Entraînement sur une plage naturiste, messages à connotation sexuelle. Pendant neuf ans, un entraîneur breton avait usé de son statut pour harceler l'une de ses athlètes. Il contestait sa radiation. Elle a été confirmée en justice.
Les sanctions contre le coach breton qui harcelait son athlète étaient bien justifiées.
La cour administrative d'appel de Paris a confirmé en tous points la sanction "disproportionnée" dont un entraîneur bénévole de l’Athlétisme sud 22 de Merdrignac dans les Côtes-d'Armor se plaignait d'avoir fait l'objet. Elle faisait suite au "harcèlement" et aux "agissements déplacés" qu'il avait fait vivre à une jeune athlète.
Des faits signalés en 2020
La jeune femme avait signalé en avril 2020 à la Fédération française d'athlétisme des faits qu'elle estimait avoir subis "pendant neuf ans", et cela "à compter de sa majorité". L'entraîneur avait été radié. Et les instances disciplinaires de la FFA lui avaient également interdit de prendre toute licence ou toute fonction dans un club pendant cinq ans.
L'intéressé avait alors fait appel, mais la peine avait été alourdie : le 22 janvier 2021, outre une radiation et une interdiction de prendre toute licence pendant dix ans, s'était rajouté une interdiction de toute fonction dans un club d'athlétisme et une interdiction de participer à toute manifestation sportive organisée par la FFA, pendant quinze ans. La sanction avait même été assortie de la "publication nominative" de la décision au bulletin officiel de la Fédération française d'athlétisme.
Radié, il multiplie les appels
L'entraîneur avait alors saisi le Comité national olympique et sportif français (CNOSF), qui avait rendu "une proposition de conciliation" le 20 mai 2021, mais avec laquelle le coach était finalement "en désaccord".
Il avait donc demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision des instances disciplinaires de la fédération sportive parisienne. Mais celui-ci l'avait désavoué, dans un jugement rendu le 25 mai 2023. Le coach de "l'Athlétisme Sud Merdrignac 22" avait donc fait appel devant la cour administrative d'appel de Paris. Et une fois encore, il n’a donc pas eu gain de cause
L'organe disciplinaire d'appel de la FFA s'est fondé sur le témoignage de l'athlète et de son entraîneur, " mais aussi sur les nombreux messages et courriers électroniques" produits par la jeune femme, "dont l'intéressé ne conteste pas l'authenticité", confirme à son tour la cour d'appel dans un arrêt en date du 30 septembre 2024 qui vient d'être rendu public.
"Est sans influence la circonstance, selon laquelle à compter de septembre 2019, il n'était plus l'entraîneur de la jeune femme, qui avait arrêté l'athlétisme."
Entraînement sur une plage nudiste, messages à connotation sexuelle manifeste
En neuf ans, le requérant avait en effet adressé "2.346 courriers électroniques, des lettres manuscrites et des messages téléphoniques" à la plaignante ; il a "entretenu avec elle une relation épistolaire d'une teneur étrangère à l'entraînement sportif", considère la cour administrative d'appel de Paris.
"Ceux-ci abordaient de façon récurrente les thématiques de la sexualité, du rapport au corps et de la nudité. (...) Certains courriers étaient accompagnés de photos érotiques." La "connotation sexuelle" de plusieurs messages est ainsi "manifeste".
Surtout, l'entraîneur "exerçait un contrôle sur les relations amicales et amoureuses de l'intéressée, en menaçant par exemple de ne pas l'entraîner si elle était sortie la veille et en lui posant de nombreuses questions sur sa vie privée et intime", soulignent les juges parisiens.
"Par ailleurs, il reconnaît l'avoir amenée, au prétexte d'un entraînement, sur une plage nudiste et s'être déshabillé devant elle et lui avoir conseillé de faire de même, se contentant de dire que l'intéressée était majeure et pouvait refuser."
L'entraîneur sportif "ne conteste pas non plus sérieusement" de lui avoir "demandé de se dévêtir pour la masser, ni les nombreux contacts physiques établis lors des séances d'entraînement où ils étaient seuls".
Un ami de la famille
"Compte tenu de son jeune âge, de la confiance qu'elle avait placée dans son entraîneur qu'elle connaissait depuis l'âge de 11 ans et qui avait trente-quatre ans de plus qu'elle, et des liens que celui-ci entretenait avec les parents de la jeune athlète, l'intéressé étant presque considéré comme "un membre de la famille", il ne peut pas utilement se prévaloir de ce qu'elle n'aurait pas protesté ou réagi", estiment donc les magistrats.
Ce "harcèlement" portait "atteinte aux valeurs morales, éthiques et éducatives" et, "en dépit de ses qualités d'entraîneur attestées par plusieurs témoignages", la sanction qui lui a été infligée n'avait rien de "disproportionné". La publication de son nom dans le bulletin de la Fédération française d'athlétisme (FFA) se justifiait également par "la gravité des faits" et par "la nécessité d'assurer l'effectivité de la sanction".
"La circonstance que cette publication porterait atteinte à sa réputation n'est pas de nature à la faire regarder comme entachée d'une erreur d'appréciation", conclut la cour administrative d'appel de Paris, qui a condamné le coach au passage à verser 2.000 € de frais d'avocat à la FFA.