Latifa Ibn Ziaten était à Luxeuil les Bains, en Haute-Saône, ce mercredi 6 février pour raconter son histoire et redonner espoir. Une parole forte au moment où le gouvernement se pose la question du retour des djihadistes et de leurs familles partis en Syrie.
Pour beaucoup de Français, elle incarne cette mère courage qui a perdu son fils, Imad, militaire de 30 ans abattu par Mohamed Merah en 2012 à Toulouse. Latifa Ibn Ziaten était à Luxeuil les Bains pour témoigner de cette tragédie, mais surtout pour redonner de l'espoir.
"Ta vie s'est arrêtée là mon fils, mais pas la mienne. Et je ferai tout ce qu'il faut pour qu'il n'y ait pas d'autre victime", témoigne-t-elle. Sept ans après ce drame, Latifa Ibn Ziaten laboure le terrain jusque dans les petites villes. Ouverte aux questions très actuelles, comme le retour en France des djihadistes.
"On ne peut pas leur donner nos enfants, reprend Latifa Ibn Ziaten. Ce sont nos enfants, impossible d'abandonner un enfant français. Il faut d'abord se poser la question : « Pourquoi il est parti ? » Mais oui, il faut le laisser revenir."
Latifa Ibn Ziaten avance sans haine. Une parole forte sur le besoin d'éducation dans les quartiers, la mixité, des garde-fous contre le terrorisme. Et la Franche-Comté est particulièrement concernée par la question de la radicalisation.
Entre avril 2014 et mai 2015, 108 personnes radicalisées ont été recensées par les autorités, ce qui en fait la région avec le plus grand nombre de cas rapportés à sa population totale. Et à Vesoul, il y a cinq ans, de nombreux jeunes radicalisés étaient partis faire le jihad vers la Syrie et l'Irak.
Latifa Ibn Ziaten était d'ailleurs déjà venu à Belfort et Besançon pour sensibiliser des collégiens à ces enjeux. Cette fois, dans la salle de Luxeuil les Bains, des visiteurs de tous horizons. Même des personnes directement concernées : "Je suis venue aujourd'hui parce que j'étais dans les attentats de Strasbourg et je suis en train d'essayer de me reconstruire. Je vous remercie infiniment de parler de ce que vous faites", témoigne une jeune femme en larmes.
"Je n'ai pas peur"
Dans la petite foule qui entoure Latifa Ibn Ziaten à la sortie, une femme attend son tour. Son fils soldat de Daech est mort en se faisant exploser contre une caserne près de Bagdad. Deux mères, deux destins croisés.
"Il y a des choses qui m'ont un petit peu dérangé, surtout quand elle dit que les parents sont responsables de l'éducation, nuance Marie-Agnès Choulet, mère de Pierre Choulet. Mon fils, je pense que je lui ai doné tout ce que je pouvais, tout ce que j'ai eu, mais ceux qui l'ont recruté ont été plus forts que nous."
A chacun de ses déplacements, Latifa Ibn Ziaten est accompagnée de garde du corps. Son discours sur la tolérance et la laïcité ne passe pas partout. Elle assure une soixantaine de rencontres par an et défie quiconque de baisser les bras.
"Je n'ai pas peur. J'avance et je dois tendre la main à cette jeunesse, assure cette mère courage. Et chaque vie que que je sauverai, chaque aide que j'apporterai, ça me permet de voir mon fils grandir et c'est le plus important pour moi."