"La panique, cette boule au ventre" : leur enfant diabétique sans suivi médical, la détresse de dizaines de familles

De nombreuses familles d'enfants diabétiques, suivis par un centre de soin à Mulhouse en Alsace, se sont retrouvés du jour au lendemain sans suivi, quand celle-ci a brutalement fermé. Dans le Territoire de Belfort, riverains, de nombreuses familles se retrouvent démunies, et inquites.

"La peur, le désarroi, avoir cette boule au ventre". Lorsqu'on lui demande comment elle se sent, Sana Meftah peine à cacher les larmes qui lui montent aux yeux. Il y a moins d'une dizaine de jours, son fils de 14 ans, diabétique, a perdu tout suivi médical.

Le 10 janvier, à Mulhouse dans le Haut-Rhin, le centre Edens où il était soigné a brutalement fermé, pour liquidation judiciaire. Une décision annoncée par e-mail aux 1.100 familles des enfants et jeunes adultes qui y étaient suivis pour maladies hormonales, troubles du sommeil et de l'alimentation, et enfants atteints de diabète de type 1. 

Trois à six mois d'attente pour des malades chroniques lourds

"Le diabète, c'est une maladie lourde" explique Emilie Le Meunier au micro de Sarah Francesconi. Son fils, adolescent, a été diagnostiqué il y a maintenant 11 ans.  "Un enfant diabétique a besoin d'un suivi régulier, minimum tous les trois mois, si tout va bien". 

Son fils, Timéo, avait toujours été suivi par la même spécialiste. Il ne peut plus la consulter : "on n'a pas le droit de communiquer avec notre diabétologue tant qu'elle n'est pas licenciée" rapporte Émilie Le Meunier. "Il a besoin de suivi, il est en pleine adolescence, c'est difficile de gérer son diabète, et là, on se retrouve seuls, sans avoir personne à qui en parler, sans solution". 

En Alsace et dans le Territoire de Belfort voisin, les familles concernées par la fermeture du centre assaillent depuis dix jours les hôpitaux du secteur d'appels : Mulhouse, Trévenans, et même le CHU de Bensaçon. "On est sur liste d'attente" déclare Emilie Le Meunier. "Les délais vont être longs, trois à six mois" soupire-t-elle. En attendant, la mère de famille espère que le médecin généraliste de son fils suffira. 

Pour le moment, comme toutes les autres familles, elle ne parvient même pas à récupérer le dossier médical de son enfant : "on ne sait pas où il se trouve". Le secrétariat et toutes les lignes téléphoniques du centre sonnent dans le vide. 

"C'est la panique"

Une situation difficile, qui vire à l'insupportable pour les familles dont l'enfant a été diagnostiqué plus récemment, et dont le diabète n'est pas encore sous contrôle : "on ne sait pas gérer le diabète encore, moi, personnellement, je ne suis pas autonome" confie Sana Meftah.

"Récemment, comme il était un peu malade, mon fils est monté à 4 grammes [de sucre dans le sang ndlr]", rapporte-t-elle. Un taux élevé, qu'il faut rapidement maitriser avant que la situation ne s'emballe. A ce niveau d'hyperglycémie, de l'acétone se forme dans le sang et peut endommager les organes. "Quand il monte aussi haut, d'habitude, je communique avec l'équipe médicale, elles me disent par mail ce qu'il faut que je fasse, mais là, on a personne". "C'est la panique" souffle-t-elle. 

Mon fils m'a dit "j'ai plus de médecin, je vais mourir"

Sana Meftah, mère d'un adolescent diabétique insulino-dépendant

Sans soins et sans insuline, une personne atteinte de diabète de type 1 peut glisser dans un coma hyperglycémique et en mourir. Bien souvent, le premier diagnostic des enfants atteints de cette maladie est fait après une hyperglycémie très forte. Un événement traumatique et le début d'un long chemin d'apprentissage pour ces enfants comme leur entourage. 

"J'arrive à comprendre que le centre, il ferme pour des raisons financières" déclare Emilie Le Meunier,  "Mais ce que je ne comprends pas qu'on n'anticipe pas et qu'on ne gère pas la suite". "Quel manque d'humanité". 

Un centre unique

Le centre Edens avait ouvert il y a moins d'un an, en mars 2023. Plus d'un millier de patients en dépendaient déjà. Cette structure unique proposait un suivi complet, médical, diététique et psychologique. Le fils de Sana Meftah est arrivé dans le centre quelques mois après son diagnostic. "J'étais désespérée, complètement perdue" se souvient-elle. "J'ai repris confiance en moi et mon fils aussi". 

"Il y avait cette prise en charge qu'on ne retrouve nulle part" désespère Fatiha El Karimi. Elle aussi mère d'un fils diabétique, devenu jeune adulte, elle a lancé une pétition en ligne pour demander la réouverture du centre de soins. "On avait réussi à enfin avoir un sens, avec des patients partenaires" décrit-elle. "Non seulement, c'est un désert médical, mais on ne retrouvera pas cette qualité de soins". 

Le centre de soin, piloté par une association, était installé dans des locaux loués par la ville de Mulhouse. Mais c'est après quelques mois seulement, dès le 16 octobre, qu'a été ouverte une procédure de redressement judiciaire devant le tribunal de Mulhouse. L'association s'y déclarait en cessation de paiement depuis le 31 août 2023. 

L'Agence régionale de Santé d'Alsace recommande aux familles concernées par la fermeture du centre d'appeler le dispositif d'accompagnement et de coordination (DAC) d'Alsace, de 8h30 à 12h et de 13h30 à 17h, au 09 72 10 78 26, pour se faire connaître des autorités. 

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