73 ans après la Seconde Guerre mondiale, deux noms ont été inscrits sur le monument aux morts de Chalon-sur-Saône.
Une plaque, apposée sur une tombe au cimetière de Pagny-La-Ville (Côte-d’Or), a intrigué beaucoup de visiteurs.
Elle porte la mention de deux frères. L’un mort en mer et l’autre, résistant, torturé par les Allemands lors de la Seconde Guerre mondiale. Les frères Rousselin sont inconnus dans le village et ne figurent pas sur le monument aux morts.
En découvrant la plaque, Jean-Yves Monot, habitant de la commune et colonel à la retraite, s'est interrogé.
"Ça m'a intrigué, parce que une plaque sur une tombe, c'est rarissime. Je n'avais jamais vu ça, explique-t-il. Et les noms étaient absents du monument aux morts, anomalie."
Il y a trois ans, il décide de raconter cette histoire à l'ancien maire. Face à ce mystère, Robert Michelin décide de confier l'enquête à Bernard Lallement.
C'est lui qui recense sur les arrondissements de Côte-d'Or tous les soldats morts pour la France. À partir de livrets militaires trouvés sur internet, il remonte le fil de l'histoire.
"J'ai demandé beaucoup plus d'informations au centre national des archives militaires à Vincennes, détaille Bernard Lallement. Cela m'a permis d'approfondir la façon dont ils sont morts."
Les deux frères sont nés à Chalon-sur-Saône. L'ainé, Henri, est entré dans la résistance. Il a été arrêté en 1944, torturé par les Allemands, avant de trouver la mort dans l'un des derniers wagons de déportation pour Dachau.
Le cadet, Michel était officier de marine. Il est mort sur le Lot, un pétrolier, coulé en juin 1943 par un sous-marin allemand. Il a reçu la légion d'honneur à titre posthume pour avoir participé à l'évacuation des marins lors de ce torpillage.
"Un des deux frères était bien noté mort pour la France, l'aîné, le résistant, précise Paul Thebault, conseiller municipal délégué. L'autre était officier de marine mais par contre il n'était pas déclaré mort pour la France."
Cette mention est essentielle pour figurer sur un monument aux morts. Aurait-elle disparu dans les méandres administratifs ? Une recherche est toujours en cours.
En attendant, Alain Mauchamps, marbrier, s'est chargé de graver les patronymes sur le monument. Une opération peu commune. "Je crois que c'est la première fois, confie l'artisan. Les noms en principe ont déjà été gravés. Après c'est des oublis quand on retrouve quelques documents. Donc il y a des gens qui se manifestent, mais c'est assez rare."
Une plaque déposée par la mère des soldats
Un autre mystère a été résolu. La plaque de marbre du cimetière aurait été déposée par la mère des deux soldats. Native de Pagny-la-Ville, elle serait retournée dans sa ville natale après la mort de ces enfants."J'ai toujours interprété la pose de cette plaque comme une bouteille à la mer, raconte Robert Michelin, l'ancien maire de Pagny-la-Ville. 75 ans après, enfin justice et reconnaissance de la Nation va être accordée à ces deux fils morts glorieusement pour la France."
Les frères Rousselin ne sont peut-être pas les seuls. Il y a sûrement d'autres soldats morts pour la France qui attendent une reconnaissance.
En 2016, en France, 311 mentions "mort pour la France" ont été apposés, sur 423 demandes. Bruno Dupuis, directeur du service départemental de l'office national des anciens combattants et victimes de guerre explique les conditions pour que cette mention soit accordée.