Du 22 janvier au 20 février 2024, la pêche a été fermée dans le golfe de Gascogne pour éviter les captures accidentelles de dauphins. Les scientifiques de Pelagis commencent à tirer des conclusions de cette période en analysant les données du terrain. Les échouages de dauphins blessés auraient diminué.
Du 22 janvier au 20 février 2024, environ 450 navires de pêche de plus de 8 mètres ont été obligés de rester à quai. Une mesure appliquée le long du golfe de Gascogne pour préserver la population de cétacés, et notamment les dauphins, des captures accidentelles, pendant leur période de reproduction.
Cette interdiction de la pêche pour un mois dans le golfe de Gascogne avait été prise fin octobre 2023 par le Conseil d'État, saisi par des associations et ONG de défense de l'environnement : Sea Shepherd, la Ligue pour la protection des oiseaux, Défense des milieux aquatiques et France Nature Environnement. Une mesure controversée qui a provoqué la colère des pêcheurs bretons et de toute la filière.
141 échouages de petits cétacés
Pendant cette période de fermeture, les scientifiques ont continué à recenser les échouages de dauphins et notamment ceux présentant des blessures qui pourraient correspondre à des captures dans les filets.
L'Observatoire Pelagis a commencé à analyser les données pour mesurer les effets de cette fermeture de la pêche dans le Golfe de Gascogne. Cet observatoire, rattaché à La Rochelle Université - CNRS, coordonne le Réseau national échouage (RNE) partout en France.
Un mois après la fin de la fermeture, Pelagis a publié un premier bilan, mis en ligne le 22 mars. Selon celui-ci, la mesure s'avère efficace. "Ce qu’on a montré, c’est que pendant la période de fermeture, on avait une diminution très importante du nombre d’animaux avec des marques de mort dans les engins de pêche, souligne Hélène Peltier, biologiste à l’observatoire Pelagis. Normalement on est autour de 50 à 90% des animaux retrouvés échoués pendant la période hivernale, notamment des dauphins communs. Et là, on a eu quelques individus qui ont été signalés. Je précise animaux signalés morts pendant la fermeture."
Sur la zone concernée par l'interdiction, "ce sont 141 échouages de petits cétacés qui ont été signalés au Réseau National Echouages" note Pelagis dans son bilan, dont 50 décédés pendant la période de fermeture.
"On en a eu quelques-uns au départ avec des marques mais qui étaient morts avant la fermeture, et qui avec les courants, sont arrivés un petit peu plus tard sur nos côtes pendant la fermeture" précise Hélène Peltier.
Nouvelles fermetures en 2025 et 2026
Selon l'observatoire Pelagis, les échouages de dauphins blessés ont repris depuis la réouverture de la pêche. Mais au comité des pêches du Finistère, on est sceptique. Virginie Lagarde est spécialiste de ces questions. Elle a hâte de voir le détail des données. "Nous attendons que les chiffres soient communiqués, que les analyses et la méthodologie d’analyse nous soient communiquées pour être capable de dire si cela nous paraît pertinent ou pas. Ou si on peut apporter des choses qui vont enrichir ces données."
Pour le comité des pêches, cette fermeture a été contre-productive car elle n'a pas permis à la filière de progresser dans la quête des solutions efficaces pour assurer la cohabitation entre pêcheurs et dauphins. Notamment, en testant les engins répulsifs et balises acoustiques posées sur les filets ou sur les coques des bateaux pour que les dauphins s’en éloignent. "Il faut savoir si la fermeture a un effet et puis continuer les tests que l'on devait faire cet hiver et que nous n’avons pas pu faire" explique Virginie Lagarde.
Quel que soit leur efficacité, de nouvelles périodes de fermeture de la pêche sont déjà prévues en 2025 et 2026.
(Avec Murielle Le Morvan)