Le Salon de l’agriculture s’est ouvert samedi 27 février 2016 sur fond de colère de la part des éleveurs. Le Bourguignon Jean-Pierre Fleury, président de la Fédération nationale bovine, revient sur les raisons de cette colère.
Jean-Pierre Fleury, président de la FNB, était avec François Hollande lorsque le président de la République a été chahuté et hué par les éleveurs en colère, samedi 27 février, au Salon de l’agriculture. Il explique la souffrance des agriculteurs.
Jean-Pierre Fleury, président de la Fédération nationale bovine, revient sur la crise qui secoue le monde agricole et le mécontentement des éleveurs qui ont hué François Hollande lors de sa venue au Salon de l'agriculture. Il est interrogé par Pauline Ringenbach.
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La LME : la bête noire des agriculteurs, que le gouvernement promet de mater (AFP)
La loi de modernisation de l'économie ou LME, adoptée en 2008 et que le gouvernement veut réviser avant l'été, est dans la ligne de mire des agriculteurs qui l'accusent de contribuer à la chute des prix de leurs produits.L'objectif de cette loi: dynamiser la concurrence
Adoptée en août 2008, au début du quinquennat de Nicolas Sarkozy, ce texte instaure la liberté de négociation des prix entre les centrales d'achat des grandes surfaces et leurs fournisseurs. L'idée sous-jacente étant d'augmenter le pouvoir d'achat des consommateurs, en favorisant des baisses de tarifs.
La LME, avec son orientation libérale, met fin à la loi Galland qui régissait les relations entre industriels et distributeurs depuis 1996, et qui interdisait aux commerçants de revendre les produits en dessous du prix auquel ils les avaient achetés.
Dans les faits, du temps de la loi Galland, les distributeurs contournaient l'interdiction en pratiquant des marges arrières, c'est à dire exigeaient de leurs fournisseurs des ristournes différées.
Si la loi LME et la loi Chatel de 2008 ont fortement limité le recours à ces marges arrières, les agriculteurs reprochent au système actuel d'avoir trop dérégulé les négociations distributeurs/tarifaires, et surtout de ne pas prendre en compte les intérêts des producteurs, qui ne sont pas partie prenante des négociations, organisées principalement entre les enseignes de distribution et les industriels de l'agroalimentaire.
Les exploitants agricoles n'ont donc de cesse de dénoncer une "course aux prix toujours plus bas" et d'appeler les pouvoirs publics à rééquilibrer les relations en leur faveur.
D'autant que les éleveurs sont confrontés à une hausse de leurs charges en raison des prix alors élevés des céréales qui renchérissent considérablement le coût de l'alimentation de leur bétail.
Ils cherchent à répercuter auprès des industriels et de la grande distribution la hausse de leurs coûts de production. Mais ceux-ci refusent de prendre en compte ces hausses, au nom de la préservation du pouvoir d'achat des consommateurs.
Des ajustements en 2013/2014
Des aménagements à la LME ont été pris depuis deux ans pour rééquilibrer les rapports de force dans les négociations commerciales entre l'amont des filières et les distributeurs. Sont alors inclus dans les contrats négociés entre producteurs, transformateurs et grande distribution, des "clauses de renégociation" qui intègrent l'évolution des coûts de production, très dépendants des fluctuations du marché des matières premières.
Pour favoriser la loyauté et la transparence, les contreparties liées à une réduction de prix doivent être formalisées dans la convention annuelle fixant le résultat de la négociation commerciale, afin d'être vérifiables.
Mais les acteurs de la filière agricole en crise répètent que le dispositif n'est pas respecté par les enseignes de la distribution qui conservent l'avantage dans ce rapport de force.
Nouvelle révision prévue avant l'été
Alors que les négociations tarifaires annuelles entre les acheteurs de la grande distribution et leurs fournisseurs s'achèvent dans deux jours, le président François Hollande a affirmé samedi au Salon de l'agriculture que la LME devait "être revue", et qu'il fallait faire pression sur la grande distribution pour qu'elle évite d'accentuer par la guerre des prix les difficultés des éleveurs.
Le ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll a estimé pour sa part qu'il fallait "indiquer dans ces négociations tripartites le fait que les producteurs doivent aussi être parties prenantes".