Le premier ministre, Edouard Philippe, a annoncé, ce mardi 28 avril, les grands axes du retour à l'école qui se profile. En Franche-Comté, les syndicats d'enseignants et les parents d'élèves sont partagés entre incertitudes et désarroi.
C'est désormais officiel. À partir du 11 mai, des écoles maternelles et primaires accueilleront de nouveau des élèves et la rentrée scolaire se fera de façon progressive. "Le retour de nos enfants est un impératif pédagogique et de justice sociale. Nous proposons une réouverture très progressive des maternelles et écoles élémentaires à partir du 11 mai partout sur le territoire et sur la base du volontariat", a indiqué Edouard Philippe, le Premier ministre, à l'Assemblée nationale. Les collèges commenceront à rouvrir en fonction des territoires, à partir du 18 mai. La question des lycées ne sera pas tranchée avant la fin du mois de mai.
Un retour progressif que "comprend" Sandrine Claude, présidente FCPE 90 et coordinatrice académique pour la fédération des conseils de parents d'élèves : "On sait que l’école à distance ne fonctionne pas pour tout le monde, et ce, malgré les efforts des enseignants. Il y a des enfants à qui ça permettra de souffler de retourner en classe. Mais ça ne doit pas être fait sous n'importe quelles conditions." Elle dénonce notamment le critère du "volontariat" : "Quand on persiste à faire un retour à l’école sur la base du volontariat des parents, il y a inégalité sociale et non justice sociale. Ça va creuser le fossé des inégalités."
Gilles Meyer, secrétaire FSU 70, est lui plus catégorique : "Retourner à l'école, c’est prendre un gros risque avant les vacances. Quel intérêt pour une grosse dizaine de jours ? Je n'ai pas envie qu’on soit responsable de milliers de morts. Il y a une historie d’éthique. Ce n'est pas sérieux." Ce directeur d'école à Frahier-et-Chatebier, en Haute-Saône, est en colère : "On renvoie les plus petits à l'école, et les adolescents restent à la maison. Pourquoi ? Tout simplement pour que les parents puissent retourner travailler. L’Éducation nationale, ça devient la garderie nationale", ajoute-t-il.
15 élèves par classe, "une illusion" pour les syndicats
Pas plus de 15 élèves par classe, prévient le Premier ministre. Or, sur le terrain, l’application semble "très compliquée", voire "impossible" pour les professeurs. "C’est impossible de faire respecter les gestes barrières pour 15 élèves. Sur 30 minutes, c’est jouable. Sur une journée, c’est impossible. Ça semble ingérable sur la durée", explique Sandrine Claude, coordinatrice académique FCPE. Un avis que partage Anne Forgerit, secrétaire SNUipp - FSU 90.
Cette enseignante a participé au dispositif de garde pour les enfants de soignants. "Même avec trois enfants, je n'arrivais pas à respecter les gestes barrières", raconte-t-elle. Cette dernière se dit "un peu déçue" par le discours d'Edouard Philippe : "Il n'a rien dit pour nous rassurer. On attendait du concret. Là, il y a trop d'incertitudes, c'est flou. Comment allons-nous trouver les locaux ? Quid de la cantine ? Et le transport scolaire ? Tout reste à construire."C’est une illusion de penser que les gestes barrières sont tenables dans une école.
- Anne Forgerit, secrétaire SNUipp - FSU 90
La question du masque
Le Premier ministre a annoncé que le port de masques était "obligatoire pour les collégiens" et qu'ils seraient fournis à ceux "qui n'auraient pas réussi à s'en procurer". "Tous les enseignants et encadrants des établissements scolaires recevront des masques qu'ils devront porter quand ils ne pourront respecter les règles de distanciation". En revanche, le port du masque "est prohibé en maternelle" et "pas recommandé, compte tenu des risques de mauvais usage, à l'école élémentaire". Cette annonce est plutôt une bonne nouvelle pour Patrick Villequez, secrétaire départemental Unsa 70 : "Ça nous paraît cohérent. Pour les plus petits, c’était une mesure irréalisable."À compter du 18 mai, seulement dans les départements où la circulation du virus est très faible, "nous pourrons envisager d’ouvrir les collèges, en commençant par la sixième et la cinquième", a précisé le Premier ministre. Les enseignants et les parents d'élèves accueillent plutôt positivement le principe de "territorialisation". "Ça permet de s'adapter au plus près de la réalité du terrain. Par ailleurs, ça laisse le temps aux collectivités de s’organiser. Pour le territoire de Belfort et le Doubs, on est quand même dans des quotas hauts. On peut, peut-être, s’attendre à une reprise au collège plus tardive dans ces départements", analyse Patrick Villequez.