"Quelle bête peut avaler 100 kilos de viande en une nuit ?" Des tirs de défense autorisés contre le loup après l'attaque d'un troupeau de génisses dans le Jura

Après une attaque mortelle dans la nuit du 9 au 10 août 2024 et pour protéger leur troupeau menacé, le préfet du Jura permet à des éleveurs de bovins de se défendre contre le loup. C'est la troisième autorisation de tir accordée cet été à des exploitants dans le département.

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Le préfet du Jura a autorisé des tirs de défense simple contre le loup. Cette décision fait suite à l'attaque d'un troupeau de génisses dans la nuit du vendredi 9 au samedi 10 août à Lajoux, dans le GAEC de la Valserine.

Benoît et Sébastien Vandelle, les éleveurs, en font le récit sur leur page Facebook. "Un troupeau de jeunes génisses, qui nous avait été confié pour la saison de pâturage, a été attaqué par une meute de loups, les effrayant, les faisant casser deux fois les clôtures au grand galop, expliquent-ils. Se retrouvant bloqué dans un bosquet, l'une d'elles s'appelant Uperle a été dévoré vivante à proximité d'une maison d'habitation."

"Aucun doute"

Les photos publiées montrent la carcasse de la bête, retrouvée morte le lendemain dans la pâture. Même si l'enquête doit encore déterminer s'il s'agit bien du loup, cela ne fait aucun doute pour les propriétaires du GAEC. "Quelle bête dans le Jura peut avaler 100 kilos de viande en une nuit ?" interroge Sebastien Vandelle, joint par France 3 Franche-Comté.

Le lynx chasse seul, le renard a la taille d'un chat, c'est forcément une meute de loups. On a retrouvé sur la génisse les griffures spécifiques du loup. Un loup mord la patte pour couper le tendon à l'arrière et immobiliser sa proie. Puis un autre l'égorge.

Sébastien Vandelle, éleveur à Lajoux (Jura).

L'arrêté précise les conditions, les règles, les circonstances et les personnes autorisées à effectuer ces tirs de défense simple. Il peut être mis en œuvre par des lieutenants de louveterie ou par des agents de l'OFB, de jour comme de nuit. Il n'est permis que dans la seule commune de Prémanon, et sur une seule parcelle, "au vu des nécessités de sécurité". Si un loup est blessé ou bien tué en cas de tir, les éleveurs doivent immédiatement en informer l'OFB, l'Office Français de la Biodiveristé.

"Ce n'est pas une fleur que nous fait le préfet, insiste Sébastien Vandelle, c'est juste l'application de la loi, rien de plus". Ces tirs de défense s'inscrivent dans la logique du plan national d'actions 2024-2029 "Loup et activités d'élevage", rappelle l'éleveur.

Il faut que le loup comprenne qu'il y a un risque à s'attaquer à l'homme ou à ses animaux. Ce n'est pas un filet ou un chien qui va l'effrayer. Il faut qu'il se méfie. Car il n'y a pas que les attaques. Nos troupeaux sont en contact au quotidien avec le loup. On le voit avec nos bêtes, elles sont souvent dérangées dans la nuit, et on les retrouve apeurées le matin.

Sébastien Vandelle, éleveur à Lajoux (Jura).

Deux autorisations de tir en juillet

Ce n'est pas une première cet été. Deux autorisations de tir ont déjà été délivrées en juillet dans le département afin "d'effectuer des tirs de défense simple en vue de la défense de [leur] troupeau contre la prédation du loup (Canis lupus)". La première avait été demandée par une éleveuse d'Argisey qui a perdu trois ovins suite à des attaques les 14 et 15 juillet derniers, pour lesquelles le loup est fortement suspecté. Un ovin a également été tué et un autre blessé le 15 juillet dans la commune limitrophe de Cressia le 15 juillet. L'exploitante a signalé de nombreuses attaques depuis l'an passé dans le secteur : le bilan provisoire fait état de 26 ovins tués en 2024 sur 9 attaques et de 12 ovins tués sur une attaque en 2023.

La seconde autorisation de tir a été accordée à des éleveurs de Véria après une attaque possible du prédateur sur leur cheptel dans la nuit du 30 juin au 1er juillet derniers : malgré la présence d'un chien de protection, deux ovins ont été tués, deux ovins ont dû être euthanasiés et cinq autres ont été blessés. Plusieurs attaques avaient eu lieu il y a trois mois à proximité, le 25 mai à Montagna-le-Reconduit (1 bovin tué), à Graye et Charnay le 13 mai (1 bovin tue) et à Cressia le 13 mai (1 ovin tué).

À lire aussi : Le loup encore dans le viseur en Suisse, nouveau tir autorisé contre deux louveteaux de l'autre côté de la frontière

Le 18 juin dernier, cependant, la justice a annulé des tirs autorisés par le préfet voisin du Doubs. Trois associations de défense du prédateur, Ferus, One Voice et le pôle grand prédateurs, avaient déposé en décembre 2022 deux recours demandant l'annulation de deux arrêtés préfectoraux datant d’octobre 2022 et autorisant des tirs de défense simple contre le loup dans le département, pour écarter toute prédation sur des exploitations agricoles, les GAEC de la Combe des Cives, à Châtelblanc, et le GAEC de la Vie Pont, à Chapelle-d'Huin.

Cinq meutes dans le massif

On dénombre aujourd'hui cinq meutes de loups au total dans tout le massif du Jura : la meute du Risoux, dont la présence a été établie en 2021 avec une reproduction certaine en 2023, la meute de Jougne/Suchet, qui a vu naître des louveteaux l'an passé, et la meute de la Haute Valserine, dont la présence est avérée depuis 2023 en France avec quelques incursions en Suisse en 2023.

Deux meutes ont été repérées en Suisse mais elles n'auraient pas franchi la frontière pour l'instant : la meute du Marchairuz, dont la présence est avérée depuis 2019, mais sans reproduction constatée en 2023 et en 2024 à ce jour, et la meute du Mont-Tendre, formée en 2023 qui a vu la naissance d'au moins trois jeunes loups cette année.

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