"On ne pourra pas construire des murs de plus en plus hauts ", comme Sein ou Arz, les îles du ponant confrontées au changement climatique

Quand on vit sur une île, plus qu'ailleurs, le climat est au cœur de la vie et de l'organisation du territoire. Qui dit tempête, dit suppression des liaisons maritimes, menace de submersion... En quoi le changement climatique change-t-il la vie des insulaires ? C'est l'une des thématiques centrales du festival des Insulaires qui rassemblent ce week-end des habitants de toutes les îles du Ponant sur l'Ile de Sein

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C'est la benjamine des îles du Ponant, l'une des plus petites en taille. C'est aussi celle qui est souvent mentionnée dans les différentes discussions relatives aux submersions marines. 

Faites l'expérience de taper "île de Sein" dans un moteur de recherche. Rapidement, on vous oriente vers les problématiques d'érosion dont souffre l'île et les menaces de voir le caillou se laisser grignoter avec la montée du niveau de la mer. 

"Quand on est sur une île, contrairement au littoral, on sait que le territoire est forcément limité. Avec les problèmes d'érosion, on se demande forcément ce qu'il restera ".

Alain Hénaff

géographe

La préoccupation de la digue qui s'effondre 

L'île de Sein fait partie de ce que l'on appelle les "îles basses". Son point culminant est à neuf mètres. 25% du territoire est classé en risque de submersion marine.

Depuis plusieurs années, l'une des principales préoccupations y est l'effondrement de la digue. Le phénomène s'est accéléré en 2023 lors des grandes marées du mois de mars.  Une zone essentielle pour l'organisation de l'île s'est fragilisée : l'usine de dessalement et les groupes électrogènes pourraient être menacés par les eaux. 

"On attend toujours des travaux d'urgence et des études" explique Didier Fouquet maire de l'île. "La problématique est surtout financière. En dehors de la digue portuaire, prise en charge par la région, le reste de la digue est à la charge de la commune. Or, le simple budget de la commune ne peut pas couvrir l'ensemble des réparations. À titre d'exemple, rien que la remise en état de 50 mètres de digue a coûté 770.000 euros hors taxe alors que le budget municipal est de 400.000 euros par an. Et on ne peut pas geler non plus toutes les autres actions à mener dans le bourg. 

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L'enchaînement de tempête en question 

L'exemple de l'île de Sein n'est pas unique. Chaque île rencontre, à des échelles différentes, une évolution de son trait de côte. Sur l'île d'Arz, considérée elle aussi comme une île basse, le recul du trait de côte est devenu plus visible au moment des tempêtes hivernales : 

Lors de la tempête Céline en 2023, la route principale a été entièrement submergée. Ce qui était exceptionnel auparavant devient plus fréquent. C'est le cas aussi avec l'accostage des bateaux que l'on ne peut plus faire lors de certaines grandes marées.

Jean Loizeau

maire de l'île d'Arz

Les témoignages se croisent et entrent en résonance. Sur l'île d'Hoedic, posée sur une assise rocheuse plus haute, Émilie Moisdon, garde littoral depuis plus de 20 ans. Elle évoque, elle aussi, le constat une fois les tempêtes passées :

"S'il y a un phénomène naturel de dégraissement de la dune, les coups de vent de l'hiver dernier, surtout la tempête Céline, nous ont fait perdre 6 mètres de dune. Il a fallu être très réactif par la suite pour tout remettre en état et éviter une fréquentation trop importante à certains endroits fragilisés". 

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Si au quotidien, le phénomène d'érosion n'apparaît pas flagrant pour la garde du littoral, elle surveille avec attention certaines zones de l'île, telles que la zone humide, là aussi vitale. 

"Historiquement, on a toujours été habitué aux tempêtes en étant insulaire. Est-ce qu'il y en a plus maintenant ? Je ne sais pas...on est plus attentif c'est sûr mais je pense être plus inquiète par la surfréquentation sur nos petits territoires que par l'usure de l'île."

On ne pourra pas construire des murs de plus en plus haut 

Pour le géographe Louis Brigand, la question du changement climatique n'est pas quelque chose de nouveau sur les îles. Il a fallu depuis longtemps s’adapter aux périodes de sécheresse, de tempêtes, à l’érosion des dunes.

Alain Hénaff, lui aussi géographe spécialisé dans l'érosion des cordons dunaire, complète cette analyse. "Sur l'île de Sein, on a retrouvé des galets très anciens sous certaines maisons situées dans le bourg". C'est dire si les mouvements ont été nombreux aux différentes ères géologiques. 

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"On sait désormais que quoi qu'il arrive, l'élévation de la mer va se faire progressivement. À un moment donné, il y aura un débord. La question intéressante à se poser est de réfléchir au temps que l'on a devant nous pour agir efficacement. Construire des murs toujours plus haut, ça ne pourra pas toujours marcher. Il va falloir peut-être prendre le problème autrement, réfléchir à comment déplacer certaines structures essentielles à la vie des îles par exemple".

Réfléchir, croiser les expériences et les observations de chacun, trouver des solutions, c'est la dynamique qui semble animer à présent de nombreuses îles du Ponant. "On a des décennies devant nous pour préparer cet avenir" conclut le géographe Alain Hénaff. 

 

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