SANTÉ. Un centre de soins pour les soignants au bout du rouleau

Une unité de soins pour les soignants va ouvrir ses portes au début du mois de juin à la Polyclinique Saint-Laurent à Rennes. Selon une vaste enquête menée dans les hôpitaux français entre 2000 et 2017, 49 % des praticiens souffraient de burn-out, dont 5 % sous une forme sévère. Mais les soignants ont souvent du mal à accepter l’idée d’être soignés. Pendant trois semaines, dans cette nouvelle structure, ils pourront bénéficier d’une prise en charge spécifique.

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Un jour, il y a quelques années, une pharmacienne a été hospitalisée dans le service de psychiatrie de la Polyclinique Saint-Laurent. Elle était au bout du rouleau, en burn out. Quand elle a été remise sur pied, avant de quitter le service, elle a suggéré à Vincent Lepage, le cadre de santé de créer une unité de soins pour les soignants. 

"Le personnel de santé a toujours été exposé au risque d’épuisement professionnel, constate la Haute Autorité de Santé dans un rapport sur le "repérage et la prise en charge cliniques du syndrome d’épuisement professionnel ou burn out".

Elle évoque une "pénibilité due à des causes intrinsèques liées à la nature même de l’activité médicale (confrontation avec la souffrance et la mort, prises en charge impliquant l’entrée dans l’intimité des patients, etc.) ou des causes extrinsèques (charge et organisation du travail, etc.). "

Des soignants en souffrance

Au quotidien, les soignants font face à la souffrance, à la peur, à la douleur, à la mort parfois. "Ce sont des métiers qui mettent les corps et les têtes à mal, remarque Vincent Lepage. Les horaires décalés, les gardes de nuit, le travail le week-end, les charges physiques, quand il faut faire des toilettes aux malades, et les charges mentales. Supporter la souffrance de l’autre, c’est lourd. Quitter son patient à la fin du service sans savoir si on le reverra, c’est très lourd. Si l’on ajoute à cela, les problèmes de démographie médicale, la paperasse et le Covid, cela fait beaucoup. Mais les soignants ont tellement l’habitude de prendre soin des autres, qu’ils ont souvent du mal à prendre soin d’eux." 

Ils souffrent pourtant : stress, insomnies, anxiété, dépressions… "Mais ils peuvent aller très loin dans leur refus de s’arrêter, note le cadre de santé. Que vont devenir mes patients, je ne peux pas faire cela, et caetera… Ils vont jusqu’au bout".

Vincent Lepage évoque l’histoire de ce chirurgien qui s’est blessé la main. "Il n’en pouvait plus. Cet accident, c’était sans aucun doute un acte manqué pour s’obliger à arrêter. "

Poser la blouse blanche

"Aujourd’hui, l’épuisement professionnel est reconnu, et c’est important, affirme Vincent Lepage. Nous allons pouvoir faire des choses."

Au mois de juin, l’unité ouvrira ses portes. Dans un premier temps, cinq lits seront réservés au personnel soignant, puis cinq autres en septembre. 

Les patients seront adressés par leur médecin ou un psychologue. Ils devront remplir un formulaire de pré-admission en ligne sur le site de la Polyclinique. 

"L’unité sera encadrée par une équipe pluridisciplinaire, constituée d’un médecin psychiatre, d’un psychologue, d’une assistante sociale, d’infirmiers, d’aides-soignantes et d’enseignants d’activités physiques adaptées, précise la plaquette de l’USPS. Les professionnels de santé dans le besoin se verront proposer un programme thérapeutique d’une durée de trois semaines en hospitalisation complète." 

"L’idée, c’est que le professionnel de santé puisse déposer sa blouse blanche et se recentrer sur ce qui lui arrive, précise Vincent Lepage. La première semaine, on travaillera avec de la sophrologie, de l’hypnose, des activités physiques. La seconde, on se concentrera sur la problématique de l’épuisement professionnel et la troisième, on préparera doucement la sortie."

Les soignants ne font pas forcément de bons malades

"La particularité des professionnels de santé c’est qu’ils ont du mal à quitter leur identité de soignants, s’inquiète Vincent Lepage. Si on a une infirmière dans une chambre à deux, on est sûrs qu’on va la retrouver en train d’aider sa voisine à s’habiller ou à manger. L’autre jour, j’ai retrouvé une infirmière à quatre pattes dans l’ascenseur en train d’éponger. Il y avait un peu d’eau qui avait été renversée, elle m’a dit, il y a un risque de chute. Aucun autre patient n’y aurait pensé."

"Quand il s’agit de prescrire des médicaments ou des soins à des médecins, des infirmières ou des aides-soignantes, c'est compliqué. Ils étaient de l’autre côté du lit, ils connaissent toutes les thérapies. Pour les infirmières notamment, quand ce sont des médecins, qui sont d’habitude ceux qui savent, ce n’est pas simple. Ce ne sont pas des patients faciles, mais il faut que les choses bougent, qu’on prenne leur mal être en charge"  insiste Vincent Lepage. 

"Notre atout, c’est d’être une Polyclinique, termine-t-il. Quand un soignant se fera hospitalisé chez nous, personne ne saura qu’il est dans un service de psychiatrie." Cela permettra, il l’espère, aux personnes de franchir le pas et d’aller mieux.

En France, les médecins font partie des professions où l’on se suicide le plus. L'espérance de vie des infirmiers est inférieure de sept années au reste de la population. 

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