En prison depuis 27 ans et demi, A. Hakkar obtient une libération conditionnelle avec port de bracelet électronique.
Le 20 mars prochain, l’un des plus anciens détenus de France devrait sortir de la Maison centrale d’Ensisheim dans le Haut-Rhin. Abdelhamid Hakkar, 57 ans, est en prison depuis 1984. Ce Bisontin a été condamné à trois reprises à la perpétuité pour avoir tué un policier et blessé grièvement un autre à Auxerre.
Abdelhamid Hakkar a toujours nié les faits.
Le parcours judiciaire de ce détenu est particulièrement hors norme. Grèves de la faim, isolement, appel des «10 de Clairvaux», Abdelhamid Hakkar a fait le tour des centrales françaises. Au fil des ans, le Bisontin devient fin connaisseur du droit et entame une bataille judiciaire jusqu’aux instances européennes. En 1995, la Cour européenne des droits de l’homme puis le comité des ministres du Conseil de l’Europe condamnent l’Etat français car ils considèrent qu’Abdelhamid Hakkar n’avait pas été jugé en 1989 par la cour d’assises de l’Yonne dans un délai raisonnable et de façon équitable. Un camouflet pour la France.
Cette condamnation va entraîner cinq ans plus tard la révision de la loi française. Lors de la discussion de la loi Guigou, un amendement défendu par Jack Lang va permettre à A.Hakkar d’être rejugé. Le loi du 15 juin 2000 relative à la présomption d’innocence prévoit désormais le réexamen d’une décision pénale définitive et prise en violation de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme suite à un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme. Abdelhamid Hakkar sera donc rejugé et condamné de nouveau à perpétuité (jugement confirmé en appel).
Commence alors un nouveau combat, celui de sa demande de libération conditionnelle. Plusieurs tribunaux la lui refuseront jusqu’au 12 janvier dernier, date à laquelle le tribunal de l’application des peines de Colmar décide de sa libération conditionnelle avec, à titre probatoire, le port du bracelet électronique pendant un an. A sa sortie, le bisontin doit pouvoir travailler dans une entreprise d’insertion bisontine. Il n’y a pas eu appel de cette décision.
Son avocate Maitre Alix Canu-Bernard se dit «très heureuse pour lui. Son enfermement, déclare-t-elle n’avait plus de sens. C’était devenu un mauvais combat pour la justice et on était en train d’en faire une victime». Quatre jours avant sa libération prévue le 20 mars prochain, l’avocate plaidera une dernière fois pour son client. Il est convoqué devant le tribunal correctionnel de Colmar au sujet de sa carte d’identité française. La préfecture lui demande de la restituer alors qu’elle lui a été délivrée normalement. Une situation «Kafkaïenne» qui devrait être l’ultime étape de ce marathon judiciaire.