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VIDEO. Saype, cet artiste qui peint des fresques géantes en plein air pour sensibiliser l'opinion sur l'état de la planète

Les fresques de Saype traversent les pays et les continents, des États-Unis au Kenya. L'artiste qui a grandi à Belfort peint sur l'herbe ses messages pour la planète à l'aide d'une recette écoresponsable. Il est au cœur du documentaire "Saype, artiste grandeur nature".

L’artiste Saype a révolutionné le domaine du land art, en peignant sur l’herbe ses fresques à l’aide de peinture écoresponsable. Car avant d’apprécier le message de ses œuvres, on se demande comment elles peuvent naître tout en respectant l’environnement. C’est justement une thématique chère à l’artiste. Le natif du territoire de Belfort grandit à la campagne, à la frontière franco-suisse. Entouré d’hectares de terrain, il va passer une année à peindre des carrés dans le jardin de ses parents.

Il va tester des peintures écologiques sans être satisfait de la tenue des pigments. Mais hors de question pour lui de mener son projet à bien s’il n’est pas écoresponsable : "J’ai essayé des peintures écolo qu’on trouve dans le commerce mais qui ne fonctionnaient franchement pas bien, j’étais pas satisfait. Et après je me suis dit je vais trouver mes pigments, je vais trouver ma recette qui fonctionne. J’ai fait une année de tests quand même."

Et cette recette, il la trouve. Elle allie charbon, craie et caséine, pour un rendu naturel, mais surtout éphémère : après quelques semaines, sa réalisation disparait d’elle-même. Mais son œuvre perdure, car ce qui l'intéresse, c'est précisément de laisser une trace dans les consciences, et non sur le sol. Il créé des œuvres finales qui vont dans des musées ou des galeries et sacralise ses réalisations pour les rendre immortelles.

Beyond Walls, créer un impact sur les gens sans heurter la nature

Saype se fait la voix des causes qu'il juge importantes pour notre planète. Et pour faire passer ses messages, il voit les choses en grand. En septembre 2018, on entend pour la première fois parler du projet de mur de Donald Trump entre les États-Unis et le Mexique. Cette annonce provoque un électrochoc à l'artiste.

Je me dis, on vit dans un monde qui est hyper connecté, mais ça fait zéro sens de mettre des murs entre les gens. On vit sur la même planète et je me dis que toutes les solutions qu’on doit trouver, elles doivent être communes, c’est ça que j’ai envie d’exprimer maintenant. On l’entend pas assez donc je veux créer symboliquement la plus grande chaine humaine au monde et j’appellerai ce projet Beyond Walls.

Saype

Il lance le projet Beyond Walls sur le Champ de Mars à Paris en juin 2019. Pendant une semaine, il réalise une fresque de 600 mètres de long et sur 15 000 m². Le symbole de Beyond Walls, c'est deux mains entrelacées qui se tendent l'une vers l'autre, et qui s'entraident. Des valeurs fortes pour un projet universel qui dépasse la barrière de la langue. Ces mains, on ne sait pas vraiment à qui elles appartiennent, mais c'est celles d'un autre être humain.

En les regardant plus attentivement, on relève la singularité de chacune dans des traces subtiles comme un bracelet ou un tatouage fin et discret. Pour réaliser ses œuvres gigantesques, Saype photographie d'abord de véritables mains : "C’est des mains de gens que je vais rencontrer sur ma route. C'est tout le monde et n'importe qui. Tu vas avoir des célébrités comme des gens pas connus du tout. Par contre, tout le monde est mis sur le même level (ndlr : niveau) puisque finalement je coupe ces mains et je ne sais même pas moi quand je peins après à qui appartiennent les mains.

Imaginer des ponts entre les êtres humains et leur histoire

En septembre 2023, Beyond Walls compte 17 créations aux quatre coins du monde. La dernière a été réalisée à Fuji, au Japon. L'artiste espère que ses créations amènent à une réflexion, de la population mais aussi des politiques. Saype n'hésite pas à se rendre dans des pays qui traversent des crises sécuritaires ou géopolitiques. À Ouagadougou, au Burkina Faso, il achève une fresque en mars 2020 de 10 800 m² et voit débarquer 250 personnes en mobylette, qui se mélangent aux ministres, au maire et aux "gens de la haute". Son art est un vecteur pour mélanger et rapprocher les gens et a un aspect social.

