PORTRAIT. "Saint-Amour restera toujours dans mon cœur" : le chef doublement étoilé Masafumi Hamano va retourner au Japon

Installé à Saint-Amour-Bellevue depuis 10 ans, le chef japonais Masafumi Hamano a décidé de retourner au Japon à la fin du mois de mai, pour raisons familiales. Un crève-cœur pour cet amoureux de la France et de sa cuisine, qui avait su faire rayonner un petit coin de Saône-et-Loire grâce à son restaurant doublement étoilé "Au 14 février".

Sur le site web de son restaurant, un message noir sur fond gris occupe le haut de la page. Le contenu est on ne peut plus clair : "le restaurant Au 14 février à Saint-Amour -Bellevue fermera définitivement la porte fin mai 2023. Nous avons décidé de mettre fin à cette aventure spéciale". Après 20 ans passés dans l'Hexagone, clap de fin pour l'aventure française de Masafumi Hamano, un des deux chefs doublement étoilés de Saône-et-Loire.

Au moment de résumer le parcours de ce cuisinier d'exception né au Japon mais Bourguignon d'adoption, un mot nous vient en tête : l'amour. C'est ce sentiment qui a toujours lié Masafumi Hamano à la France, pays de la gastronomie et des arts de la table par excellence. Et ce depuis le début de sa formation.

"À l'école culinaire, j'ai eu la chance d'avoir comme professeur un chef qui avait fait carrière en France" explique le principal intéressé. "J'ai tout de suite été captivé par cet univers. Je voulais étudier la cuisine française, apprendre toutes vos techniques, tous vos savoir-faire."

Débarqué en France à 19 ans

L'amour peut aussi provoquer des décisions prises sur un coup de tête. Comme lorsque, à 19 ans, Masafumi Hamano décide de quitter son pays d'origine pour partir en France et accomplir son rêve. Pari gagnant, puisque c'est dans l'Hexagone qu'il s'épanouira, cuisinant d'abord à Lyon, puis dans l'Indre et enfin en Saône-et-Loire.

Plus précisément à Saint-Amour-Bellevue, son "coup de foudre". "Ah Saint-Amour", soupire-t-il. "Je me souviens de ma première visite. C'était en 2004, quand je travaillais à Lyon. Un ami y habitait, je suis venu le voir. Et il y avait tout : la nature, le paysage, le vin, les fruits, la vue, le climat. Je me suis dit "si un jour tu ouvres ton restaurant, ce sera ici."

Promesse tenue en 2013. Après une expérience dans l'Indre, dans le village de Saint-Valentin (ça ne s'invente pas), Masafumi Hamano ouvre "Au 14 février". Un nom évocateur. "Je me souviens de cette ouverture, le 10 octobre", se remémore le chef. "Dix jours, plus tard, on recevait la visite surprise du guide Michelin. Ça a l'air d'avoir plu, car on a obtenu une première étoile", sourit-il avec malice.

La deuxième suivra en 2018. Entre temps, "Au 14 février" prend de l'ampleur. Et fait rayonner le village de Saint-Amour tout entier. De nature timide, le chef Hamano s'intègre et fait appel à des fournisseurs locaux pour son vin, son pain ou ses légumes. 

Plus important pour lui, la nature est omniprésente dans ce petit coin de France. Et il l'arpente de long en large, comme ses réseaux sociaux en attestent. "Pour tout vous dire, je puise mes inspirations culinaires dans mes sorties", avoue Masafumi Hamano. "Depuis que je suis en France, j'ai dû visiter des centaines de villages. Mais aucun musée. Car je veux du vivant".

Un départ forcé pour "raisons personnelles"

Mais les histoires d'amour sont parfois synonymes de tristesse. Lorsque Masafumi Hamano annonce son départ, le coup est rude. "J'aurais voulu rester. Mais mes parents, qui sont au Japon, ont des soucis de santé depuis plusieurs années. Avec le Covid, je ne les ai plus vus depuis 3 ans. Ce n'est plus tenable. Ma famille reste la chose la plus importante".

Une décision mûrement réfléchie depuis de longs mois. Au restaurant, le dernier service aura lieu le 31 mai. La municipalité de Saint-Amour-Bellevue accuse le coup : "'Au 14 février' était très important dans la commune. Un deux étoiles dans un village de 500 habitants, ce n'est pas commun", explique Catherine Canard, première adjointe. "Cela mettait en lumière le village, amenait une clientèle touristique internationale qui restait sur plusieurs jours et faisait tourner les autres commerces". 

La France, c'est désormais mon deuxième pays, et ça le restera. Mon fils est né et a grandi ici, j'y ai passé la moitié de ma vie.

Masafumi Hamano,

chef doublement étoilé du restaurant "Au 14 février", à Saint-Amour-Bellevue

Bien sûr, l'élue "comprend totalement les raisons personnelles qui l'amène à partir". Et préfère se souvenir "de la fierté ressentie par le village lorsque Masafumi a décroché sa deuxième étoile. Une distinction méritée, fruit de travail incessant".

"Quitter la France et la région, ce sera un crève-cœur" reprend le chef Hamano. "La France, c'est désormais mon deuxième pays, et ça le restera. Mon fils est né et a grandi ici, j'y ai passé la moitié de ma vie. Bien sûr que c'est dur. Mais ce n'est pas un adieu, loin de là".

Après un été au Japon, Masafumi Hamano a ainsi prévu de revenir en France, dans le village de Saint-Valentin, pour passer deux mois en cuisine dans son ancien restaurant. "Et je reviendrai au moins une fois par an à Saint-Amour. Pour revoir les amis, mais aussi puiser de l'inspiration pour ma cuisine". Car le chef le promet, dans ses assiettes, la France ne sera jamais bien loin. Les histoires d'amour ne finissent pas toujours mal.

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