Alors que les manifestations d'éleveurs laitiers face à la hausse des matières premières se multiplient en Bretagne, certains ont choisi une autre voie avec l'élevage en plein air de leurs troupeaux laitiers. Installés en bio, sur des petites surfaces, ils mettent en avant tous les avantages de ce système plus vertueux.
Travailler moins et vivre mieux tout en œuvrant pour le climat: c'est le pari
réussi de jeunes éleveurs laitiers bretons, soucieux d'inciter d'autres jeunes à s'installer en reprenant les nombreuses fermes disponibles dans les années à venir.
Leur maître-mot, l'autonomie.
Plutôt que d'agrandir, robotiser et maintenir les animaux en bâtiment, nous élevons nos vaches en plein air et nous les nourrissons exclusivement à l'herbe.
Maude Cloarec, éleveuse laitière
Eleveuse au Haut-Corlay, à trente-cinq kms de Saint-Brieuc, Maud Cloarec élève une cinquantaine de vaches laitières sur 70 ha.
"En France, la vache ne mange en moyenne que 15% d'herbe. Le reste, c'est du soja, des céréales et du maïs, alors qu'avec leurs quatre estomacs, les vaches sont faites pour manger de l'herbe! Résultat: elles sont en maladie chronique car leur régime n'est pas adapté", développe la trentenaire.
Les bienfaits de l'élevage à l'herbe
La liste est longue des bienfaits qu'elle attribue à l'herbe: "On n'achète pas
d'intrants, pesticides, engrais, aliments". Ces derniers représentent des coûts
très élevés et non maitrisables pour les éleveurs conventionnels qui manifestent nombreux ces dernières semaines contre la flambée des matières premières qui entrent dans la composition de l'aliment pour bétail.
L'éleveur à l'herbe fait aussi des économies en frais de vétérinaire, car ses vaches sont moins malades, et en énergie: "comme nos prairies sont permanentes, ça réduit de 80% nos charges en carburant pour les tracteurs, en eau, en électricité" par rapport au conventionnel.
Ronan Guernion, éleveur à Tonquédec (Côtes-d'Armor)
Selon l'institut de l'élevage : ce système herbager réduit de 75% les gaz à effet de serre. De plus, comme les vaches restent dehors la plus grande partie de l'année, il faut qu'elles y soient bien: d'où l'attention portée au bocage, avec des haies pour les couper du vent, des arbres pour leur donner de l'ombre, souligne Franck Le Breton, installé avec Maud Cloarec.
prairies et bocage sont "un point chaud de la biodiversité". En tant que paysan, on s'engage aussi pour le climat !
Franck Breton, éleveur laitier
Un livre publié par de jeunes éleveurs pour montrer que ça marche
Financièrement, malgré des volumes de lait moindres compensés par une production bio pour la majorité d'entre eux, ça marche aussi : "la surprise a été de voir le revenu doubler pour un temps de travail divisé par deux", témoigne, dans un livre "mode d'emploi" écrit par ce collectif de jeunes éleveurs, Jean-Yves Penn, installé à Ploërdut (Morbihan), passé à l'herbe il y a une vingtaine d'années.
équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle
Le collectif a mis au point un mode d'organisation qui se traduit par "35 heures annualisées" en fonction des saisons.
"Nous, on ne s'occupe que de notre troupeau. Ce n'est rien par rapport au travail
d'un éleveur conventionnel", relève Maud Cloarec.
On s'inquiète de ne pas voir assez de jeunes s'installer mais on est victime d'une communication plaintive: travailler 365 jours par an, sept jours sur sept, pour 400 euros par mois et, à la fin, on se suicide! Cela ne donne pas envie.
Franck Le Breton, éleveur
Au moment où la chambre d'agriculture de Bretagne s'inquiète du manque de successeurs face au nombre important de prochains départs à la retraite. Le collectif propose sa réflexion sur le sujet via son livre publié au Cedapa (Centre d'études pour un développement agricole plus autonome).