Le procès de Jonathann Daval se déroule à Vesoul du 16 au 20 novembre. Des experts psychiatres et un psychologue sont interrogés. Après avoir fait un malaise la veille, Jonathann doit être à nouveau interrogé ce jeudi, quatrième jour de son procès. Récit tout au long de la journée.
Après une trentaine de minutes à répondre laconiquement aux questions du président Mathieu Husson, Jonathann Daval, accusé du meurtre de son épouse en octobre 2017 a fait un malaise, mercredi 18 novembre. Il a passé la nuit à l'hôpital de Vesoul. "Apte" à reprendre son interrogatoire selon Emmanuel Dupic, avocat général, le jeune homme est invité ce jeudi, quatrième jour de son procès, à répondre aux questions de manière plus précise. Les membres de la famille Fouillot, venus en nombre lors de ce procès, attendent des réponses après avoir jugé les excuses de leur gendre "peu convaincantes".
"Il est resté sur ses positions. On attend ses révélations tant annoncées qu'on ne voit pas venir" a déclaré Me Portejoie, avocat des parties civiles devant le tribunal ce jeudi matin.
Concernant la personnalité du jeune homme, l'expert parle de "quelqu'un de fluet, timide, reservé, tête baissée, qui du mal à le regarder." "Il est au bord des larmes, mais se veut coopérant. Il se soumet à tous les tests à condition qu'on le laisse voir son frère" détaille Tony Arpin.
"Personnalité caméléon. Il s'adapte en fonction des personnes, il va agir comme il pense qu'on veut qu'il agisse" dit l'expert psychologue, qui valide par ces mots les propos tenus à la barre la veille par Stéphanie Gay, la soeur d'Alexia Daval.Très égocentré. Il ne supporte pas que son image soit ternie. Il a mis en place des mécanismes de défense : le déni pendant trois mois. Il a fait comme si ce n'était pas lui. Il a réussi à se persuader que son personnage n'aurait pas pu attenter à la vie de sa femme.
"C'est resté un enfant"
L'expert Tony Arpin poursuit et livre cette analyse au sujet de l'accusé : "C'est un être qui ne supporte pas la rupture." Isabelle Fouillot et sa fille hochent la tête avec force à ce moment-là.Le psychologue détaille et valide au fur et à mesure de son propos les thèses avancées la veille, par la famille d'Alexia. "C'est resté un enfant. Il veut à tout prix plaire et être aimé, cajolé. Acheter une maison, il ne peut pas. Avoir des relations sexuelles suivies, avoir un enfant, il ne peut pas. Je crois qu'il faut le considérer comme un enfant. Il ne peut pas assumer des responsabilités comme un homme normalement constitué peut l'assumer" dit-il, rapportant les paroles que Jonathann a prononcé en sa présence : "Je suis un lâche, je suis resté un enfant dans mon cocon".C'est intéressant, d'ailleurs, qu'il ait perdu connaissance hier soir (ndlr mercredi soir dans son box). C'est son corps qui lui a parlé, qui lui a dit de partir.
Interrogé par Cathy Richard, avocate de la défense, l'expert aborde le concept de "la faille narcissique" : "Si les piliers risquent de se fissurer ou d'éclater alors il peut avoir des réactions agressives".
Me Schwerdorffer, avocat de l'accusé, interroge le premier expert psychologue : "Jonathann Daval appelait Isabelle Fouillot 'maman'. N'est-ce pas singulier ?" Le psychologue répond : "On est dans une confusion, plus de barrière transgénérationnelle. Ça devient un amour incestueux. Entre la mère et le fils, ça devient pathologique."
"Il n'est pas présent à son procès"
Me Schwerdorffer, avocat de Jonathann, sort quelques minutes pour fumer une cigarette devant le tribunal, alors que le deuxième expert psychiatre a pris la parole. L'avoocat bisontin répond à une question de notre journaliste concernant l'attitude de son client : "Pour l'instant, Jonathann Daval n'est pas présent à son procès. Il n'est là que physiquement, pas mentalement. Il n'est pas en connexion avec son procès, ça c'est une évidence."Joffrey Carpentier, psychiatre qui a examiné Jonathann Daval à la suite de son confrère, aborde la "dimension de contrôle, et quelque part de toute puissance" de l'accusé.
