Les candidats à l'élection présidentielle 2022 peuvent collecter les parrainages depuis le 26 janvier. Les signatures des maires de communes rurales sont très recherchées, comme par exemple dans le département du Doubs.
La chasse aux parrainages est officiellement ouverte depuis le 26 janvier. Les candidats à l'élection présidentielle peuvent recueillir et transmettre la liste des élus qui les parrainent au Conseil Constitutionnel. Ils ont jusqu'au 4 mars prochain à 18 heures pour envoyer leurs 500 signatures. Les 42 000 élus français dont 34 000 maires commencent à recevoir les formulaires de parrainage envoyés par les préfectures.
S'ils remplissent toutes les conditions, les candidats participeront au premier et peut-être au second tour, les 10 et 24 avril prochains. Dans les communes rurales, les signatures de maires sont très recherchées par les entourages des aspirants à l'Élysée. C'est le cas dans le Doubs : les maires que nous avons interrogés ont en grande partie fait leur choix. Ils ont toutefois quelques réserves sur le système des parrainages.
Tous les politiques qu'on a actuellement, sans les critiquer, donnent l'impression qu'ils ont une cuillère dorée dans la bouche. Ils sont avides de la place qu'ils convoitent mais pas d'aider les gens
Claude Hueber, maire d'Onans
Parrainage ou pas de parrainage
Marc Tirole est le maire Sans Étiquette de Dampierre-les-Bois (Doubs). La commune est située à dix kilomètres de Montbéliard et compte 1 700 habitants. C'est la troisième fois qu'il accorde son parrainage depuis sa prise de fonction, en 2008. Il n'est plus encarté où que ce soit, mais admet auparavant "avoir été dans un parti de gauche". Pour lui, la décision est déjà prise : "Je n'ai pas encore reçu les formulaires, mais j'ai pas mal de contacts avec les représentants des différents partis. Aujourd'hui, je vais parrainer un candidat qui n'est pas encore déclaré pour le moment".
Il fait donc le choix de suivre Emmanuel Macron, l'actuel locataire de l'Élysée. L'ancien Ministre de l'Économie n'a pas encore déclaré sa candidature pour un second mandat. Son parrainage, ce maire le fait par conviction : "Je pense que la candidature du Président sortant est la plus réaliste et la plus sérieuse. Quand on regarde le paysage politique maintenant, on a l'impression que le programme de l'ensemble des candidats se résume à « Tous contre Macron ». Il s'agit plus d'opposition que de proposition".
La conviction, c'est ce qui guide aussi Claude Hueber. Le maire Sans Étiquette d'Onans, commune de 370 habitants à l'ouest de Montbéliard (Doubs) va parrainer Jean Lassalle : "Je vais confirmer ma décision, lorsque je vais le recevoir le 11 février prochain dans ma commune. Il connaît le sens du travail, s'implique pour la ruralité et connaît les problèmes liés au système de santé dans ces contrées".
L'élu est en colère : "Tous les politiques qu'on a actuellement, sans les critiquer, donnent l'impression qu'ils ont une cuillère dorée dans la bouche (sic). Si vous leur demandez le prix des produits, lorsque vous faites vos courses, vous verrez qu'ils ne sont pas en capacité de le faire. Ils ont les moyens de ne pas se poser cette question. Ils sont avides de la place qu'ils convoitent mais pas d'aider les gens".
Si ces deux élus locaux ont déjà fait leur choix, tous ne sont pas du même avis. Certains maires ont tout simplement décidé de ne pas donner leur précieuse signature. C'est le cas par exemple de Patrick Genre, maire (sans étiquette) de Pontarlier : "Je n’ai jamais apporté mon parrainage à un candidat. Je tiens à mon indépendance par rapport aux partis, je ne suis pas encarté, et les 4/5èmes de mon équipe n’ont aucune appartenance politique".
Des réserves sur le principe des parrainages
Si ces deux élus locaux ont déjà fait leur choix, ils ont tout de même des critiques sur le système de parrainages. C'est un système peut-être un peu rigide, pour Marc Tirole. D'après le maire de Dampierre-les-Bois (Doubs) : "La procédure actuelle est très encadrée, ce que je peux comprendre. Le Conseil Constitutionnel doit vérifier que la décision des élus ne soit pas fantaisiste".
Claude Hueber soulève quant à lui le fait que ce système est un obstacle à la démocratie. "C'est une barrière cinglante pour les petits candidats. Les grands partis trouveront toujours des signatures et bénéficient en plus d'un temps de parole important dans les médias", se désole-t-il.
Une réforme bienvenue du système actuel des parrainages
Un troisième élu note que dans l'opinion publique, l'idée que le parrainage vaut soutien politique est très forte. C'est ce que pense Jean-Paul Michaud. Il est maire (Mouvement Démocrate) de Thoraise et vice-président de la fédération de ce parti dans le Doubs. Comme en 2017, il a choisi de parrainer Emmanuel Macron.
Il se souvient de cette anecdote : "En 2002, mon prédécesseur avait accordé son parrainage à Bruno Mégret (NDLR : candidat du Mouvement National Républicain, classé à l'extrême-droite). Cela avait entraîné une polémique dans le village et jusqu'au conseil municipal. En 2007, il n'avait donc parrainé personne". Il ajoute que "le parrainage a beau ne pas engager politiquement, mais il y a des conséquences".
L'élu du parti proche de la majorité présidentielle plaide pour une réforme. "Il faudrait que les élus aient la capacité de pouvoir donner deux à trois parrainages. La limitation à un parrainage induit implicitement l'idée que l'on soutient politiquement la personne choisie. En donnant la possibilité de parrainer plusieurs personnes, c'est moins ambigu", expose Jean-Paul Michaud.
En attendant, ces élus doivent composer avec le système actuel. Le président du Conseil Constitutionnel, Laurent Fabius, doit donner la liste des candidats ayant eu les 500 signatures le 7 mars prochain.