Dresser un état des lieux du gaspillage alimentaire dans les lycées bretons, c'est l'objectif de la "Semaine de pesées" initiée par la région. A Cesson-Sévigné, l'établissement est en pointe. Ici, on a pulvérisé la moyenne nationale.
La séquence se déroule au bout du réfectoire du lycée Sévigné à Cesson, dans l’agglomération rennaise.
Le repas est terminé. Grappe après grappe, les élèves viennent se débarrasser de leurs plateaux. La plupart n’ont plus rien dans les assiettes, mais certains semble-t-il, ont eu les yeux plus gros que le ventre.
Et c’est là que Mickael Follet intervient. L'homme encadre le service général et technique du lycée, il est très à l'affût sur le dossier du gaspillage alimentaire, et il repère les assiettes encore trop bien garnies.
Hé, jeune fille, toutes ces pâtes carbonara qu'il te reste ? Précise, quand on te sert, la quantité qu'il te faut, pour que ça ne finisse pas à la poubelle.
Et la jeune fille, qui vient de se prendre un léger savon, de répondre. "Oui, je comprends, mais je n'avais pas trop faim, je n'ai pas trop aimé. Mais ça ne m'arrive pas tous les jours"
La "Semaine de pesées"
Ces jours-ci, comme 13 autres lycées bretons, l'établissement participe à la "Semaine de pesées", pour dresser un état des lieux du gaspillage alimentaire. L'opération est initiée par la Région Bretagne dans le cadre de son plan d'action pour le bien-manger dans les lycées.
Les entrées, les plats, les desserts, restés sur le carreau sont triés, et bientôt pesés pour dresser un état des lieux du gaspillage. L'objectif est de tirer des enseignements, de générer de nouvelles pratiques qui pourront être dupliquées dans l'ensemble des lycées bretons. Ici à Cesson, on s'est emparé du problème dès 2017.
"On gaspillait en nourriture 120 kg/jour, on est passé à 50"
"Ici, un millier d'élèves viennent déjeuner. A l’époque, on gaspillait 120 kilos de nourriture par jour, c'est énorme, raconte Mickael Follet. "Alors on est passé dans toutes les classes. Parler citoyenneté, environnement, économie, etc. Rappeler qu’il y’a deux millions de personnes qui ne mangent pas à leur faim, des étudiants notamment, rappeler aussi que les ressources ne sont pas inépuisables, que tout ce gaspillage a un coût. Beaucoup de lycéens étaient déjà sensibles à ces questions. Et on est rapidement passé de 120 à 50 kilos/jour."
Depuis, au lycée Sévigné, on n’est donc plus, en moyenne, qu’à 60 g de gaspillage par repas. Et c’est beaucoup mieux que la moyenne nationale.
Selon une étude de l’ADEME de 2016, les pertes et gaspillage de matières premières s’élèvent en moyenne à 143 g. 18% des quantités préparées sont perdues.
Combien ça coûte ? En restauration collective, si vous ajoutez les coûts direct et indirect (moyens humains, consommation d’énergie, l’élimination des déchets), vous atteignez les 68 centimes par plateau repas (chiffre 2016).
"Des économies à réaliser, pour les réinjecter dans des achats de denrées toujours plus responsables"
Réduire la facture du gaspillage, c’est évidemment ce que souhaite la Région Bretagne. Dans les 115 lycées dont elle a la charge, 10 millions de repas sont servis tous les ans.
"Si l’on applique le barème de l’Ademe, le potentiel d’économies est de 7 millions d’euros, explique Simon Uzenat, conseiller régional délégué à la commande publique. A reporter sur des achats plus responsables, circuits courts, produits bio etc. Avec à la clé un cercle plus vertueux : meilleure est la nourriture, moins on jette."
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10 millions de tonnes de nourriture gaspillés chaque année en France
Au-delà des établissements scolaires, près de 10 millions de tonnes de nourriture consommable sont gaspillés chaque année en France, soit l’équivalent de 150 kg/hab./an, peut-on lire sur le site de l'ADEME. Dans les ordures ménagères et assimilées, on trouve l’équivalent de 20 kg/hab./an de déchets alimentaires, dont 7 kg de produits alimentaires encore emballés.
A l’échelle du pays, le coût de ce gaspillage est estimé entre 12 et 20 milliards d’euros par an en France soit l’équivalent de 159 euros par personne pour les seuls ménages.
La France est engagée à réduire de moitié le gaspillage alimentaire d’ici 2025.