Randall Schwerdorffer interroge le psychiatre, qui précise avoir vu l'accusé lors d'un entretien d'une heure, sur la notion de dangerosité de son client, en pointant du doigt le fait que le psychiatre n'est pas criminologue. "Il y a des mots qui font peur, mais il faut bien les définir" conseille l'avocat bisontin. Et d'ajouter : "Est-ce qu'on peut être dans la toute puissance et être un homme ordinaire ?". "Y a t-il un problème avec Jonathann Daval sur le plan psychiatrique ?" questionne-t-il également. "Il n'y a pas de troubles psychiatriques ou d'anomalie mentale, j'ai répondu à la question" dit l'expert.Martine Henry, la mère de Jonathann #Daval et son mari, le beau-père, écoutent les experts psychologues et psychiatres dépeindre la personnalité " caméléon" et la dimension de "toute puissance" de l'accusé dans sa parole https://t.co/pdUeg5Jqux (@ValPSQR pour @F3FrancheComte) pic.twitter.com/N7c36n7Ig5
— France 3 Franche-Comté (@F3FrancheComte) November 19, 2020
L'accusé a tellement changé de versions lors de ces multiples dépositions, que même la parole des experts peut-être remise en cause, suivant le moment où ils ont examiné Jonathann Daval. C'est en tout cas l'argument sur lequel s'appuie solidement la défense.Mais vous le voyez à un moment où il est dans le mensonge. Est-ce que ce n'est pas cohérent qu'il ne soit pas dans l'émotion sur beaucoup de choses ?
"S'il se fait soigner... ça peut évoluer"
L'après-midi reprend avec Jean Canterino, psychiatre, qui a examiné Jonathann le 30 août 2019 à Dijon, au moment où il reconnaissait les faits qui lui sont reprochés. Jonathann Daval a un quotient intellectuel (QI) à 91, donc inférieur à la moyenne relève également l'expert qui précise que cela peut être dû à un manque de confiance en soi. "Il me dit qu’il partait de la maison pour fuir les coups et les blessures. Il avait l’espoir qu’un jour cela s’arrête. 'C’est la première fois que je frappais quelqu’un'" rapporte Jean Canterino, selon les dires de Jonathann Daval.Selon ce dernier expert, il n'y a pas de dangerosité psychiatrique chez Jonathann Daval et "ce qu'il indique de sa vie conjugale n'évoque pas la toute-puissance...". Ce dernier contredit finalement l'avis de son confrère, interrogé juste avant. "Vous venez de dire que Jonathann a des manifestations de personnalité pouvant l’amener à une situation radicale" dit le président. "Oui, c’est ce qu'il s’est passé. S'il se fait soigner... ça peut évoluer" répond le psychiatre.
Jonathann Daval n’est pas un manipulateur "de type psychiatrique", de l'avis de Jean Canterino, dernier psychiatre à l'avoir examiné.L'acte de Jonathann Daval, pour moi c'est comme un barrage qui a cédé et dont l'inondation tue beaucoup de gens. Jonathann, c'est un barrage qui a cédé après avoir tout accumulé.
"Et si on associe un obsessionnel... et une hystérique ?" lache Randal Schwerdorffer. Cette petite phrase prononcée par l'avocat de la défense heurte violemment la famille d'Alexia. L'audience est levée. Isabelle fouillot est assise sur le banc, en pleurs, entourée de deux de ses avocats."Et si on associe un obsessionnel... et une hystérique" ? dit Randal Schwerdorffer.
— Sarah Rebouh (@srebouh) November 19, 2020
- Bruits désapprobateurs de la famille Fouillot -
"Je ne m’exprime que sur Mr Daval Maitre" répond le psychiatre. https://t.co/S6YsYgVjQ6 #Daval
Jonathann Daval prend la parole à 16h. Le déroulé de ses propos est à lire dans cet article.