Des infirmiers et infirmières de l'hôpital privé de Saint-Grégoire volontaires ont rejoint la région parisienne, pour aider leurs collègues surchargés à cause du coronavirus. Parmi eux, Isalina, 26 ans. Elle raconte le tourbillon d'émotions et son métier qu'elle appréhende autrement.
"On est en région parisienne depuis plus de deux semaines, notre équipe de volontaires tourne. Dès que quelqu'un souhaite rentrer en Bretagne, une autre personne prend sa place." Isalina est habituellement infirmière à l'hôpital privé de Saint-Grégoire en Ille-et-Vilaine. Avec d'autres collègues, elle prête main forte aux soignants d'une clinique des Yvelines. L'Île-de-France est l'une des régions les plus touchées par le coronavirus, les malades affluent.
"Je trouve dur de constater l'état instable de nos patients"
Isalina raconte, d'une voix douce, l'instabilité de ce virus, l'incertitude. "L'état des patients changent, ça se joue d'heure en heure. On peut passer du pire au meilleur, comme du meilleur au pire. L'autre jour, on a cru perdre un monsieur. Il s'est finalement stabilisé." Rien n'est acquis.
En réanimation, les patients sont plongés dans le coma. Isalina leur parle. "Je les salue, je dis qui je suis, je préviens quels soins je vais faire. On essaie de tout leur donner et quand il y a un décès c'est dur."
Vous avez vu ? Je me suis réveillée, je me suis battue. Mots d'une patiente
"Quand une patiente s'est réveillée il y a une semaine, il y a eu tellement d'émotions" lance Isalina. "Cela redonne de l'énergie, de l'espoir, de se dire que nos efforts ne sont pas vains." Elle rappelle que pour les malades qui ont vécu le coma, le chemin continue. "Ils vont devoir se rééduquer, ce sera long. Mais c'est possible."
"On apprend des équipes sur place, qui sont épuisées"
Isalina a 26 ans, diplômée depuis 2018. Avec le coronavirus, elle aborde une autre réalité de son métier. Elle a d'abord changé de rythme. Dans les Yvelines, elle travaille de nuit, douze heures d'affilée. "Je n'avais pas l'habitude, il faut s'adapter."
En Bretagne, elle s'occupe normalement de patients en bloc opératoire, ou en salle de réveil. La réanimation est autrement plus complexe. "La réanimation, c'est très technique. Les patients sont reliés de partout, par des capteurs, pour des analyses. Au bloc, nous manipulons moins le médicament." Isalina souligne : "On apprend de nos collègues sur place, ils nous forment et sont vigilants quant à nos gestes." "Dès qu'un moniteur de surveillance sonne, on est sur le qui-vive."
La voix d'Isalina tremble un peu quand elle évoque ses collègues sur place. "Ce que je trouve fou, c'est l'accueil qu'on a eu, cette chaleur à profusion de ces personnes qui nous disent merci, qui saluent notre courage de venir les aider alors que c'est normal, que c'est notre devoir. Ils sont tellement fatigués qu'ils ont parfois les larmes aux yeux."Nos collègues parisiens sont très fatigués. Ils sont là tout le temps. Ils alternent jour et nuit
La jeune femme ne craint pas la maladie elle-même. "J'ai plutôt peur de contaminer les autres, par exemple si je rentre."J'ai fait des rencontres exceptionnelles, qui vont durer. On alterne entre fous rires, les larmes, les tensions
Pour le moment, elle se sent capable de continuer. "Les équipes ici ont investi du temps avec nous, pour nous apprendre. C'est un devoir de rester."