Contrairement aux particuliers, les entreprises paient l'énergie à prix coûtant. La hausse des tarifs paraît sans fin et pèse très lourd. Alors comment s'adapte l'agroalimentaire breton ? Exemple dans l'entreprise Hénaff.
Devant un aréopage de décideurs réuni à l'hippodrome de Longchamp pour l'ouverture de la Rencontre des entrepreneurs de France (REF) du Medef, Elisabeth Borne, a appelé à la sobriété énergétique des entreprises. La Première ministre a exhorté, ce lundi 29 août, les patrons à réduire de 10% leur consommation d'énergie sur deux ans pour contrer les difficultés dans l'approvisionnement en gaz.
En Bretagne, où l'agroalimentaire représente 40% des emplois industriels, comment les chefs d'entreprise se préparent-ils à ces hausses de coût ? Nous avons rencontré Loïc Hénaff, dirigeant du groupe éponyme, spécialisé dans le pâté et les rillettes en boîtes.
En fonction de l'ampleur et de la durée de la crise, on peut investir ou juste adapter nos usages.
Loïc HénaffDirigeant du groupe Jean Hénaff
A Pouldreuzic, dans le pays Bigouden, l'homme nous reçoit dans l'entreprise familiale. "La petite boîte bleue" connaît un succès sans faille depuis sa création en 1915, mais aujourd'hui on sent le chef d'entreprise soucieux : "La difficulté c'est de savoir combien de temps cette crise va durer et quelle va être son ampleur parce qu'en fonction de son ampleur et de la durée, on peut investir ou juste adapter nos usages."
Produire sa propre électricité
Le PDG du groupe familial affirme que côté économie d'énergie, l'entreprise fait déjà son maximum. La seule marge sur les coûts réside dans une production en interne des besoins en électricité. "La première des solutions, c'est de produire de l'eau chaude (NDLR : en interne) pour laver et pour la cuisson de nos produits dans les autoclaves. Donc on va remettre en route une station solaire thermique, avance Loïc Hénaff. On en avait une il y a 20 ans, il faut qu'on réinstalle le matériel."
Autre solution envisagée : "Investir avec d'autres partenaires dans une station photovoltaïque parce que ce sont des compétences que nous n'avons pas. Il vaut mieux les mutualiser."
Mais ces solutions ne peuvent voir le jour que dans un temps plus ou moins long. "Ce qui nous inquiète, c'est le court terme, le tout de suite. Les 18-24 mois qui viennent", s'alarme le chef d'entreprise qui craint de devoir utiliser un groupe électrogène en cas de défaut d'approvisionnement en électricité. "Ce serait un drame", soupire-t-il.
"On est pris à la gorge par l'urgence"
Cette année, le surcoût dû à la hausse du prix de l'énergie avoisine les 400 000 € selon le groupe Hénaff. Dans les deux prochaines années, il pourrait atteindre un million d'euros.
"On est pris à la gorge par l'urgence, c’est-à-dire qu'on parle d'une augmentation de 1 000% (NDLR x11) dans les prochains mois. On ne sait pas comment réagir (…) Gommer une hausse de 20%, ce n'est pas du tout la même chose que gommer une hausse de 1 000%."
Pas de bouclier tarifaire pour les entreprises
Contrairement aux particuliers, les entreprises ne bénéficient pas du bouclier tarifaire plafonnant les prix de l'énergie (adopté dans le projet de loi de finances pour 2022). Leur facture électrique a donc doublé depuis janvier. Et le pire reste à venir craint Loïc Hénaff : "Avec la guerre en Ukraine, le prix de l'électricité est en train de flamber et ça s'accélère. On a des prévisions pour 2023 et 2024 particulièrement alarmantes pour les entreprises."
Une augmentation répercutée sur le consommateur tôt ou tard
Pour l'instant, l'industriel a répercuté l'augmentation de ses coûts sur les distributeurs et affirme que le prix de vente au particulier reste inchangé. Mais ces hausses de prix arriveront tôt ou tard en bout de chaîne, dans le panier du consommateur. Si l'hiver est rude, le prix de la petite boîte bleue pourrait flamber.