Un long chemin vers le permis de conduire. La pénurie d’inspecteurs du permis de conduire pousse certaines auto-écoles à fermer. Les délais pour repasser l'examen explosent, laissant élèves et moniteurs dans une situation critique. Illustration dans le Finistère.
"Va tout droit, Johanna, puis tourne à droite." Sur une petite route de Pleudaniel, dans le Finistère, près de Brest, Johanna, 18 ans, donne l’impression de maîtriser parfaitement la conduite. Pourtant, l’étudiante appréhende son prochain passage de l’examen du permis. Après un premier échec, elle a dû attendre quatre mois avant de pouvoir s’inscrire à nouveau. Une attente interminable qui alimente son stress.
Des délais qui s'allongent
Dans le Finistère, les délais pour repasser l'examen du permis de conduire se sont considérablement allongés. La préfecture elle-même confirme que le département connaît un temps d'attente moyen de 120 jours, contre 99 jours à l’échelle nationale. Un écart conséquent, qui met en lumière une situation de plus en plus tendue.
Aujourd’hui, je suis incapable de donner une date précise à un élève recalé.
Ronan Guichouxmoniteur et gérant d'auto-école dans le Finistère
"Il y a trois ou quatre ans, quelqu’un qui ratait son permis pouvait espérer le repasser après trois ou quatre semaines. Aujourd’hui, je suis incapable de donner une date précise à un élève recalé. Je pense qu’il faut désormais attendre entre quatre et cinq mois", explique Ronan Guichoux, moniteur et gérant d’une auto-école dans le Finistère. "C’est devenu intenable pour eux, et pour nous aussi."
Les répercussions d’un échec
Pour Johanna Le Baut, une nouvelle défaite à l’examen pourrait avoir des conséquences lourdes. "Je suis en alternance, et c’est ma mère qui m’emmène chaque jour. Si je rate encore le permis, je devrais arrêter mon alternance, car elle ne pourra plus m'accompagner. Elle est obligée de mettre en pause son activité professionnelle pour me conduire", témoigne-t-elle, inquiète de son avenir.
Malgré un bon taux de réussite et une augmentation des inscriptions, Ronan Guichoux a été contraint de prendre une décision radicale : fermer l’une de ses deux agences. Selon lui, la situation est amenée à empirer, le département manquant cruellement d'inspecteurs pour assurer les sessions d'examen.
Une pénurie d'inspecteurs
"Au début de l’année prochaine, deux inspecteurs partiront à la retraite. S’ils ne sont pas remplacés, ce sera encore pire. À ce rythme, je ne pourrai plus proposer 13 places d’examen par mois, mais seulement 10", s’inquiète le moniteur.
Désormais, plus vous imposez d’heures de conduite aux élèves, plus vous obtenez de places d’examen.
Ronan Guichouxmoniteur et gérant d'auto-école dans le Finistère
La préfecture assure que des recrutements sont en cours pour pallier cette pénurie, mais pour Ronan Guichoux, cela ne suffit pas. Il dénonce par ailleurs les nouveaux critères d’attribution des places à l'examen, qui lui ont fait perdre un quart de ses créneaux en quatre ans. "Avant, les places étaient attribuées en fonction du taux de réussite de l’auto-école. Désormais, plus vous imposez d’heures de conduite aux élèves, plus vous obtenez de places d’examen", regrette-t-il.
Une solution dans les rangs des moniteurs ?
Face à cette situation, Ronan Guichoux propose une solution : recruter parmi les moniteurs d’auto-école expérimentés pour combler le manque d’inspecteurs. Une piste que le professionnel espère voir rapidement explorée, afin de permettre à ses élèves, comme Johanna, de retrouver un peu d'espoir dans la longue course vers le précieux sésame du permis de conduire.
(Avec Manon Le Charpentier)