Une nouvelle protestation contre la promotion de l'ancien ministre socialiste de la Justice, Henri Nallet, au grade de commandeur de la légion d'honneur s'est exprimée mercredi par la voix d'un avocat de Rouen dont des clients sont parties civiles dans l'affaire du Mediator.
Dans l'ombre du Médiator
"C'est un scandale politico-médical. M. Nallet se grandirait en renonçant à cette promotion. S'il ne le fait pas, je vais saisir le grand chancelier du conseil de l'ordre de la Légion d'honneur", a déclaré à l'AFP Me Mehana Mouhou qui compte parmi ses clients les enfants d'Albertine Pernice, décédée en 2008 à l'âge de 69 ans, après avoir été traitée avec du Mediator.
Selon Me Mouhou, les statuts de l'ordre de la Légion d'honneur prévoient qu'une décoration peut être retirée quand le récipiendaire "a commis des actes contraires à l'honneur ou de nature à nuire aux intérêts de la France".
Après avoir été ministre de l'Agriculture puis de la Justice sous la présidence de François Mitterrand, M. Nallet, 76 ans député socialiste de l'Yonne de 1986 à 1988 et de 1997 à 1999 , a eu de hautes responsabilités de 1997 à 2008 au sein du groupe Servier, laboratoire qui a fabriqué pendant 35 ans le Mediator (benfluorex), un médicament interdit en 2010, qui était utilisé comme coupe-faim, et pourrait être responsable à long terme de la mort de plus de 2.000 personnes, selon des études épidémiologiques.
Dans le cadre d'une instruction judiciaire toujours en cours sur le groupe Servier, M. Nallet a été entendu comme témoin assisté en décembre 2013.
Des protestations se multiplient
Sa distinction comme commandeur de la Légion d'honneur, troisième des cinq grades de cette prestigieuse institution, le 14 juillet dernier, a entraîné des protestations, dont celle de la pneumologue Irène frachon, qui a révélé le scandale du Mediator.
Un avocat parisien, Charles Joseph Oudin, autre défenseur de victimes du Mediator, a déclaré mardi qu'il allait saisir le président François Hollande, sous forme d'un "recours gracieux" pour qu'il "suspende" cette décoration et ordonne une enquête.
Nallet : "Beaucoup de bruit pour rien"
Henri Nallet s'est défendu par l'intermédiaire de son avocat, maître Baudelot : ''les juges d'instruction ont considéré qu'il n'y avait pas matière à (le) mettre en examen. Je vois mal, dans ces conditions, ce qui peut justifier les demandes des victimes du Mediator. On confond coupable, mis en examen, on confond témoin assisté, on confond tout. Cela fait du bruit pour rien''