Des agriculteurs bourguignons réclament des sommes promises sous la droite par le gouvernement Fillon en 2011 et que le gouvernement Ayrault a annulées en arrivant au pouvoir en 2012. Au total, 28 recours sont examinés par le tribunal administratif de Dijon jeudi 21 mai 2015.
Quelle est cette promesse faite aux agriculteurs pendant le mandat de Nicolas Sarkozy ?
Au moment de préparer les déclarations PAC (Politique agricole commune) pour 2012, Bruno Lemaire, alors ministre de l’Agriculture du gouvernement Fillon, annonce une prime pour l’aide à l’engraissement des jeunes bovins. Les agriculteurs qui promettent d’engraisser et amener à l’abattoir au moins 50 bêtes se verront octroyer une prime de 60 euros par tête.La création de cette prime se fait en concertation avec la profession des éleveurs. C’est la FNSEA (Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles) qui mène les négociations.
Le syndicat précise que cette mesure a été notifiée à la Commission européenne fin juillet 2011, qu’elle a été dotée pour 2012 de 8 millions d’euros au titre de l'article 68 de la PAC et qu’elle a fait l'objet d'une circulaire d'application nationale parue au printemps 2012.
Pourquoi la promesse n’a-t-elle pas été tenue ?
Des éleveurs bovins séduits par l’annonce de cette prime se lancent et intègrent les sommes promises dans le calcul de leurs marges pour l'exercice 2012.Mais, en mai 2012, l’élection de François Hollande à la présidence de la République change la donne.
Bruno Lemaire cède son ministère à Stéphane Le Foll. En octobre 2012, le nouveau ministre de l'Agriculture remet en cause sur le dispositif et décide de bloquer le décret d’application.
La Confédération paysanne se félicite de cette décision. "En refusant de payer la prime JB (Jeunes Bovins) établie sur des bases totalement injustes, le ministère de l’Agriculture a pris une bonne décision", déclare le syndicat. Il estime, en effet, que "l’immense majorité des éleveurs était exclue et donc spoliée par la décision de Bruno Le Maire qui avait fixé un seuil d’entrée trop élevé à 50 places d’engraissement ".
Par ailleurs, selon la Confédération paysanne, un tel paiement aurait été "en totale contradiction avec l’orientation affichée par Stéphane Le Foll de mieux doter les 50 premiers hectares". Pour le syndicat, pour être équitable, l’aide aurait dû être attribuée à partir du 1er bovin, mais plafonnée.
Quelles ont été les conséquences de ce revirement pour les agriculteurs?
On avait calculé notre marge avec ces 60 euros par bête… Donc, cette année-là, on n’a rien gagné !
De son côté, la FNSEA n’approuve pas du tout ce changement de politique. Elle décide alors de faire des recours gracieux auprès des préfets pour que la prime soit malgré tout versée. Les recours sont tous rejetés. Le syndicat agricole décide alors d’attaquer au contentieux.
Ainsi, en Bourgogne, ce sont 28 dossiers qui sont présentés : 8 dans la Nièvre, 1 en Côte-d’Or et 19 en Saône-et-Loire.
A Sainte-Hélène, en Saône-et-Loire, au GAEC Sainte-Hélène, les associés Poulachon ont engraissé 88 bêtes en 2012. Avec une aide de 60 euros par bête, la prime devait atteindre 5 280 euros. "On avait calculé notre marge avec ces 60 euros par bête… Donc, cette année-là, on n’a rien gagné. On a rogné un peu de tous les côtés pour que ça passe."
Combien d’agriculteurs sont concernés par ce litige en France ?
Cette procédure devant les tribunaux administratifs a été lancée par la FNSEA partout en France."Pour certains éleveurs, cela représente plus de 8 000 euros de pertes", explique Stéphane Lafranchise, directeur de la FDSEA de la Nièvre, responsable régional section Viande Bovine à la FRSEA. "Nous espérons réparation, mais nous ne croyons pas au Père Noël… ",continue-t-il. "Nous soulevons là la question de la continuité de l’Etat quand un gouvernement change".
On attend maintenant la réponse du tribunal administratif de Dijon.
durée de la vidéo : 00h02mn05s
©INA
- Reportage : Michel Gillot et Gabriel Talon
- Montage : Pascal Rondi
- Intervenants :
-Anthony Poulachon, éleveur de charolais à Sainte-Hélène (Saône-et-Loire)
-Steve Lorton, représentant de l’UNEC (Union de Négociants en Charolais)