Le procureur de Rennes va ouvrir une enquête après l’échec d’une vaste opération anti-drogue dans le quartier du Blosne mardi dernier. Une « taupe » au sein même de la police pourrait être à l’origine d’une fuite d’informations. L’IGPN de Rennes sera chargée de l’affaire.
C’est une histoire qui paraît tout droit sortie d’un film ou d’une série policière que révèlent nos confrères du journal Le Monde. Mardi 23 janvier, 6h30, quartier du Blosne à Rennes. Une partie des policiers a rendez-vous pour un briefing matinal sur le parking du Castorama de Saint-Jacques-de-la-Lande. Derniers détails à régler avant une vaste opération antidrogue. Mais soudain, un véhicule passe à leur hauteur. Derrière les vitres, les trafiquants filment avec leurs smartphones les visages stupéfaits des policiers. Puis la voiture accélère et s’évapore dans la nuit.
Le coup de filet tombe à l’eau. Philippe Astruc, le procureur de la République de Rennes précise que "pas moins de 160 policiers étaient mobilisés notamment appartenant au RAID et à la BRI" et que cette enquête au long cours avait "mobilisé fortement les enquêteurs pendant plusieurs mois". L’objectif était d’interpeller en flagrant délit le gratin des dealers de ce quartier gangrené par le trafic de stups. Une voiture chargée de drogue devait revenir ce matin-là de la région parisienne.
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« Un dysfonctionnement inadmissible »
Colère des policiers rennais et du procureur Philippe Astruc qui qualifie ce fiasco de "dysfonctionnement inadmissible". Car, l’hypothèse la plus probable est celle d’une fuite au sein même de la Police nationale.
La veille de l’opération, les policiers rennais avaient décidé de reculer d’une heure l’horaire du briefing à 6h30. Mais dans la note interne de la police, il était indiqué que le briefing avant l’interpellation aurait lieu à 5h30 sur le parking du Castorama.
Grâce à une balise placée sous un véhicule des trafiquants, les policiers ont découvert que les délinquants étaient déjà sur les lieux à 5h30 avec la volonté de narguer les forces de l’ordre. Les dealers sont restés dans les parages jusqu’à l’arrivée des policiers une heure plus tard. Ce qui montre que les trafiquants avaient connaissance de la note interne de la police mais pas du changement d’horaire la veille au soir.
Jusqu'à 7 ans d'emprisonnement
Dans le viseur de certains policiers, la réforme de la police nationale entrée en vigueur le premier janvier dernier, car désormais la PJ est placée sous l’autorité du directeur départemental ou interdépartemental. Les informations qui restaient secrètes sont désormais communiquées bien au-delà des seuls enquêteurs de la Police judiciaire, ce qui augmente la possibilité de "fuites".
L’échec de cette opération ne vient en rien entamer notre détermination à lutter contre ces trafics qui pèsent lourdement sur la qualité de vie des riverains.
Philippe Astruc, Procureur de la république de Rennes
Le procureur va saisir l’IGPN de Rennes dès ce jeudi 25 janvier. Parmi les qualifications pénales qui seront retenues il y aura la violation aggravée du secret de l’instruction. Un délit passible de 7 ans d’emprisonnement.