Ce n'est pas un extraterrestre tombé du ciel mais une cyanobactérie inoffensive. Avec la succession des épisodes pluvieux, le nostoc, c'est son nom, prolifère partout au bord des routes ou dans les jardins. Dans le Jura, ce drôle d'organisme vivant attise la curiosité des internautes.
"C'est bizarre, c'est gluant, c'est vivant mais ce n'est pas méchant du tout", sourit Gilles Poirel de la Société d'Histoire Naturelle du Jura. Et pourtant, cette drôle de chose verte et visqueuse en a surpris plus d'un ces derniers jours en Franche-Comté. Sur les réseaux sociaux, de nombreux Jurassiens partagent notamment leurs photos du "monstre" qui a atterri un peu partout dans leurs cours, leurs pelouses ou leurs potagers. Et dans les commentaires, certains ne cachent pas leur dégoût ou leur inquiétude face à l'intrus, comme dans le groupe Facebook "J'aime mon Jura".
Un mystérieux envahisseur, comme tombé du ciel, qui n'est pas du tout un inconnu. Les anciens le connaissaient bien et l'avaient baptisé "crachat de lune". Les spécialistes, eux, l'appellent nostoc. Ce nom étrange, il le devrait à Paracelse, le célèbre philosophe suisse de la Renaissance, qui l’aurait créé à partir du vieil anglais Nosthryl (nostril) et du mot germanique correspondant Nasenloch (nostoch).
Ni algue, ni champignon, ni lichen
Ni algue, ni champignon, ni lichen, le nostoc pique naturellement la curiosité. "C'est une espèce qui fait partie du grand groupe des cyanobactéries, explique Gilles Poirel à France 3 Franche-Comté. Ce sont des organismes capables de photosynthèse qui parviennent à produire de la matière organique et qui fixent aussi l'azote." Des micro-organismes unicellulaires qui peuvent former de véritables tapis, des nodules ou des boules qui peuvent atteindre plusieurs centimètres dans certaines régions du globe.
Et à y regarder de plus près, au microscope, on découvre des chaînes d'individus sans noyau, comme on peut le voir sur le cliché publié sur sa page Facebook par la Société d'Histoire Naturelle du Jura et des Amis de la Nature.
Le nostoc était là avant l'homme. Et il aurait contribué à produire l'oxygène nécessaire à la vie sur Terre. Il appartient aux espèces pionnières qui peuvent subsister dans des milieux pauvres et basiques.
On peut en trouver dans le désert ou dans les zones polaires. Il peut vivre à l'état déhydraté pendant des mois. Dans les zones arides, il peut y avoir des surfacxes très importantes. Et ils aident à stabiliser le sol.
Gilles Poirel, Société d'Histoire Naturelle du Jura et des Amis de la Nature.
Rien de monstrueux
Pas de quoi donc s'en effrayer. "Ce n'est pas monstrueux et ça n'a rien de parasitaire, rassure Gilles Poirel. Vous pouvez l'enlever à la main si c'est sur une salade. Mais il vaut mieux ne pas en manger car cela peut devenir toxique." Presque une boutade tant le nostoc est peu appétissant !
Le phénomène n'a en tout cas rien d'étonnant avec les fortes précipitations tombées ces dernières semaines. Le nostoc est en effet connu pour sa capacité à se réhydrater très vite, en relançant rapidement son métabolisme, dans les heures qui suivent une pluie ou le contact avec de l'eau liquide.
"C'est vrai qu'on en voit pas mal cette année, reconnaît Gilles Poirel. C'est même la première année que j'en vois autant. J'en ai trouvé il y a quelques jours des grandes quantités au bord de la route. C'est vrai que cela fait drôle de le voir apparaître comme ça d'un seul coup. Mais ce n'est pas une invasion !" Et rassurez-vous, le nostoc se fera de nouveau très discret dès que le soleil reviendra pendant plusieurs jours.