Le sergent Claude Fournier, originaire de Colombier-en-Brionnais, en Saône-et-Loire, a été "tué à l'ennemi" devant Douaumont, dans la Meuse, en 1916. Grâce aux progrès de la science, son squelette a été identifié et il va être inhumé officiellement un siècle plus tard.
Un squelette mis au jour par une pelleteuse
Cela fait 102 ans que Claude Fournier est mort au champ d’honneur. Un siècle plus tard, il va être inhumé dans la nécropole nationale de Douaumont en présence de son petit-fils. La cérémonie aura lieu mercredi 21 février 2018. Le maire de Colombier-en-Brionnais fera le déplacement avec une centaine de personnes, dont des enfants "qui ont travaillé sur le devoir de mémoire avec cette histoire qu'ils connaissent par coeur".Tout commence par un coup de pelleteuse le 6 mai 2015. Lors de travaux au Mémorial de Fleury-devant-Douaumont, un engin met au jour "trois squelettes quasiment entiers, complètement enchevêtrés", raconte Bruno Frémont, médecin légiste à Verdun.
Comment identifier ces hommes quand on sait que près de 300 000 soldats sont morts pendant la bataille de Verdun (qui a eu lieu de février à décembre 1916) ? Les corps d'environ 80 000 portés disparus sont dispersés dans une zone de 10 000 hectares transformée depuis en forêt domaniale.
Des analyses ADN sont en cours pour tenter d'identifier le squelette de Claude Fournier, un poilu de Saône-et-Loire, tombé au combat lors de la bataille de Verdun.
-Jean-Pierre Malatier, maire de Colombier-en-Brionnais (SE)
-Philippe Lenglet, président-adjoint du Souvenir Français de Saône-et-Loire
"Une série de petites circonstances miraculeuses"
Par miracle, une plaque d'identité militaire est retrouvée dans un tas de terre évacuée à 200 mètres du trou.
Ce minuscule objet en zinc et aluminium appartient à Claude Fournier, incorporé en 1900 à Mâcon. Les archives révèlent que le sergent est né le 27 novembre 1880 à Colombier-en-Brionnais, en Saône-et-Loire. Il appartenait au 134e régiment d'infanterie et a été "tué à l'ennemi" devant Douaumont le 4 août 1916 à l'âge de 35 ans. Les données morphologiques de sa fiche matricule semblent correspondre à l'un des trois squelettes retrouvés.
Le maire de Colombier-en-Brionnais, Jean-Paul Malatier, apprend par un article de presse qu'un enfant du village tombé au champ d'honneur a peut-être été retrouvé. Il se met à la recherche de d’éventuels descendants. Une octogénaire, Claudia Palluat-Montel, pense être apparentée à la famille Fournier qui a quitté la commune bien avant 1914.
Avec les Anciens combattants et le Souvenir français, ils dressent un arbre généalogique et retrouvent un petit-fils, Robert Allard, 75 ans, qui habite sur la Côte d'Azur.
Claude Fournier était jardinier dans la région lyonnaise. Il était marié à Marguerite et avait donné le jour à une fille, Antoinette, née en 1910. Des analyses génétiques, autorisées par le ministère de la Défense, confirment le lien de parenté entre le sergent Fournier, Robert Allard et Claudia Palluat-Montel.
"C'est la première fois qu'on identifie par son ADN un soldat français de la guerre 14-18", souligne le docteur Frémont.
Une reconstitution faciale a rendu un visage au Poilu
Le squelette a un nom, il lui faut un visage. Mais les lettres et photographies du Poilu, conservées par Robert Allard, ont été emportées par des inondations en 2015.L'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN) accepte alors de procéder à une reconstitution faciale du soldat, un acte inédit pour les experts de Pontoise.
A partir du crâne et des données génétiques, quatre portraits-robots sont réalisés avec des barbes, des moustaches et des coiffures différentes. Ces portraits sont ensuite comparés à un cliché d'un groupe de soldats parmi lesquels le sergent Fourier, déniché dans un carton chez Mme Palluat-Montel.
"Sur le plan scientifique et historique, c'est une réussite. Sur le plan humain, c'est quelque chose de superbe pour Robert Allard qui va avoir une sépulture pour son grand-père", dit le docteur Frémont.
Le petit-fils du sergent Fournier assistera à la cérémonie "par devoir filial, pour mon grand-père, un héros parmi tant d'autres héros, et par extension pour tous les soldats de 14-18".
"Ma mère (morte en 2011 à 101 ans) a toujours regretté de ne pas savoir où avait été enterré son père dont elle n'avait que des souvenirs confus", souligne avec émotion Robert Allard. "A deux reprises, il a fait acte de bravoure" et avait été décoré".
©France 3 Bourgogne
Intervenants :
-docteur Bruno Frémont, médecin légiste
-Jean-Paul Malatier, maire de Colombier-en-Brionnais
-Robert Allard, petit-fils de Claude Fournier
-adjudant Franck Nolot, IRGCN