Plusieurs syndicats du spectacle dont le Syndicat français des artistes interprètes SFA-CGT réclament près de 8 millions d'euros à quinze Centres dramatiques nationaux pour non-respect d'un accord de 2003 qui les engage à un certain volume d'emploi des artistes interprètes.
Lors d'une conférence de presse lundi, les patrons de ces CDN (Aubervilliers, Besançon, Bordeaux, Caen, Dijon, Gennevilliers, etc) ont alerté sur le risque de dépôt de bilan et de fermeture de leurs établissements s'ils devaient débourser cette somme. Les montants vont de 126.546 euros à 896.030 euros par théâtre. Selon son directeur Benoît Lambert, le Théâtre Dijon Bourgogne serait l'un des plus touchés (on lui réclame 700.000 euros). Les syndicats (SFA-CGT, rejoints par les syndicats FO et CFDT) réclament en outre à chacun des théâtres et au Syndeac (employeurs du secteur public) une astreinte de 10.000 euros par jour de retard à compter du 30e jour suivant le jugement.
L'assignation des syndicats date d'un an, mais la procédure débute véritablement mardi avec une audience devant le tribunal de grande instance de Paris. "Cette assignation il y a un an, alors que nous étions en pleine discussion sur l'intermittence avec les syndicats, est un vrai choc", a dit lundi Madeleine Louarn, présidente du Syndeac. "Les sommes sont incroyables pour la non-application d'un accord qui a toujours posé problème, et mettent en péril les CDN."
B.Lambert "le @TheatreDijonB est l'un des plus touchés, on lui réclame 700 000 euros" @planbey
— sceneweb (@sceneweb) 9 janvier 2017
Un accord de 2003 au cœur du débat
L'accord de 2003 a été négocié sous l'égide de l'Etat, qui n'en est pas signataire. Il prévoit que les 38 Centre dramatiques nationaux, qui sont le bras armé de la décentralisation théâtrale lancée il y a 70 ans, doivent affecter à l'emploi direct d'artistes en activité de plateau 40% de leur budget artistique. En outre, ce volume d'emploi doit correspondre à 100 mois et à 25% du nombre d'heures travaillées par les autres professions du théâtre (techniciens et administratifs).
Pour Denys Fouqueray, délégué général du SFA-CGT, cet accord est "tout à fait positif" et "si les CDN estiment qu'ils n'ont pas les moyens de l'appliquer, ils n'ont qu'à se retourner contre l'Etat qui a assisté à la négociation". Pour les théâtres, l'accord est "vétuste et absurde", car il ne tient pas compte de l'évolution de l'emploi des artistes et de l'intermittence. Les CDN n'emploient pas de troupe permanente (à l'exception du TNP Villeurbanne) mais soutiennent en co-production des compagnies indépendantes, ce qui est moins favorable pour le calcul des heures de travail. La première mission des CDN est la création, mais la création contemporaine utilise moins d'interprètes que le répertoire, observent-ils. Benoît Lambert, directeur du Théâtre Dijon Bourgogne, a précisé qu'il trouvait "normal qu'il existe un accord qui protège les acteurs, mais il doit aussi être favorable au secteur indépendant", avant de noter qu'il "n'avait jamais été appelé par les syndicats".
Bjr @sceneweb.Voici notre communiqué publié ce matin.Halte à l'intox et à la réécriture de l'histoire par le Syndeac https://t.co/1q4La1SubW
— SFA-CGT (@SFA_CGT) 9 janvier 2017
Le Syndeac a tenté en vain d'engager une négociation avec les syndicats depuis l'assignation. Il demande au ministère de la Culture "d'examiner ensemble en urgence" les moyens de rendre leurs missions compatibles avec l'accord de 2003 et "d'apporter aux CDN l'aide financière dont ils auront besoin pour faire face aux condamnations".
Le reportage de M. Gillot et D. Rabeisen avec :
- Benoît Lambert, directeur du Centre Dramatique National de Dijon
- Franck Halimi, coordination des intermittents du spectacle 21