Au Bénin, la dixième étape du projet Beyond Walls aborde la question de l'esclavage. Entre la plage d’Ouidah et de Copa Cabana à Rio de Janeiro au Brésil, 14 millions de personnes ont été déportées. Saype décide alors de créer un pont symbolique entre le Bénin et le Brésil. Rio de Janeiro deviendra la quinzième étape de Beyond Walls. Car derrière les images idylliques de cartes postales, les histoires du passé sont souvent oubliées.

Nature morte, sa nouvelle série axée sur l'environnement

En 2021, Saype tombe sur un article du journal The Guardian qui condense l'horreur de la plus grande sécheresse jamais connue au Kenya en une photo de six girafes mortes. Après quatre années sans pluie, le pays est dans une détresse hydraulique sans nom. Il décide d'utiliser le Kenya qui a une diversité incroyable de paysages pour expliquer un fait général sur le réchauffement climatique, le dérèglement climatique et la disparition des espèces en général.

Pour Nature morte, un travail méthodique de repérage d'un an a été nécessaire, d’abord sur Google Earth, puis sur place en vérifiant l'état des emplacements avec un drone. Les contraintes techniques liées à l'état des paysages pour peindre peuvent faire sauter un endroit de la liste des repérages. Et pour pouvoir transmettre ses messages et raconter ses histoires, Saype a besoin de lieux forts. Il est de ceux qui veulent laisser leur marque sans abimer la nature. Il fait partie d'une génération d’artistes qui s'implique pour la planète, attentive aux outils utilisés pour transmettre un message. Le sien : le réchauffement climatique impacte tout le monde, mais pas de la même manière. 

À cause du manque de pluie au Kenya et dans la corne de l'Afrique, les animaux n’ont aucune chance et la nature non plus : plus rien ne pousse, la faune et la flore se meurent. Les Kényans se sont habitués à voir des carcasses d’animaux joncher les alentours de leur village, ou à perdre leur bétail à cause du manque d'eau. Car après quatre ans sans précipitation, cette réalité est devenue tristement commune. Saype s'y confronte en rencontrant des habitants d'un village, qui n'ont plus d'animaux, dans un climat ou plus rien ne pousse, et doivent trouver une autre manière de se nourrir et de vivre. Dans le berceau de l’humanité, la terre n’est pas accueillante, mais les gens le sont envers Saype et son équipe. 

S'il est seul, ce n'est qu'en apparence. Pour réaliser ces fresques monumentales, il faut être bien entouré. Car il faut parfois travailler plus vite que prévu alors qu'une tempête s'approche, ou peindre du levé du jour à la tombée de la nuit. Fort heureusement, une confiance absolue règne entre les membres de son équipe, qui est composée d'amis qu'il connait depuis ses trois ans. C'est lui qui résume la situation le mieux : "J’ai la chance de parcourir le monde et de réaliser mes œuvres avec mes potes d’enfance."

Un processus complexe de création

Les œuvres de Saype interpellent tant sur le message que sur la réalisation. Car pour peindre des milliers de m2, les étapes sont nombreuses. Le drone occupe une place capitale dans son processus de création. En travaillant avec des images aériennes du site choisi, il va faire un montage avec l'image qu'il souhaite peindre pour avoir un rendu final. Pour son œuvre du dromadaire, il part d'une photo d'un squelette qui fait environ 1m50. Il va faire ensuite produire un quadrillage, et se prêter à un agrandissement et une mise à l’échelle : "Cette grille, je viens la recalquer en plantant des piquets tous les 3 mètres et chaque piquet représente une intersection de grille sur ma photo. J’ai par exemple les piquets roses qui vont me servir à faire ces trucs tous les 3 mètres, et après, j'ai quelques couleurs qui me permettent de savoir si je suis sur la dent du dromadaire ou sur l’œil." Sur le dromadaire, plus de 300 piquets lui permettent de se donner une dimension dans l’espace. C’est un soutien pour tracer et comprendre où il est. À partir du premier quadrillage et de l’interprétation de la photo qui est faite, toutes les étapes sont essentielles. Si vous voulez en apprendre plus, il ne vous reste plus cas visionner ce documentaire.

Saype, artiste grandeur nature, un film réalisé par Emmanuel Besnier
Une coproduction JAGUANUM, Radio Télévision Suisse et France Télévisions
À voir dès à présent sur France.tv

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