Alexia a 26 ans et devient maman pour la première fois. Avec son conjoint, ils partagent les derniers moments de la grossesse, l'accouchement, mais aussi le post-partum qui survient. "Naître mère", un documentaire de Cécile Khindria et Armelle de Rocquigny sans fard, ni tabou.
Alexia a 26 ans. Avec son conjoint Thibaut, ils décident de répondre à une annonce affichée à Dijon : "cherche future maman pour film documentaire". Cécile Khindia et Armelle de Rocquigny, les réalisatrices, veulent faire un film sur les réalités de la maternité, intitulé "Naître mère". Mais quelle est cette réalité ?
Les attentes de la société
Accueillir un bébé, c'est un bonheur universel, d'une merveilleuse banalité. Qui est parfois le rêve d'une vie. La nouvelle rassemble et c'est tout l'entourage qui attend avec impatience et amour naissant l'arrivée de ce petit être. Voilà pour la version officielle. Mais on peut aussi voir les choses d'une manière plus nuancée.
Le bonheur est présent, mais il est accompagné par des sensations auxquelles les mamans n'étaient pas préparées. Comme un secret bien gardé par la société qui arrive sournoisement après l'arrivée du bébé : douleurs, angoisses, larmes. Il était tellement attendu, il est là ce petit être, et il réclame de l’attention 24 heures sur 24. Mais le post-partum est aussi là.
Est-ce que le bébé a mal, est-ce qu’il a faim ? Est-ce qu'il faut appeler le pédiatre, aller aux urgences ? Est-ce qu'il respire encore quand il fini par s'endormir ? Un tourbillon de questions, dans lequel il est facile de se persuader d'une chose : ne pas avoir de certitude fait de moi une mauvaise mère. Mais elles sont des centaines, des milliers, des millions à l'avoir vécu. Et le cercle vicieux de la culpabilité a de beaux jours devant lui car on ne dit rien, par crainte d'être jugées et prises pour de mauvaises mères. En se demandant comment font les autres. La société évolue doucement, et la parole se libère, avec des films comme "Naître mère".
Bonheur, culpabilité et post partum
Alexia et Thibaut nous ouvrent les portes de leur quotidien, lors des derniers moments de la grossesse. On se faufile dans leur intimité et on partage avec eux ces moments précieux avant l'arrivée de leur petit garçon. La jeune femme de 26 ans ne va pas vivre l'accouchement rêvé. Le terme est passé, et l'accouchement est long et douloureux, et on vit chaque instant avec elle.
La mère et le bébé vont bien. Tu parles, la mère sait même plus comment elle s’appelle.
Alexia, après son accouchement
Le post-partum arrive insidieusement. La jeune maman doit laisser tomber l’allaitement, et la culpabilité commence : "j’aurais dû m’accrocher, tout le monde dit que c’est mieux le lait maternel." Les points de suture tirent, elle pleure vingt fois par jour, est exténuée et personne ne comprend. C'est une femme qui a un caractère bien trempé, et qui met des mots sur sa douleur, fort heureusement. Car chaque femme a le droit de se plaindre, de pleurer, de se montrer épuisée, de s’énerver puis de ne faire qu'un avec ce bébé. De passer des moments suspendus dans le temps, d'une beauté rare, avant de rebasculer dans la détresse.
J’ai l’impression que je gère moins que Thibaut, et du coup c’est frustrant. Parce que tu es la mère, et en fait le père gère plus que toi. C’est vraiment une sensation horrible. J’avais cette sensation d’être nulle, de pas être une bonne mère.
AlexiaMaman pour la première fois
S'entourer et demander de l'aide
Alors Alexia se tourne vers un groupe de soutien. On l'accompagne dans ce groupe de parole, et on découvre les fragments de vie de ces autres femmes qui souffrent aussi. Les témoignages de ces femmes qui sont à bout, et qui se comprennent, se complètent : "je pensais attendre mon enfant, mais c’est un étranger, qui est dépendant, qui pleure tout le temps, que je ne connais pas, et je ne sais pas ce qu’il veut." Des moments de vie qui interpellent et font résonner la compassion face à l'épuisement, quand l'une d'entre elles déclare : " À un moment je me suis dis, je fonce dans un arbre avec ma voiture. Pas pour mourir, mais pour dire, je vais aller à l’hôpital et je vais me reposer."
On pourrait penser que le post-partum n'est plus tabou dans notre société, car on "sait" de quoi il s'agit. Mais est-ce qu'on le comprend si on ne le vit pas ? Pour se rassurer avant une grossesse, on se dit que pour soi, ce sera différent, mieux. Mais l'aveu de faiblesse n'existe pas. Ce bébé peut mettre sa mère hors d’elle, l’épuiser, mettre son couple à l’épreuve, et c'est normal, mais la société doit encore le reconnaitre. Et personne n'a besoin de traverser cette épreuve sans soutien.
Se rapprocher des groupes de paroles et des associations
Il existe des groupes de paroles et des associations. Maman Blues propose des groupes de paroles, dont Alexia a pu bénéficier. L'association a aussi mis en place une carte de référentes, qui sont des membres actives, volontaires et bénévoles. À l'écoute et disponibles pour écouter, soutenir et informer au niveau local sur la difficulté maternelle. Car accepter une main tendue, c'est primordial pour se retrouver.
"Naître mère", un film documentaire réalisé par Cécile Khindria et Armelle de Rocquigny.
Une coproduction France Télévisions, Les beaux docs, ASLC Productions.
À découvrir sur France.tv et sur France 3 Bourgogne-Franche-Comté le jeudi 7 novembre à 22h50.