Après plusieurs mois de difficultés, l'entreprise d'Héricourt (Haute-Saône) a cessé toute activité en novembre 2024. Réunis ce mercredi 29 janvier devant leur ancienne entreprise, les 65 salariés qui ont perdu leur travail accusent le mandataire chargé de la liquidation de laisser traîner les choses.
Réunis devant leur entreprise liquidée en novembre dernier, les anciens salariés de l'entreprise héricourtoise Gaussin désespèrent ce mercredi 29 janvier 2025. Ils accusent le mandataire judiciaire de bloquer leurs indemnités de fin de contrat, ainsi que l’envoi des documents nécessaires pour pouvoir s’inscrire à France Travail (ex-Pôle emploi).
"Pour l'instant, impossible d'avoir notre salaire, se désole Florentin, ancien salarié, au micro de notre journaliste Hugo Flotat-Talon. On s'est tous dépêchés de rendre nos dossiers le 2 janvier pour qu'ils soient traités en urgence, mais c'est le calme plat depuis, malgré nos relances."
Ce matin, une salariée du mandataire judiciaire, chargée de la liquidation de l’ancien spécialiste des véhicules logistiques, entre dans l’entreprise… puis repart, sans même saluer les salariés qui voulaient l’interroger. Elle n'a pas non-plus souhaiter parler à nos journalistes. "C’est un peu sauvage, elle aurait au moins pu dire quelques mots", s'indigne Cyril, ex-salarié de Gaussin.
Dialogue de sourds
Salarié durant 28 ans, Olivier accumule les mails au mandataire depuis des semaines. Il s’agace des réponses incomplètes et moralisatrices. "Monsieur, je fais suite à votre mail donc je goûte peu le ton, lit-il dans sa boîte mail, assurant pourtant avoir toujours employé un ton cordial. Je vous prie de bien vouloir noter que je ne communiquerai désormais plus par e-mail [...] Tout est mis en œuvre pour que le traitement du volet social se déroule dans les meilleures conditions possibles. Vos menaces sont inutiles et déplacées."
Il y a des gens qui ont déjà des promesses d'embauches, mais qui ne peuvent pas encore partir chez leur nouvel employeur vu qu'ils ne sont pas inscrits France Travail.
Gilles, ancien salarié de Gaussin
Il a l'impression que les salariés sont laissés-pour-compte. "On nous a dit que le solde de tout compte n'était pas fait parce que le cabinet comptable n'a pas fini ses calculs, mais quand on prend contact avec celui-ci, on apprend qu'il ne fait pas ce travail parce qu’il n'est pas payé par le liquidateur judiciaire", détaille-t-il, dans l'incompréhension.
Contacté par nos journalistes, le cabinet du mandataire judiciaire indique ne pas avoir d'information à donner, affirmant que "le traitement du dossier suit son cours de manière tout à fait normale."
En cette fin de mois de janvier, faute d’inscription à France Travail, beaucoup de salariés ne devraient pas pouvoir toucher le chômage.
Un suspense qui dure depuis avril 2024
Pour Gaussin, le début de la fin commence en avril 2024. Alors qu'elle vient de passer un contrat avec le géant Amazon, l’entreprise d'Héricourt spécialisée dans la conception de véhicules logistiques électriques et de véhicules à hydrogène est placée en procédure de sauvegarde, après une année 2023 catastrophique : 35,7 millions d’euros de chiffres d’affaires seulement, sur les 100 millions d’euros escomptés.
Puis au mois de juillet, la chute se poursuit, alors que le groupe familial décide de vendre Métalliance, l’une de ses filiales (qui employait 400 personnes sur quatre sites), à un consortium américain. Spécialisé dans les engins tunneliers, il emporte avec lui des pièces détachées et des machines stockées en Bourgogne dans les locaux de Métalliance.
On est toujours très motivés, car on a des investisseurs potentiels. On a fait un conseil d'administration hier, avec toute réserve qu'il faut prendre, pour trouver des financements nouveaux, assez conséquents sur la période, de plusieurs millions d'euros.
Christophe Gaussin, directeur général de Gaussin, en septembre 2024
Les difficultés persistent et les commandent diminuent. En septembre 2024, l’entreprise Gaussin est placée en redressement judiciaire par le tribunal de commerce de Vesoul, afin de geler les dettes de la société. Dans ce cas, l'entreprise doit effectuer une déclaration de cessation des paiements, appelée dépôt de bilan, auprès du tribunal de commerce ou du tribunal judiciaire. Elle a alors six mois pour trouver un repreneur.
Le tribunal rejette finalement les deux offres de reprises de Gaussin. Le 29 novembre 2024, le tribunal place l'entreprise en liquidation judiciaire. Un arrêt définitif après 140 ans d’activité qui sonne pour les 65 salariés, principalement des commerciaux ou des personnes chargées de la recherche et du développement, la perte de leur emploi.