Ce mardi 13 avril, plus d'un an après le début de la crise sanitaire, la santé mentale des soignants s'est largement dégradée. Mobilisés et sous tension à chaque nouvelle vague de coronavirus, ils alertent sur leurs conditions de travail. Témoignages en Bourgogne-Franche-Comté.
Un an après le début de cette " guerre sanitaire " et au creux de la troisième vague, les unités covid ne désamplissent pas et l'adaptation reste le maître mot des soignants.
On travaille avec des humains donc on a peur "
Infirmier au bloc opératoire du l'hôpital de Chalon-sur-Saône, Rachid peut en témoigner. Depuis plusieurs mois, il vient en aide à ses collègues en service de réanimation.
" C'est un monde totalement différent pour moi de passer des blocs opératoires à la réanimation, poursuit-il. On n'est pas du tout formés à la réa, donc forcément ça nous fait peur, on a toujours peur de l'erreur, surtout sur de l'humain ".
Le tunnel est long et la fin semble encore trop loin, pourtant Rachid pense déjà à la suite. Elle s'annonce tout aussi chargée. " Cela fait plus d'un an que l'on est sur le front. La fatigue est donc très grande. Puis entre les vagues de covid, on met les bouchées-doubles dans les blocs pour compenser le retard, et ça sera la même chose après la troisième vague. "
" S'il n'y avait pas de revalorisation salariale on ne reviendrait pas "
Pour Swan Meynier, infirmier aux urgences du CHU de Lons-le-Saunier et délégué régional du collectif inter-urgences, les soignants font " avec les moyens du bord ". Il y a quelques jours, les capacités d'accueil pour des patients atteints de covid-19, étaient pleines dans cet hopital.
"Les pics nécessitent des moyens énormes, hors il y a un gros problème au niveau médical. Depuis un an tout le monde est sur le front et travaille à flux tendu", raconte l'infirmier.
Chaque arrêt maladie est difficile à remplacer et les recrutements piétienent. Une nouvelle fois, ce sont les solutions en interne qui prévalent. "Il faut que les équipes déjà en poste reviennent faire des remplacements en plus de leurs horaires habituels. Cela se fait toujours sur la base du volontariat et c'est avantageux financièrement. Je pense que mes collègues comme moi on ne reviendrait pas si il n’y avait pas cette revalorisation salariale" confie le professionnel de santé.
" Certains étudiants ont été dégoûtés par leur stage en réanimation "
Etudiant en cinquième année d'études de santé, Jules partage son temps entre les cours à distance "assis sur sa chaise de bureau toute la journée" et l'enseignement pratique, en stage. Depuis plusieurs semaines, il est dans le service des maladies infectieuses du CHU de Dijon. Au coeur de réacteur "Covid-19".
"Depuis que j'ai commencé mes études, c'est le cinquième ou sixième stage que je fais. C'est une période très particulière donc il est très difficile de s'adapter, on est confrontés à des choses auxquelles on n'est pas forcément préparés. J'ai passé du temps dans le service réanimation et c'était dur. Mais d'autre part quand on veut être soignant,on signe aussi pour ça."
Le jeune homme poursuit ses études et doit encore effectuer de nombreux stages dans les années à venir. Mais cette expérience en période de crise l'a convaincu.
" Ce que je fais en ce moment continue de me conforter dans mon choix, reconnaît le jeune homme. Mais depuis un an, certains ont baissé les bras : "Je connais des étudiants qui ont été déçus et dégoûtés par leur stage mais ça n'est pas mon cas. Puis au vu du temps passé en cours à distance, le stage est une vraie bouffée d’air frais."
50 % des soignants souffrent de symptômes d'anxiété
Mobilisés sur le front de la pandémie depuis plus d'un an, les soignants multiplient les signaux de détresse. Selon une étude datant du mois de novembre 2020, un soignant sur quatre envisagerait de changer de métier.
Pire encore, à l'issue de la première vague, Une étude publiée dans l'American Journal of Respiratory and Critical Care Médicine (AJRCCM), menée en France en avril et mai 2020, révélait qu'un professionnel de santé des services de réanimation sur deux souffrait de symptômes d'anxiété, de dépression et de dissociation péritraumatique.