Le tribunal administratif de Rennes a annulé le permis de construire qui avait été accordé le 6 mars 2020 par le président de Brest Métropole, François Cuillandre, à la société civile immobilière Kerea pour édifier à Brest un hôtel-restaurant-spa quatre étoiles, près de la plage du Moulin-Blanc.
Pour rappel, la société civile immobilière Kerea est détenue par Arnaud et Eliane Kerleroux, un couple de Guipavas, et Neris Groupe, un professionnel de l'immobilier de Poitiers (Vienne). Ce dernier cherche à développer des hôtels haut de gamme "en parfaite adéquation avec le contexte historique et environnemental". Mais cinq riverains ne l'avaient pas entendu de cette oreille et avaient saisi le tribunal administratif de Rennes en novembre 2020.
Les cinq plaignants s'inquiétaient de l'augmentation de la circulation qu'allait provoquer cet hôtel doté de 80 places de parking. Surtout, il était incompatible selon eux avec l'Orientation d'aménagement et de programmation (OAP) qui avait été arrêtée par les élus pour Kerangall.
Cette OAP avait en effet pour objectif de poursuivre l'aménagement de cet espace stratégique dans l'environnement résidentiel, paysager et touristique du Moulin-Blanc. La partie Est, jugée prioritaire et où devait s'implanter l'hôtel, doit accueillir "des programmes en lien avec la vocation métropolitaine du site". À l'Ouest, dans une seconde phase d'aménagement, un "programme diversifié d'habitat collectif" est prévu avec une densité minimum de 25 logements par hectare.
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Un projet "non compatible" avec les orientations d'aménagement du secteur
Dans un jugement en date du 15 décembre 2023, qui vient d'être rendu public, le tribunal administratif de Rennes commence par faire remarquer que cet immeuble de 14 mètres de haut "ne s'inscrit pas dans la volumétrie de l'architecture environnante" et ne respecte pas les règles relatives aux "limites séparatives" avec les parcelles voisines.
Mais surtout, le secteur de l'OAP Brest Kerangall "a pour objectif la production de logements" rappellent les juges rennais. "La seule énumération des natures résidentielles, paysagères ou touristiques de l'environnement du Moulin-Blanc ne suffit pas à l'interpréter comme visant à renforcer la présence de constructions de type hébergement hôtelier."
"En outre, ce projet s'étend sur 0,62 des 1,48 ha de la surface de l'OAP, occupant ainsi 42 % de sa superficie totale", souligne le tribunal administratif de Rennes. "Pour atteindre les objectifs de l'opération en termes de production de logements, 37 logements devront être construits sur une surface de 0,86 ha", reformule-t-il en d'autres termes. La surface est en outre "obérée par la présence de haies et de talus" identifiés comme à conserver ainsi que de "cheminements et de liaisons douces à réaliser."
Le permis de construire annulé
Au vu de ces contraintes, le projet d'hôtel quatre étoiles n'est donc pas compatible avec l'Orientation d'aménagement de programmation (OAP) de Brest Kerangall, concluent les juges. "Cette incompatibilité apparaît insusceptible de faire l'objet d'une régularisation sans entraîner un bouleversement de l'économie générale du projet." Le permis de construire a donc été purement et simplement annulé.
La SCI Kerea et Brest Métropole ont jusqu'au 15 février 2024 pour faire appel de ce jugement. S'il venait à être confirmé par la cour administrative d'appel de Nantes puis éventuellement par le Conseil d'Etat, la première serait en droit d'attaquer ultérieurement la seconde pour être indemnisée des préjudices (études, honoraires des géomètres, manque à gagner...) en lien avec ce permis de construire illégal. Dans l'immédiat, la métropole devra verser une somme globale de 1.500 € aux requérants pour leurs frais de justice.