C'était une institution, une véritable caverne d'Ali Baba avec de la laine, du tissu, des vêtements ou encore des bijoux. La mercerie de Madame Tisslaine a fermé ses portes ce samedi 30 décembre à Tonnerre (Yonne). Une page qui se tourne et une émotion particulière pour Bernadette, la propriétaire de la boutique depuis 45 ans.
Le carillon de sa porte d’entrée ne sonnera plus. Ce samedi 30 décembre, la mercerie Tisslaine a définitivement fermé ses portes. C’était le plus ancien commerce de Tonnerre (Yonne), une véritable institution.
Un magasin d’un autre temps, dont s’est occupé pendant de longues années Bernadette, qui fait partie de cette famille de commerçants dévoués corps et âmes à leur boutique et qui adorent le contact humain avec leur clientèle.
Alors forcément, au moment de baisser le rideau et de ranger les rouleaux de tissu, dans les halls de la mercerie aux véritables allures de caverne d’Ali Baba, c’était l’émotion. "Ça fait un petit peu chaud au cœur. C’est toute une période, ça va changer ma vie. Mais il faut bien arrêter. Le contact avec la clientèle va me manquer. J’ai aimé ce que j’ai fait, j’ai aimé conseiller les gens. Maintenant, il est temps de se reposer", confie quelques trémolos dans la voix et les yeux embués Bernadette, surnommée affectueusement "Madame Tisslaine" par ses clients.
Une boutique inaugurée le 8 juillet 1979
Car c’est un chapitre de 45 ans qui se clôt pour Bernadette. "C’était vraiment un métier passion. Pas forcément lucratif, mais c’est un choix que j’ai fait et je me suis retrouvée bien comme ça". C’est le 8 juillet 1979 que Bernadette inaugure sa mercerie.
A ses débuts, elle ne vend que du tissu, des voilages ou encore de la laine. Puis la boutique se développe, les rayons se remplissent et les produits s’empilent. Dans les casiers, on tombe sur des montagnes de rouleaux. Au détour d’un meuble, voilà que se présentent des pelotes. Sur un cintre, des t-shirt ou des pantalons.
Mais ne vous y trompez pas, malgré le désordre apparent, Madame Tisslaine sait exactement où chaque article se trouve. "Ça a toujours été comme ça, j’ai toujours su où se trouvait les choses. C’est important sinon je serais devenu folle. Aussi bien les petits détails que les grosses choses, je sais ce que j’ai !", lance-t-elle fièrement, du haut de ses 80 ans, au micro de Yacine Arbaoui.
C’est bien dommage, mais Madame Tisslaine a bien le droit de s’arrêter à l’âge qu’elle a. On avait toujours de bons conseils avec elle
Une cliente
Et plus que des articles de maison, ce que les clients viennent chercher chez Bernadette, ce sont ses conseils, savamment prodigués d’une voix calme et apaisante. "C’est un peu empilé, on va dire. Donc pour trouver ce qu’on cherche, si elle n’est pas là, on ne peut trouver !", rigole une fidèle. "Je viens ici, car c’est une vraie caverne, on peut rencontrer plein de choses. Et puis c’est toujours sympathique", commente un autre client.
Christine, la fille de Bernadette, connait aussi bien les lieux. Enfant, elle aidait sa mère. Pour le dernier jour d’ouverture de la boutique, elle est évidemment venue. "C'était nécessaire d’être là pour le dernier jour vu l’affluence. Ça fait quelque chose quand même. C’est ici que j’ai appris à rendre la monnaie et servir les clients. C’est une partie de mon enfance et de mon adolescence. Il y avait des clients amusés de voir qu’une petite de 8-10 ans les servait. Ce sont des bons souvenirs".
Cela faisait 10 ans que Madame Tisslaine évoquait l’idée de revendre sa boutique et de céder sa place. Mais les recherches n’ont pas abouti. Le magasin va tout de même continuer à vivre sous une autre forme, celle d’une galerie d’art. Et peut-être que les nouveaux propriétaires conserveront le vieux carillon de la porte d’entrée…