Rendu public le 16 novembre, le Livre blanc, document de 330 pages liste de nombreux points d’évolution. Parmi eux, il envisage de redessiner la carte territoriale des forces de sécurité, autrement dit police et gendarmerie.
Police, gendarmerie, qui fait quoi et où aujourd’hui ?
Pour l’instant, la répartition est simple. Dans les villes de plus de 20.000 habitants (avec une délinquance ayant les caractéristiques de celles des zones urbaines,et formant un ensemble urbain), il y a un commissariat de police. Cette dernière y est compétente sur le territoire, les policiers y sont en mission.
Ailleurs, dans les plus petites villes, et en milieu rural, c’est la gendarmerie qui est compétente. On compte ainsi 3.766 gendarmeries en France, contre 822 implantations pour la Police Nationale.
Police, gendarmerie, qui pourrait faire quoi demain ?
Le Livre blanc propose de bouger le curseur pour partager sur le territoire les compétences de la police et de la gendarmerie. Il argumente que les territoires ont changé, et que tout citoyen doit “bénéficier du service de sécurité publique le mieux adaptéaux réalités du territoire sur lequel il se trouve”. Le curseur ne serait plus à 20.000 habitants, mais à 30.000 habitants. “En dessous de 30 000 habitants, le principe serait de confier le territoire à la gendarmerie. Entre 30 et 40 000 habitants, attribution à la force la mieux adaptée aux caractéristiques de ce territoire et au-dessus de 40 000 habitants principe de compétence de la police nationale. Le ministre doit conserver la faculté de s’écarter de ces principes au regard de toute situation particulière” détaille le Livre blanc..
Les 4 commissariats de police de Franche-Comté menacés de disparition
Si l’on applique les recommandations du Livre blanc, quatre villes pourraient perdre leur commissariat de police, au profit des gendarmeries :
- Pontarlier (Doubs), 19.898 habitants
- Lons-Le-Saunier (Jura), 21.728 habitants
- Dole (Jura), 24.778 habitants
- Vesoul (Haute-Saône), 26.382 habitants
Ainsi, le département du Jura n’aurait plus de commissariat de police. Le Livre blanc, n’exclut pas le principe de départements monoforces.
Le ministre de l’Intérieur écarte une fusion de la gendarmerie et de la police
Dans une interview à l’Agence France Presse, le 14 novembre, le ministre de l’Intérieur affirmait : "Il est hors de question de toucher à notre modèle, qui voit agir deux forces complémentaires. Mais il y a une mauvaise répartition entre police et gendarmerie sur le plan national". "Il faut sans tabou aller vers une organisation plus efficace", ajoutait-t-il, en évoquant la notion de "bassin de délinquance comme ceux autour des transports en commun ou des axes autoroutiers".
Le ministre écarte en tous cas une fusion des deux forces qui serait, selon lui, "une funeste erreur".
Un Livre blanc et après ?
La mise en oeuvre du Livre blanc de la sécurité intérieure va demander du temps, compte tenu du calendrier électoral et de la nécessité d'engager des discussions sur des sujets aussi sensibles que la répartition territoriale entre police et gendarmerie.Durant le premier semestre 2021, les discussions vont continuer avec l'objectif de préparer une Loi d'orientation et de programmation de la sécurité intérieure (LOPSI) pour 2022. "L'idée du ministre est que le dossier soit ficelé pour 2022", a expliqué Grégory Joron (Unité SGP Police).
Un contexte déjà bien difficile pour les policiers
La perspective de voir disparaître des commissariats de police (près de 300 emplois sur les commissariats de Pontarlier, Lons, Dole et Vesoul) tombe au plus mal dans un contexte déjà difficile pour les policiers, mis en cause dans plusieurs faits de violences policières.
Dans ce contexte, Alliance Police du Doubs appellaient les policiers à se réunir, lundi 14 décembre 2020 à Besançon devant le commissariat à 17h00, à Montbéliard et Pontarlier, devant les commissariats à 18h00.
Dans le Jura, à Lons-le-Saunier, l’incompréhension des policiers
La perspective d’une fermeture du commissariat de police de Lons-Le-Saunier sème l’inquiètude, même si rien n’est fait. “A Lons-le-Saunier, on est fort de 4000 interventions par an de police secours. Nous sommes contre la fermeture du commissariat, déjà par respect pour le travail fait par les policiers, on s’opposera à cette fermeture. Derrière chaque policier, il y a une famille, c’est un chamboulement pour des centaines de personnes” réagit Laurent Guillaume, délégué syndical - UNSA - Jura. “Je vois mal enlever 60 policiers, 26 administratifs à Lons, qui va les remplacer ? La police municipale, la gendarmerie… Ce qui nous intéresse, nous c’est la sécurité des Lédoniens” ajoute le policier.
Stéphane Karlin, UNSA - Police - Bourgogne-Franche-Comté est lui aussi inquiet. Et en colère. “On a déjà eu suffisament de malaises à subir, ces dernières semaines, ces derniers jour par rapport aux accusations dont la police est victime. Ce livre blanc vient rajouter un malaise, sur un feu qui était déjà très ardent” déplore le syndicaliste.