Dix communes et deux syndicats des eaux de Bourgogne-Franche-Comté font partie des 170 collectivités “points noirs” qui vont être aidées en priorité pour diminuer les fuites d’eau dans leur réseau d’eau potable. La Haute-Saône est le département le plus concerné par cette mesure du Plan eau annoncée par Emmanuel Macron.
“Je viens d’avoir le sous-préfet au téléphone. Il m’a annoncé que ma commune faisait partie des 170 communes aidées. C’est une bonne nouvelle, mais je n’en sais pas plus !” raconte le maire de Froideconche, Eric Petitjean. L’élu de cette commune d’environ 2000 habitants vient tout juste de recevoir de la préfecture de Haute-Saône l’arrêté sécheresse pris le 17 mars dernier. Assurer la ressource en eau est bel et bien devenu une préoccupation majeure.
Voici les communes de Bourgogne-Franche-Comté qui vont bénéficier d'un financement du Plan eau pour les aider à rénover leurs canalisations vieillissantes d'eau potable. Elles sont considérées comme des "points noirs" car "moins d’un litre sur deux d’eau prélevée n’arrive à l’usager" .
Malgré quelques précipitations ces derniers jours, l’état des cours d’eau et des nappes phréatiques en Haute-Saône est d'ores et déjà préoccupant. La période hivernale 2022/2023 particulièrement sèche n’a pas été favorable à la recharge en eau habituelle.
Michel Vilbois, préfet de Haute-Saône
Les prévisions météos ne prévoient pas une amélioration favorable d’ici à l’été.
Consommer moins !
Le Plan eau, présenté ce jeudi 30 mars par le président de la République, rappelle que d’ici 2050, "la baisse anticipée des précipitations est dix fois plus importante que notre consommation d’eau actuelle". Il est urgent d’économiser.
L’important est de prélever moins dans les milieux, les nappes et les rivières. En raison du réchauffement climatique, les nappes ne se rechargent pas assez et le débit des rivières baisse.
François Rollin, Directeur délégation de Besançon de l’Agence de l’eau RMC
Consommer moins, devenir sobre et réparer les fuites ! Le Plan eau vise les communes qui ont les réseaux de distribution d’eau les moins performants.
180 millions d’euros pour 170 collectivités
À Anost, commune de Saône-et-Loire, située dans le Morvan, le rendement est aussi inférieur à 50%. Cela veut dire que lorsqu’un mètre cube est prélevé dans le milieu naturel pour alimenter en eau potable les 547 habitants, la moitié se perd dans la nature.
Toutes les communes font le même constat. Les élus n’ont pas attendu le plan eau pour rénover leurs réseaux. Mais cela coûte cher, très cher.
"Booster les travaux"
Louis Basdevant, le maire d’Anost, l’assure, chaque année, la mairie renouvelle des canalisations. Elle a d’ailleurs dépensé près de 450 000 euros ces quatre dernières années. Un coût assumé par les 547 administrés branchés au réseau long de 24 km et aux subventions.
Des subventions plus importantes, c’est ce qu’attend aujourd’hui l’élu pour booster ces travaux. Car les canalisations datent des années 60. Même si l’eau est captée en forêt, c’est de l’eau de source, il faut la garder au maximum pour d’en manquer pendant l’été. Une situation déjà rencontrée il y a quelques années.
En Haute-Saône, État, département et l’Agence de l’eau RMC se sont associés pour aider les communes à changer leurs canalisations d’eau potable. Entre 2021 et 2023, ces trois financeurs prévoient de dépenser 36 millions d’euros pour ces dossiers. Cela concerne une centaine de collectivités ( communes, intercommunalités, syndicats des eaux).
Nous avons déjà financé beaucoup de projets mais nous n’avons pas pu financer tous les projets. Cela confirme le réel besoin des collectivités. Les moyens du plan eau vont permettre l’accélération des travaux.
François Rollin, Directeur délégation de Besançon de l’Agence de l’eau RMC
Le principal financeur de tous les projets concernant l’eau sont justement les agences de l’eau. Le Plan eau annonce que près de 500 millions d’euros supplémentaires vont être attribués aux agences de l’eau. Pas seulement pour les aides à la rénovation des canalisations. Et mesure utile, “le plafond de dépense des agences de l’eau sera supprimé, ce qui leur permettra de venir co-financer avec les collectivités toutes les actions permettant de s’adapter aux conséquences du changement climatique”.
1 million d’euros pour rénover 1 km de canalisation
À Saint-Sauveur, une commune de 2000 habitants de Haute-Saône, les conduites d’eau en fonte datent d’une centaine d’années. “Elles sont rugueuses à l’intérieur, des impuretés s’accrochent, les tuyaux sont colmatés, observe le maire de Saint-Sauveur. Outre l’environnement, c’est pour une question de santé publique que nous faisons ces travaux ”.
Et cela se voit ! Les premiers travaux ont eu lieu entre 2020 et 2022. Et la 2e tranche est en cours.
Avant les travaux, on prélevait 800 m3 par jour dans la nappe phréatique liée à la rivière le Bruchin. Cette année, seulement 400 m3. C'est énorme !
Jacques Deshayes, maire de Saint-Sauveur
Ces premiers travaux ont permis de changer 2.5 km sur les 15 km de canalisations. Il y a encore 5 km de travaux à financer. Alors que la première tranche a été aidée par l’agence de l’eau RMC, la préfecture et le département de Haute-Saône à hauteur de 70%, la seconde tranche ne l’a été qu’à 40% en raison du retrait de l’Agence de l’eau qui n’a pas pu continuer à financer. “On attend une rallonge” espère Jacques Deshayes. Faire partie des “points noirs” devient désormais un avantage.
Protéger la ressource en eau est bien aussi une question d’argent. Le maire de Froideconche, Eric Petitjean a fait ses comptes. Sa commune est particulièrement étendue : 17 km de canalisations pour 2000 habitants. Quand il renouvelle 1 km de canalisation, il doit trouver 1 million d’euros.
Les familles de Froideconche ont déjà pris conscience de l’importance de faire des économies. En raison de ce réseau étendu, le prix de l’eau est de 4.74 euros le m3, cela aide à faire attention. En 2002, la commune vendait 200 000 m³ par an. Aujourd’hui, seulement 82 000 m³.
Il faudrait que l’on rénove 800 mètres tous les ans mais on n’y arrive pas.
Eric Petitjean, maire de Froideconche.
Dans le Doubs, une seule commune est concernée par ces aides ciblées du plan an. Rosières-sur-Barbèche, 97 habitants. La Barbèche, c’est une rivière. Elle fait partie des 500 km de cours d’eau du bassin versant de l’EPAGE Doubs Dessoubre qui ont connu des débits bien trop bas l’été dernier. 500 Km sur les 600km de ce secteur. “Entre un quart et un tiers du linéaire de la Barbèche était asséché l’été dernier” précise Anthony Guinchard, directeur de l’EPAGE Doubs Dessoubre. CQFD. Économiser l’eau, cela fait partie d’un ensemble, on l’appelle le grand cycle de l’eau.