Alors que les combats s'intensifient en Ukraine, face à l'invasion russe, dans l'Yonne, la communauté orthodoxe de Vézelay prie pour le retour de la paix.
Prier pour les morts et les survivants, cachés, au combat ou en exode. Prier pour les 200 civils qui ont déjà perdu la vie en Ukraine, seulement quelques jours après que la guerre a éclaté. L'heure était au recueillement dans l'église orthodoxe de Vézelay, commune de 400 habitants de l'Yonne, ce dimanche 27 février 2022.
Des paroissiens Russes et Ukrainiens
Cette petite paroisse a quelque chose de particulier. Il n'y qu'ici qu'on officie en français, entre Paris et Lyon. Cela en fait un lieu pour le moins cosmopolite. Parmi les 40 paroissiens, des Français, des Roumains, mais aussi une dizaine de personnes originaires de Russie et quelques autres d'Ukraine.
Un père américain
Son recteur, le père Stephen Headley, est quant à lui américain. Et si Russes, Ukrainiens et Américains sont en conflit sur la scène internationale, ici, "c'est assez consensuel", avance le père. "A ma connaissance, personne ne soutient Vladimir Poutine qui est isolé de par son idée obsessionnelle", constate-t-il, évoquant l'invasion récente de l'Ukraine par la Russie.
"La foi est le seul moyen de résoudre ce conflit"
Père Stephen Headley
"On a peu envie d’en parler. A la limite, on peut pleurer." Et prier surtout. Car pour Stephen Headley, ancien chercheur en anthropologie religieuse au CNRS, installé à Vézelay depuis 25 ans, "l'empathie constructive et la foi sont la seule manière de résoudre ce conflit. Elles apportent le courage, notamment sur place, d'aller aider les autres, de ne pas tomber dans l'incompréhension et le rejet".
Des églises pour faire office de bunkers à Kiev
A Kiev, dans la capitale de l'Ukraine, les églises proposent aux civiles un abri contre les bombardements dans leurs sous-sols, a rapporté le Département d’information et d’éducation de l’Église orthodoxe ukrainienne.
"Nous sommes crucifiés" par ce conflit
Dimitri*, choriste de la paroisse de Vézelay, de père français et de mère russe a prié, ce dimanche, durant la messe. Son épouse a lu un texte. "Enfin, j'ai poursuivi sa lecture car étranglée par les larmes, elle n'a pas pu continuer". Tous les deux ont des proches des deux côtés du conflit, en Russie et en Ukraine, avec qui ils tentent, dans la mesure du possible, de rester en contact. "Ils nous disent l'horreur". Et la peine est immense : "nous sommes crucifiés par tout cela".
Pas de parti pris
Dimitri dit ne pas avoir de parti-pris, "c’est un conflit avec toute sa tragédie". Alors il prie pour les civils, "les hommes, les femmes, les enfants, les vieillards, et aussi pour la culpabilité de l'Orient et de l'Occident", même s'il admet "une agression incontestable sur le sol du Donbass et l’Ukraine". Il veut simplement que cette guerre cesse, que "les Etats" fassent le maximum pour y mettre un terme "immédiatement".
Désaccord au sommet de l'Eglise orthodoxe
Si à Vézelay, tout le monde souhaite la fin de la guerre, ce n'est pas le cas au sommet de l'Eglise orthodoxe russe. "J'appelle toutes les parties du conflit à faire leur possible afin d'éviter victimes civiles", a demandé le patriarche Kirill, sans appeler pour autant à la fin des combats.
Du côté ukrainien, le métropolite de Kiev et de toute l’Ukraine orthodoxe, Onuphre, a demandé à Vladimir Poutine de mettre un terme à la “guerre fratricide“ qui vient d'éclater. Une position clairement plus tranchée.
En attendant, à Vézelay, c'est l'entente qui triomphe. Du moins sur un point : la nécessité de cesser les combats.
*Dimitri est un pseudonyme pour ce paroissien qui souhaite rester anonyme