Le maire du Miroir en Saône-et-Loire a annoncé ce 23 février que la consultation citoyenne lancée dans sa commune il y a à peine deux jours est annulée, car jugée non conforme. Le Conseil constitutionnel exige que le parrainage apporté à un candidat à l’élection présidentielle reflète l’avis du maire.
L’enthousiasme des habitants du Miroir n’aura duré qu’un temps. L’isoloir et l’urne vont être relégués au placard, deux jours seulement après le début de la consultation citoyenne organisée par le maire, Philippe Cauzard. Ce dernier se réjouissait encore hier du succès rencontré par cette proposition inédite avec déjà 52 votants.
Une consultation citoyenne inédite
Les habitants de la commune, qui avaient salué "une bonne initiative" et "une procédure honnête", ont reçu un communiqué surprise du maire ce mercredi 23 février, leur annonçant qu’il était "contraint" d’annuler la consultation. "J’ai été informé par l’autorité administrative que le Conseil constitutionnel ne manquera pas d’invalider le parrainage, au motif qu’une consultation ne refléterait pas l’avis du maire", explique Philippe Cauzard qui ne cache pas son exaspération.
"Ce qui est curieux puisque d’un autre côté, on nous rabâche que cela n’a rien à voir avec l’avis du maire et que cela ne l’engage pas. Mais dans ce système, qui démontre chaque jour son obsolescence et son inadaptation au réel, nous n’en sommes pas à une contradiction près. J’avoue ne pas comprendre cette situation, alors que d’un autre côté le Premier ministre fait un appel solennel aux maires pour qu’ils se mobilisent !"
La légitimité de l’élection présidentielle en jeu
Philippe Cauzard avait souhaité apporter son parrainage à l’un des candidats en manque de signature, pour "soutenir le processus démocratique" et permettre aux Français de participer à une "élection légitime" en avril prochain. Jean-Luc Mélenchon, Eric Zemmour, et Marine Le Pen, n’ont en effet toujours pas obtenu les 500 parrainages nécessaires pour se présenter, alors qu’ils atteignent 15 % dans les sondages.
Cette dernière a d’ailleurs annoncé mardi 22 février, sa décision de suspendre sa campagne en attendant de récolter ses 500 signatures. Il ne reste que dix petits jours pour déposer ces parrainages au Conseil constitutionnel et la panique commence à gagner les candidats, qui font pression sur les maires.
C’est suite à ces nombreuses sollicitations, que Philippe Cauzard a eu l’idée d’une consultation citoyenne. "Ils me téléphonaient et puis ils me retéléphonaient. Ils me disaient, mais est-ce que vous avez réfléchi ? Je leur ai dit, je ne vois pas comment choisir si je ne mets pas mes opinions dans la balance, à moins de faire un tirage au sort. Ce qui me parait un peu ridicule. Donc je me suis tourné vers cette solution ."
C’est complétement fou ce qu’il se passe, il ne faut pas s’étonner que la démocratie aille mal.
Frédéric Bouchet
Une solution qui vient donc d’être retoquée par l’autorité administrative. "La préfecture de Saône-et-Loire m’a contacté pour me dire que ça ne servait à rien et que ce serait de toute façon retoqué par le Conseil constitutionnel". Selon la préfecture, le parrainage doit résulter du maire et ne peut pas être délégué à ses administrés.
Le parrainage : un choix propre du maire
Un tel cas n’est pas prévu dans la loi, mais selon le site du gouvernement viepublique.fr, le parrainage ne doit pas être dû au hasard. Le Conseil constitutionnel considère qu'un élu ne peut ni tirer au sort un candidat, ni mettre son parrainage aux enchères. Pour le Conseil, "le parrainage d'un candidat est un acte personnel et volontaire qui ne peut donner lieu ni à marchandage, ni à rémunération. Comme le tirage au sort, cela est incompatible avec la dignité des opérations concourant à toute élection. Chaque fois que le Conseil constitutionnel a eu connaissance de tels comportements, il a invalidé les parrainages."
Le maire du Miroir a donc décidé de donner son parrainage à l’initiative créée par François Bayrou afin de contourner cet obstacle. Un choix qu’a également fait Frédéric Bouchet, maire LR de Louhans.
Le Conseil constitutionnel a intérêt à accepter ce système, sinon ça va être le carnage dans les bureaux de vote.
Philippe Cauzard
Contacté par Philippe Cauzard, ce dernier a également pris la décision d’annuler la consultation qu’il voulait organiser vendredi auprès de ses conseillers municipaux. "C’est complétement fou ce qu’il se passe, il ne faut pas s’étonner que la démocratie aille mal." affirme Frédéric Bouchet.
Le président du MoDem François Bayrou a revendiqué mardi une réserve de 180 élus prêts à endosser les principaux candidats en difficulté et fera un point avec les volontaires vendredi, pour répartir "librement" ces signatures. "Le Conseil constitutionnel a intérêt à accepter ce système, sinon ça va être le carnage dans les bureaux de vote", prévient Philippe Cauzard.
Reste à savoir comment cette répartition sera appréciée par le Conseil constitutionnel : issue d’un choix ou du hasard…