies permanentes, elles sont situées dans une zone Natura 2000 et abritaient des espèces d'oiseaux protégées. En détournant leur usage, et en les labourant, l'agriculteur a par ailleurs détruit plusieurs centaines de mètres de haies et bosquets.
L'association commission de protection des eaux, du patrimoine, de l'environnement, du sous-sol et des chiroptères de Franche-Comté (CPEPESC), agrées pour la défense de l'environnement, s'est saisie du dossier. Poursuivi au pénal, l'agriculteur a été relaxé. Cependant, la CPEPESC a, en 2019, demandé à la préfecture de Haute-Saône de mettre en demeure l'agriculteur de présenter un dossier prévoyant des mesures pour compenser les effets de ses travaux sur la biodiversité. La préfecture n'avait pas donné suite.
La préfecture condamnée pour son inaction
L'association de défense de l'environnement avait alors déposé un dossier devant le tribunal administratif pour contester la décision implicite de la préfecture de Haute-Saône. C'est alors que, le 20 septembre 2022, le tribunal avait enjoint le préfet "de faire mettre en œuvre par cet exploitant agricole les mesures de réparation prévues par le Code de l’environnement, dans un délai de trois mois et sous astreinte de 50 euros par jour de retard", explique un communiqué du tribunal administratif. .
Selon le tribunal administratif, le préfet de Haute-Saône n'a pas respecté ses obligations : la préfecture a demandé à l'agriculteur de monter un dossier exposant des mesures de réparations possibles, mais lui a accordé de nombreux délais. Lorsque ce dernier a finalement rendu ce dossier en 2023, la préfecture a jugé les propositions insuffisantes, mais ne lui a pas demandé d'en trouver de nouvelles.
La CPEPESC a donc demandé au tribunal administratif la liquidation de l'astreinte de 50 euros par jour de retard. "Ce qui m'intéresse, c'est que les mesures de réparation soient mises en œuvre, il s'agit de rétablir les ressources écologiques dans leur état initial " déclare Christophe Morin, président de la CPEPESC Franche-Comté. L'association ne cache pas qu'elle compte continuer à régulièrement demander la liquidation de cette astreinte, tant que les parcelles ne seront pas retournées à l'état de prairie sous l'impulsion de la préfecture.
Contactée, la préfecture de Haute-Saône a indiqué : "La préfecture prend acte des décisions de justice. Le travail est en cours pour définir les conditions réhabilitation de zones affectées par les travaux, il y a plusieurs années."