Des "mécanismes qui obligeraient" une entreprise "à produire sur le sol européen" si elle veut pénétrer ce marché : c’est ce que propose le secrétaire d'Etat à l'Industrie Christophe Sirugue pour faire face à la concurrence ferroviaire chinoise.
L'industrie ferroviaire française a-t-elle encore des perspectives ?
Christophe Sirugue et le secrétaire d'Etat aux Transports Alain Vidalies réunissent le comité stratégique de la filière ferroviaire lundi 5 décembre 2016. Il y sera notamment question du groupe Alstom (qui possède trois sites en Bourgogne-Franche-Comté)."Il n'y a pas de fatalité, notre industrie ferroviaire a de vraies perspectives si elle sait s'adapter aux enjeux", souligne Christophe Sirugue dans une interview au quotidien économique Les Echos. "Nous sommes confrontés à une concurrence chinoise très pressante. Le groupe CRRC (le géant du rail chinois China Railway Construction Corp.) pèse plus à lui seul que Siemens, Alstom et Bombardier réunis, et il vient de faire l'acquisition de la partie ferroviaire du tchèque Skoda", souligne-t-il. "Nous ne pouvons pas ignorer ce risque", et voir l'industriel chinois se servir de sa nouvelle filiale tchèque comme cheval de Troie pour pénétrer le marché européen.
Face à cela, "de la même manière que l'on a réfléchi sur les actions à entreprendre contre la concurrence déloyale de l'acier chinois, nous devons nous poser la question, à l'échelle européenne, des outils qui pourraient préserver les capacités de production
de nos entreprises ferroviaires", avance Christophe Sirugue.
"Je ne suis pas un adepte de la naïveté"
"Je ne suis pas un adepte du protectionnisme, mais je ne suis pas non plus un adepte de la naïveté. A InnoTrans (le salon mondial du secteur, NDLR), en septembre, j'ai pu constater que les Allemands partageaient les mêmes interrogations", dit le secrétaire d'Etat. "Des mécanismes à l'échelle européenne qui obligeraient, quelle que soit la nationalité de l'entreprise, à fabriquer sur le sol européen pourraient être une forme de réponse intéressante, de la même manière qu'il existe un « Buy American Act » aux Etats-Unis ou des obligations de produire localement en Inde", indique-t-il."Si nous n'ouvrons pas ce débat, nous serons vulnérables", assure Christophe Sirugue.
Quel est l'enjeu pour le groupe Alstom ?
Le groupe Alstom emploie 9 000 salariés en France, répartis sur douze sites, dont un en Saône-et-Loire. L’usine du Creusot est le centre d’expertise et de référence pour les bogies de trains, locomotives, tramways et métros. Le site de Bourgogne emploie plus de 650 personnes. Alstom possède aussi deux sites en Franche-Comté, l’un à Ornans dans le Doubs et l’autre à Belfort, dans le Territoire de Belfort.En septembre, le constructeur Alstom avait invoqué un calendrier de commandes insuffisant dans l'Hexagone. Le groupe avait annoncé l'arrêt prochain de la production de trains dans son usine historique de fabrication du TGV, ainsi que le transfert de l'activité vers le site alsacien de Reichshoffen. Critiqué pour ne pas avoir assez agi contre la désindustrialisation du pays, le gouvernement avait dès lors engagé des discussions tous azimuts pour empêcher la fermeture du site. Début octobre, il avait annoncé plusieurs centaines de millions d'euros de commandes de trains et locomotives pour Alstom.