Les parents d'élèves sont unanimes pour dire qu'ils sont indispensables pour leurs enfants en situation de handicap. Et malgré ce constat partagé par le corps enseignant, les AESH ne sont pas suffisamment nombreux. À Rennes, par provocation et dans l'espoir de faire bouger l'Éducation nationale, des familles ont décidé de publier une annonce sur le site Leboncoin.
"On a mis une annonce d'emploi sur Leboncoin pour deux postes d'AESH de disponible et en une semaine, on a eu quatre candidatures" explique Yoann Lesouef, père de famille d'une fille en situation de handicap.
"Donc, ce n'est pas vrai de dire qu'il n'y a personne qui veut devenir AESH. Certaines personnes sont intéressées pour une première approche de l'Éducation nationale. Nous pensons que si l'Éducation nationale se donne les moyens pour trouver des solutions à ce manque d'AESH, nous sommes persuadés qu'elle peut y arriver" ajoute le père de famille mobilisé ce mercredi matin devant l'école Jules Isaac, dans le quartier de la Bellangerais à Rennes.
Car le problème est bien là. De nombreux établissements du primaire sont confrontés par ce manque crucial d'Accompagnants d'élèves en situation de handicap, les AESH.
L’Éducation nationale le reconnaît elle-même. Elle peine à en recruter. Chaque année en Bretagne, près de 20.000 enfants scolarisés sont en situation de handicap et près des deux tiers ont besoin d'un AESH. Mais malheureusement, tous n'en ont pas, le rectorat n'arrivant pas à en recruter suffisamment pour chaque enfant.
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Sur le site de France Travail (ex Pôle Emploi), nous sommes allés voir le nombre d'offres d'emploi pour des postes d'AESh et nous en avons trouvé que cinq ce mercredi 07 février.
Un manque d'AESH très préjudiciable
À l'école Jules Isaac, alors qu'il devrait y avoir quatre AESH pour accompagner les élèves en situation de handicap, ils ne sont que deux. Une situation qui perdure depuis la rentrée.
"En septembre, à la rentrée, il n'y en avait qu'un seul AESH sur les quatre. C'était pour ma fille, explique Yoann Lesouef, mais dès octobre, l'AESH a rompu son contrat pour une raison inconnue. Il a fallu une multitude de mails de réclamation et une mise en demeure devant la justice pour que nous récupérions un AESH en décembre". Selon Yoann Lesouef, une troisième famille aurait engagé, elle aussi, une procédure judiciaire dans l'espoir d'avoir quelqu'un pour assister leurs enfants.
Et pour Yoann Lesouef, l'absence d'un AESH auprès de sa fille durant deux mois a été très préjudiciable. "Notre fille a perdu quasiment deux mois d'apprentissage adapté en novembre et décembre, ce qui a accentué le décalage qu'elle avait déjà à la rentrée. Elle a actuellement du mal à rattraper son retard. C'est vraiment très compliqué".
"Il faut mettre des moyens pour avoir une école inclusive"
Au-delà "des enfants en souffrance" qui n'ont pas d'accompagnant, les parents soulignent que ce manque d'AESH a des répercussions néfastes sur les enseignants. "Les équipes enseignantes sont en difficultés, car elles doivent s'occuper de nos enfants. Ainsi, une des maîtresses a été déjà en arrêt deux ou trois fois" explique un père d'enfant en situation de handicap.
Un discours que partage la ville de Rennes : "Il y a un fossé entre les besoins des enfants et les moyens humains mis à disposition" reconnaît Gaëlle Rougier, élue à l’éducation à la mairie de Rennes.
Selon elle, l'Éducation nationale ne met pas suffisamment de moyens humains et matériels pour accompagner les enfants en situation de handicap. "Rien n'est fait pour penser l'inclusion dans le bâti et même dans la formation des personnels spécialisés et des enseignants. L'école inclusive revendiquée par l'Éducation nationale ne doit pas être une coquille vide".
Contacté sur ce manque d'AESH, le rectorat de Rennes nous a répondu que "le recrutement des AESH est effectivement au centre de nos préoccupations pour garantir l'inclusion scolaire".
Le rectorat se veut aussi rassurant, précisant que des mesures ont été prises, que "la situation de l'école Jules Isaac fait partie des situations qui sont traitées en priorité" et que des recrutements vont être faits dans les semaines à venir.
(Avec Antoine Calvez)